Apollon

Apollon et les neuf Muses par Jan van Balen

Apollon et les neuf Muses par Jan van Balen

Ce cours est un hommage à mon défunt maître et ami, Georges RODIER, professeur d’histoire de la khâgne de Poitiers (lycée Camille Guérin).

Apollon est l’un des dieux les plus importants du panthéon grec ; il incarne à la fois le Soleil, la Lumière, mais aussi la Raison, l’Art, la mesure, l’équilibre… Il représente souvent le versant lumineux de la civilisation grecque. Il est aussi un dieu prophétique, régnant sur l’oracle le plus important du monde grec : Delphes.

Les origines

La légende

Apollon est fils de Zeus et de Léto ou Latone ; il est le frère jumeau d’Artémis. Il est né à Délos, au sommet du Cynthe. Le culte d’Héra était répandu partout : la malheureuse Léto est chassée de partout et se réfugie à Délos. À la naissance des enfants, l’île se couvre de reflets et de fleurs. Selon une autre légende, la jeune mère se serait réfugiée à Délos sous la forme d’une louve, et ce sont des loups qui l’auraient conduite en Lycie après la naissance des jumeaux.

Arrivé à Delphes, de Délos ou de Lycie, Apollon aurait enfumé le Python, gardien du vieil oracle de la terre, dans son antre ; il s’assimila alors la divinité, et devint Apollon Pythios.

Apollon séjourna sept ans auprès du roi de Thessalie Admète, qui habitait près du fleuve Tempé ; il y gardait les troupeaux royaux, en guise de pénitence imposée au dieu après un meurtre : celui de Marsyas, écorché vif pour avoir défié le dieu à la flûte, celui de Hyacinthe, ami d’Apollon et tué accidentellement, lors d’un lancer de disque, ou, plus vraisemblablement, celui des Cyclopes : la punition a été imposée par Zeus. Pour remercier Admète, Apollon obtient des Parques que le Roi serait épargné par la mort si l’un de ses proches mourait à sa place : ce sera le sujet de la tragédie d’Euripide, Alceste.

Les deux épisodes du Python et d’Admète étaient confondus dans l’esprit populaire, en particulier lors des fêtes de Delphes appelées Steptérion et Daphnéphories. La fête du Steptérion était une procession de femmes vers l’antre du Python, armées de torches. Elles poussaient devant elles un jeune garçon : après l’incendie de l’antre, le jeune garçon part à l’aventure, ou en esclavage. Au cours des Daphnéphories, de jeunes nobles partaient en Thessalie, cueillaient du laurier dont ils se faisaient des couronnes. Après la mort du Python, Apollon quittait Delphes l’hiver et revenait au printemps : c’était un phénomène annuel.

Apollon n’a pas de femme légitime, mais de multiples aventures, qui, toutes, ont mal tourné.

  • Daphné était une nymphe du Parnasse, sans doute interprète de l’oracle de Gaia. C’est une chtonienne : on peut donc parler d’hiérogamie. Sur le point d’être rattrapée, Daphné demande de l’aide à Gaia, et disparaît dans la terre : le laurier apparaît.
  • Cassandre, fille de Priam, répond à l’amour d’Apollon : par reconnaissance il lui donna le don de prophétie ; mais lassé d’elle, il lui ôta le pouvoir d’être crue.
  • Castalie, simple paysanne de Delphes, poursuivie par Apollon, se jeta dans une source qui porte son nom à Delphes, dans les Phédriades. Elle passe pour inspirer les poètes et les devins.
  • Marpessa, fille du roi d’Étolie et petite-fille d’Arès, fut promise par son père à quiconque le vaincrait à la course de char. Si le prétendant était vaincu, il était mis à mort. Un jour, Idas demande à son père Poséidon de lui donner un char magique ; il gagne et épouse Marpessa. Apollon, amoureux de la jeune fille, provoque en duel Idas. Zeus sépare les combattants. Marpessa choisit Idas.
  • Coronis, amante d’Apollon, s’éprend d’un mortel alors qu’elle est enceinte d’Asclépios, futur dieu de la médecine ; Apollon, averti de sa trahison par un oiseau, le corbeau (qui, du coup, devient noir) la fait tuer par sa sœur Artémis, mais il sauve Asclépios et le confie au centaure Chiron.
  • Clymène, qui de Japet avait eu Épiméthée, Prométhée et Atlas, donna un fils à Apollon : Phaéton, qui voulut conduire le char de son père, et dut être foudroyé.
  • Créüse, une des sept filles d’Érechthée, donna naissance à Ion (voir la pièce d’Euripide, Ion).

Origine historique

Apollon du Belvédère

On a prétendu qu’Apollon était un dieu dorien : Apella en dorien signifie « bergerie » et ἀπελλάζω, réunir ; or Apollon présidait aux assemblées. Ce dieu dorien aurait absorbé plusieurs divinités pré-helléniques ; or les Doriens se sont installés dans le Péloponnèse, où le Dieu est le moins vénéré. On abandonne donc aujourd’hui cette origine dorienne, au profit d’une origine pré-hellénique.

  • Une origine crétoise ? Délos a toujours eu de très nombreux rapports avec la Crète. Le culte serait arrivé à Delphes par des marins crétois débarqués à Krisa, au Nord du golfe de Corinthe ; ils auraient été guidés par un dauphin – un nom évoquant Delphes.
  • Une origine asiatique ? L’adjectif « lukeios » est attachée à Apollon, évoquant à la fois la lumière, la Lycie et le loup : or Apollon devait lutter contre les loups pour protéger les troupeaux. Le nom de « Lycien » évoque aussi l’Asie mineure, et par extension l’ensemble de l’Asie. Or dans l’Iliade, Apollon se range du côté des Troyens. Le héros Pandaros, lycien, évoque continuellement Apollon, Ἀπόλλων Λητοΐδης (« fils de Léto » : or les Asiatiques utilisaient le matronyme) ; Léto était assimilée à la déesse lycienne Lada. Les Achéens prient aussi Apollon, pour se concilier le dieu adverse…
    C’est en Asie qu’Apollon et Artémis étaient surtout adorés : ils y avaient leurs plus belles fêtes, leurs plus grands sanctuaires, comme Didyme ; les inscriptions hittites, déchiffrées en 1936, montrent des références à Apollon, Artémis et Léto, notamment une mention de « Apoulounas, dieu des portes » – une qualification que l’on retrouve en Grèce.
  • Une origine nordique ? Apollon est un ouranien, gardien de troupeaux ; or c’est du Nord que sont venus les pasteurs nomades. Le dieu est lié au cygne, oiseau de toute la mythologie nordique ; il a aussi des rapports avec l’ambre. Une très vieille tradition le rattache aux Hyperboreéens. Un poème d’Alcée (VIe s. av. J.-C.) raconte que Zeus avait désigné Apollon pour aller à Delphes, sur un char tiré par des cygnes, et devenir le législateur des Hellènes ; au lieu de cela il partit vers le Nord, au pays des Hyperboréens ; puis il revint à Delphes pour répondre aux supplications de ceux qui l’attendaient.
    Les Hyperboréens (gens vivant au-delà du pays où souffle le Borée) sont des hommes merveilleux, qui vivent 1000 ans sans lutte ni travail ; on les trouve cités par Pindare. Selon Hérodote, ils envoyaient chaque année des offrandes à Délos, portées par deux jeunes filles ; une année, elles moururent à Délos. Hérodote avait vu leurs tombes ; en réalité ce sont des tombes crétoises ou égéennes, de l’âge du Bronze. On peut trouver différentes étymologies au nom d’ « Hyperboréens » :

    • « gora » signifiant « montagne » dans les langues slaves → « sur / sous les montagnes » → ouraniens ;
    • -borée proviendrait de φέρω, porter : ceux qui portent les offrandes ;

  Les Hyperboréens peuvent provenir de la vallée de l’Ister (le Danube), ou, plus loin vers le N-E, du Caucase ou du Nord de la Caspienne. Le dieu a aussi un caractère extatique et prophétique, que l’on retrouve chez les Chamans d’Asie centrale.

Le Dieu doit donc venir du Nord-Est, des confins sibériens ; de là il a gagné l’Asie mineure, où il a absorbé des divinités secondaires, puis Délos et la Grèce continentale, à Delphes, en passant par l’Attique et en ignorant le Péloponnèse. Plusieurs sites extrêmement anciens témoignent de son passage : notamment la Tétrapole dans la plaine de Marathon, dont les relations avec Delphes sont antérieures au synœcisme d’Athènes. Tous les ans, les Athéniens envoyaient une théorie (c’est-à-dire une ambassade sacrée) par la galère paralienne, qui partait de Marathon. Sur la côte Est de l’Attique, dans le dème de Prasiai, se trouve un très ancien temple d’Apollon : le culte était déjà implanté à l’époque mycénienne.

Apollon et Dionysos

Dieu de la forme, de l’équilibre, Apollon s’oppose à Dionysos, dieu de l’ivresse et de la démesure. Les deux divinités constituent les deux pôles de l’esprit grec. L’extase apollinienne, différente de l’extase dionysiaque, a malgré tout des ressemblances frappantes : c’est par là que se produit la réconciliation de ces deux dieux. Lorsque Dionysos est introduit parmi les Olympiens, c’est Apollon qui lui sert de parrain.

Dionysos est accueilli à Delphes, l’hiver, quand Apollon est reparti.

À une époque tardive (Ve-IVe s.), les deux dieux ont fini par s’assimiler : Apollon, le dieu couronné de lierre, devient dieu bacchique, notamment chez Euripide. Ce dieu panhellène a ainsi absorbé de nombreuses divinités, devenant donc extrêmement complexe.

Les fonctions d’Apollon

Un dieu législateur et interprète des lois

Jusqu’au Ve s. av. J.-C., il était naturel pour les cités grecques de s’appuyer sur des décrets divins : on allait prendre les oracles, surtout à Delphes. Plusieurs cités passaient pour avoir reçu leurs lois, même constitutionnelles, d’Apollon lui-même, comme Sparte avec Lycurgue, ou Athènes, où les lois de Dracon sur le meurtre auraient été inspirées par l’oracle, et où plus tard les idées delphiques auraient influencé Clisthène. En plus de l’oracle, le dieu avait des ministres appelés exégètes, qui conseillaient les citoyens et les cités : ainsi, à Sparte, les Théopropoi qui prenaient leurs repas avec les rois et transmettaient à la cité les conseils du dieu. À Athènes, 4 exegetai, dont 2 nommés par l’oracle et 2 élus, qui restaient des citoyens, mais réglementaient de nombreuses questions religieuses : temples, rites, sacrifices, purifications après un meurtre, « affaires courantes » de la religion. Sur le plan politique, ils s’occupaient des relations extérieures de la cité, et de la fondation des colonies.

Apollon est un arbitre qui règle la vie de tous les jours : il devient le « grand patron du droit ». Tantôt il parle en son nom propre, tantôt comme prophète de Zeus. Mais ce maître de la loi la bouscule souvent : l’esprit de la loi, la justice, l’emporte sur la lettre.

Apollon et la justice criminelle

Sur la justice grecque, voir ici.

La croyance antique voulait qu’une victime non vengée se vît refuser l’entrée du royaume des morts : son âme (ψυχή) revenait dans le cadavre pour tirer vengeance du meurtrier et de tous ceux qui avaient failli à leur devoir. La souillure rejaillissait sur tous les membres du clan, puis de la cité : alors la punition collective devenait affaire d’État. Mais la cité devait respecter les règles de la justice, données par Apollon.

Celui-ci pouvait aussi pardonner, absoudre : c’est un dieu compatissant, qui prescrit alors une purification pour effacer la faute.

Le dieu de la pureté et de l’esthétique

Purificateur moral, il l’est aussi sur le plan physique : il est, d’abord seul, dieu de la médecine. Il fait naître les maladies, les épidémies, dont la peste – et peut donc les guérir. Jusqu’au Ve s., c’est à Apollon Épikourios (qui apporte son aide) que l’on consacre les villes. Le Péan (Παιάν ou Παιήων) est d’abord un petit dieu guérisseur, avant de devenir une épiclèse d’Apollon, et aussi un chant qui lui est consacré.

Devenu dieu de l’équilibre des facultés, morales et physiques, il devient dieu de la Beauté.

Apollon Musagète (qui conduit les Muses) incarne alors tous les arts : il joue de la flûte à anche, invente la cithare, il est le dieu des musiciens, des danseurs, des poètes. Mais malheur à ceux qui le défient sur ce terrain : Midas, Marsyas, Linos (inventeur de la mélopée) connaissent les pires tourments.

Un dieu terrien et agraire

L’un de ses attributs (comme de sa sœur Artémis) est l’arc, arme du chasseur, adoré dans les bois sauvages : il est le dieu-loup. C’est aussi un dieu pastoral : Apollon Galaxios (qui donne le lait aux brebis) représente une civilisation pastorale, où le berger est aussi thaumaturge (il guérit parce qu’il connaît les simples), poète et musicien. Apollon est le dieu des arbres, des fleurs, des récoltes ; dieu purificateur, il chasse les ennemis, les épidémies, comme en témoignent ses noms :

  • Érisybios, « qui conjure la rouille des blés » ;
  • Sminthios (« le mulot », qui évite le ravage des rongeurs) ;
  • Sitalkas (« protecteur du blé »)

On lui offre les prémisses des récoltes, parfois des épis d’or.

Un dieu solaire

Alors que sa sœur Artémis représente la Lune, Apollon, sous le nom de Φοῖβος (le lumineux) incarne le Soleil. Il en a le caractère à la fois ouranien, et purificateur.

Un dieu de la mer et des voyageurs

Protecteur des marins, des naufragés, des havres, de tous ceux qui partent, il a parmi ses animaux fétiches le dauphin (qu’il partage avec Dionysos). Dieu des explorateurs et des colonisateurs, il protège toutes les colonies ; il est aussi constructeur de villes : c’est lui qui, avec Poséidon, éleva les remparts de Troie.

En somme, c’est avant tout un dieu civilisateur : il chasse toutes les impuretés, repousse les contraintes périmées comme celles du clan, secoue le joug des préjugés, des tabous, il guide vers le vrai et le beau.

Le culte d’Apollon

Le culte d’Apollon ne comporte aucune trace de mystère : il est entièrement public. Comme à tous les dieux, on lui offre des sacrifices, moutons et chèvres, produits de la terre, fruits et surtout grains. À Délos, l’amas des cornes de chèvres et de béliers formait une véritable colline.

Les sanctuaires

Les deux plus importants sont évidemment Délos et Delphes. Mais il en existe beaucoup d’autres.

L’antre d’Ion, au pied de l’Acropole

Certains sont simplement des grottes, comme en Asie Mineure, en Attique, sur le flanc nord de l’Acropole. Mais l’on trouve aussi de grands sanctuaires, souvent comportant un oracle :

  • En Béotie, au Nord de l’Attique : Tégyre, Thèbes, Ptoïon (le mieux connu) ;
  • En Asie Mineure, Claros, qui comprenait un oracle : on entassait les arrivants dans le Mantéion, le prêtre demandait leurs noms, puis allait boire l’eau d’une fontaine magique ; à son retour il répondait aux questions.
  • À Didymes, dans l’actuelle Turquie, se trouve sans doute le plus ancien sanctuaire, connu dès le VIe s.

Les fêtes

Elles avaient lieu au printemps ou à la fin de l’été, jamais en hiver, et certains jours particuliers : le 1er, le 14, le 21, et surtout le 7 du mois, chiffre magique qui est aussi le jour de naissance du dieu. Ainsi les Daphnéphories ont toujours lieu le 7.

  • En Laconie, les Carnéia, et à Sparte les Hyacinthia sont des fêtes agraires, lors de la moisson et de la récolte des premiers fruits ;
  • À Claros et Didymes, les Didyméia et les Claréia sont des jeux artistiques, gymniques et musicaux ;
  • À Délos, les fêtes comportent une part de rites agraires, mais aussi une large place faite à la poésie et à l’art. Elles ont lieu tous les ans, avec une solennité particulière tous les 4 ans, la 3ème année de chaque olympiade. Tous les Grecs y envoyaient une ambassade : il est vrai que Délos était la capitale de la « ligue de Délos », véritable empire maritime athénien fondé après la deuxième guerre médique
    La fête commençait par une série de concours musicaux, puis gymniques (en particulier des courses de chevaux), et s’achevait par un banquet. En 425 fut célébrée pour la première fois la grande fête quadri-annuelle de Délos : l’ambassade d’Athènes était menée par Nicias. Après la défaite d’Athènes en 404, il ne resta que la fête annuelle. Elle fut rétablie en 378.
  • À Delphes, une grande fête pythienne avait lieu tous les 4 ans, le 7 du mois de Bukation (avril-mai) ; c’était un épisode des Daphnéphories. Elle consistait en un concours musical et artistique. Les poètes de Delphes faisaient graver sur marbre leurs œuvres en ex-voto dans le temple d’Apollon. Tous les 8 ans, on célébrait aussi, après les Daphnéphories, le Steptérion (On procédait à l’édification d’une cabane puis certains hommes y amenaient un enfant dont les parents étaient encore vivants. Ils en sortaient sans se retourner en renversant la table. Enfin la cabane était incendiée et l’enfant sortait et courait vers la vallée du Tempé pour se faire purifier).
  • À Athènes, les Athéniens se font un devoir de participer aux grandes fêtes à Délos et à Delphes. Ils y envoient des théories, c’est-à-dire des délégations solennelles. Celles-ci, composées de « théores », étaient dirigées par un « archithéore » dont les fonctions constituent une liturgie, une sorte d’impôt en nature : c’est lui qui prend en charge toute la théorie et les présents qu’elle apporte au dieu. Couronnés de myrte, donc intouchables, les théores partaient par la route une fois que les dieux, par un éclair sur le Permesse, avaient donné le signal du départ. La théorie vers Delphes nommée « Pythaïde » comprenait des magistrats, des prêtres, et les citoyens participant aux jeux. Ils devaient rapporter le feu sacré conservé sur l’autel du temple ; elle nous est très bien connue par le Trésor des Athéniens à Delphes, où l’on conservait les offrandes.
    La théorie de Délos partait sur la galère paralienne. Les dons athéniens étaient somptueux, par exemple un palmier de bronze grandeur nature…À Athènes même, les Thargelia avaient lieu les 6 et 7 du mois de Thargelion (mai-juin).

    • Le 1er jour, on purifiait la ville par le rite des pharmakoi, très proche du rite du « bouc émissaire ». Deux hommes portant des colliers de figues (l’un blanches, l’autre noires) étaient poussés par les rues ; ils étaient censés représenter les deux sexes et prenaient sur eux toutes les impuretés. On les frappait à coups de branches de figuier et de tiges de végétaux purificateurs, et on les chassait de la cité. D’autres rites comparables avaient lieu en Béotie.
    • Le 2e jour a lieu le rite particulier du « thargelos ». On cuisait ensemble des prémisses de toutes les céréales et de tous les produits de la terre : ce « thargelos » était porté en grande pompe sur l’autel d’Apollon, pour qu’il préserve des prémisses aussi prometteuses.

  Les Pyanopsia (le 7 du mois de pyanopsion, en octobre-novembre) célèbrent la récolte des légumes et le blé qui vient d’être moulu. On mélange légumes et farine et on porte le tout à Apollon, sur une table toute dressée.

Conclusion

Apollon n’est pas seulement un dieu libérateur : il est aussi conquérant et missionnaire. On le rencontre un peu partout, et il est à l’origine d’autres mouvements religieux. Ainsi les enseignements de Pythagore reflètent de nombreux aspects de la religion apollinienne. Le nom de Pythagore évoque un « disciple du dieu Python ». Le pythagorisme exalte la purification, les plus hautes vertus morales et même l’ascèse, qui rappelle l’extase pythienne.

Les religions apolliniennes sont aussi très proches de l’Orphisme, dont certains aspects annoncent le christianisme. Les adeptes ont une sérénité joyeuse, dont témoigne Aristophane dans Les Oiseaux :

Τοιάδε κύκνοι,
τιοτιοτιοτιοτιοτιγξ,
συμμιγῆ βοὴν ὁμοῦ
πτεροῖσι κρέκοντες ἴακχον Ἀπόλλω,
τιοτιοτιοτιγξ,
ὄχθῳ ἐφεζόμενοι παρ´ Ἕβρον ποταμόν,
τιοτιοτιοτιγξ,
διὰ δ´ αἰθέριον νέφος ἦλθε βοά·
πτῆξε δὲ φῦλά τε ποικίλα θηρῶν,
κύματά τ´ ἔσβεσε νήνεμος αἴθρη,
τοτοτοτοτοτοτοτοτοτιγξ·
πᾶς δ´ ἐπεκτύπης´ Ὄλυμπος·
εἷλε δὲ θάμβος ἄνακτας· Ὀλυμπιάδες
δὲ μέλος Χάριτες Μοῦσαί
τ´ ἐπωλόλυξαν.

Tels les cygnes (tiotiotiotiotiotix) sur les rives de l’Hèbre
unissant leur voix tous ensemble (tiotiotix)
et tous ensemble battant des ailes
clament l’hymne à Apollon
Leur cri monte parmi les nuages du ciel
Dans la forêt se taisent les animaux sauvages
Les flots de la mer s’apaisent
L’Azur resplendit (totototototix)
L’Olympe tout entier retentit
L’étonnement saisit les dieux
Et du ciel les Grâces et les Muses
Avec des cris de joie répondent à leur chant.