Le prologue
Ἄνδρα μοι ἔννεπε, Μοῦσα, πολύτροπον, ὃς μάλα πολλὰ
πλάγχθη, ἐπεὶ Τροίης ἱερὸν πτολίεθρον ἔπερσε,
πολλῶν δ´ ἀνθρώπων ἴδεν ἄστεα καὶ νόον ἔγνω,
πολλὰ δ´ ὅ γ´ ἐν πόντῳ πάθεν ἄλγεα ὃν[1] κατὰ θυμόν,
ἀρνύμενος ἥν τε ψυχὴν καὶ νόστον ἑταίρων.
ἀλλ´ οὐδ´ ὧς ἑτάρους ἐρρύσατο, ἱέμενός[2] περ·
αὐτῶν γὰρ σφετέρῃσιν ἀτασθαλίῃσιν ὄλοντο,
νήπιοι, οἳ κατὰ βοῦς Ὑπερίονος Ἠελίοιο
ἤσθιον· αὐτὰρ ὁ τοῖσιν ἀφείλετο νόστιμον ἦμαρ.
τῶν[3] ἁμόθεν γε, θεά, θύγατερ Διός, εἰπὲ καὶ ἡμῖν.
Traduction
- ὃν κατὰ θυμόν : « en son cœur ». ὃν est ici un possessif.
- ἱέμενός : « désireux de »
- τῶν : génitif partitif, complément de εἰπὲ : « dis-nous l’une de ces aventures »
- ἐννέπω : dire
- ῥύομαι > ἐρρύσατο : tirer d’un danger, sauver
- ἡ ἀτασθαλία, ας : orgueil insensé, folle présomption
- νηπίος, ου : enfant en bas âge è puéril, sot
- ἁμόθεν : de quelque côté
Muse, chante ce héros fameux par sa prudence, qui, après avoir détruit les remparts sacrés de Troie, porta de toutes parts ses pas errants, parcourut les cités de peuples nombreux, et s’instruisit de leurs mœurs. Sur les mers, en proie à des soins dévorants, il lutta contre les revers les plus terribles, aspirant à sauver ses jours, et à ramener ses compagnons dans sa patrie. Malgré l’ardeur de ce vœu, il ne put les y conduire ; ils périrent victimes de leur imprudence : insensés! ils osèrent se nourrir de troupeaux consacrés au Soleil, qui règne dans la voûte céleste, et ce dieu irrité n’amena point la journée de leur retour. Déesse, fille de Zeus, que nous entendions de ta bouche le récit des aventures mémorables de ce héros.
Commentaire
Comme le prologue de l’Iliade, celui-ci est extrêmement court : 10 vers, et centré sur l’annonce du sujet : les aventures d’un héros « fameux par sa prudence », et qui n’est pas encore nommé. Le texte est encadré par l’invocation explicite à la « Muse », « fille de Zeus » : la muse Olympienne, l’une de celles que célèbrera Hésiode dans son célèbre prologue de la Théogonie, et dans celui des Travaux et les jours.
v. 11-79.
L’Assemblée des Dieux
ἔνθ´ ἄλλοι μὲν πάντες, ὅσοι φύγον αἰπὺν ὄλεθρον,
οἴκοι ἔσαν, πόλεμόν τε πεφευγότες ἠδὲ θάλασσαν·
τὸν δ´ οἶον, νόστου κεχρημένον ἠδὲ γυναικός,
νύμφη πότνι´ ἔρυκε Καλυψώ, δῖα θεάων,
ἐν σπέεσι γλαφυροῖσι, λιλαιομένη πόσιν εἶναι.
ἀλλ´ ὅτε δὴ ἔτος ἦλθε περιπλομένων ἐνιαυτῶν,
τῷ οἱ ἐπεκλώσαντο θεοὶ οἶκόνδε νέεσθαι
εἰς Ἰθάκην, οὐδ´ ἔνθα πεφυγμένος ἦεν ἀέθλων
καὶ μετὰ οἷσι φίλοισι· θεοὶ δ´ ἐλέαιρον ἅπαντες
[1,20] νόσφι Ποσειδάωνος· ὁ δ´ ἀσπερχὲς μενέαινεν
ἀντιθέῳ Ὀδυσῆϊ πάρος ἣν γαῖαν ἱκέσθαι.
- Αἰπυν ὄλεθρον : la mort profonde
- Δῖα θεάων : divine entre les déesses
- ἐν σπέεσι γλαγυροῖσι : au creux de ses cavernes
- ἐπικλώθω (aoriste ἐπέκλωσα) : filer (se dit des Parques)
- ἀσπερχές : sans relâche
- μενεαίνω : désirer ardemment ; μενεαίνω τινί : être irrité contre quelqu’un
- πάρος : avant que
A ce moment même, tous les autres, ceux qui avaient échappé à la mort profonde, étaient chez eux, ayant échappé à la guerre et à la mer ; lui seul, l’auguste nymphe Calypso, divine entre les déesses, le retenait au creux de ses cavernes, brûlant de l’avoir pour époux, lui qui désirait le retour et sa femme. Mais quand vint l’année, le cycle révolu, où les Dieux filèrent son retour chez lui à Ithaque, pas même alors il n’échappa aux épreuves, même parmi ses amis, et tous les dieux en avaient pitié, sauf Poséidon ; celui-ci sans relâche était irrité contre Ulysse semblable aux Dieux, avant qu’il ne revînt dans sa patrie.
ἀλλ´ ὁ μὲν Αἰθίοπας μετεκίαθε τηλόθ´ ἐόντας,
Αἰθίοπας, τοὶ διχθὰ δεδαίαται, ἔσχατοι ἀνδρῶν,
οἱ μὲν δυσομένου Ὑπερίονος, οἱ δ´ ἀνιόντος,
ἀντιόων ταύρων τε καὶ ἀρνειῶν ἑκατόμβης.
ἔνθ´ ὅ γε τέρπετο δαιτὶ παρήμενος· οἱ δὲ δὴ ἄλλοι
Ζηνὸς ἐνὶ μεγάροισιν Ὀλυμπίου ἁθρόοι ἦσαν.
τοῖσι δὲ μύθων ἦρχε πατὴρ ἀνδρῶν τε θεῶν τε·
μνήσατο γὰρ κατὰ θυμὸν ἀμύμονος Αἰγίσθοιο,
[1,30] τόν ῥ´ Ἀγαμεμνονίδης τηλεκλυτὸς ἔκταν´ Ὀρέστης·
τοῦ ὅ γ´ ἐπιμνησθεὶς ἔπε´ ἀθανάτοισι μετηύδα·
« ὢ πόποι, οἷον δή νυ θεοὺς βροτοὶ αἰτιόωνται.
ἐξ ἡμέων γάρ φασι κάκ´ ἔμμεναι· οἱ δὲ καὶ αὐτοὶ
σφῇσιν ἀτασθαλίῃσιν ὑπὲρ μόρον ἄλγε´ ἔχουσιν,
ὡς καὶ νῦν Αἴγισθος ὑπὲρ μόρον Ἀτρεΐδαο
γῆμ´ ἄλοχον μνηστήν, τὸν δ´ ἔκτανε νοστήσαντα,
εἰδὼς αἰπὺν ὄλεθρον, ἐπεὶ πρό οἱ εἴπομεν ἡμεῖς,
Ἑρμείαν πέμψαντες, ἐΰσκοπον Ἀργεϊφόντην,
μήτ´ αὐτὸν κτείνειν μήτε μνάασθαι ἄκοιτιν·
[1,40] ἐκ γὰρ Ὀρέσταο τίσις ἔσσεται Ἀτρεΐδαο,
ὁππότ´ ἂν ἡβήσῃ τε καὶ ἧς ἱμείρεται αἴης.
ὣς ἔφαθ´ Ἑρμείας, ἀλλ´ οὐ φρένας Αἰγίσθοιο
πεῖθ´ ἀγαθὰ φρονέων· νῦν δ´ ἁθρόα πάντ´ ἀπέτισε.
- ὁ μέν : il s’agit de Poséidon.
- Μετακιάθω : changer de pays pour aller vers
- Διχθά = διχά : en deux
- Δεδαίαται : parfait épique, 3ème pl. de δαίω : séparer, diviser
- Δυσομένου Ὑπερίονος : au soleil couchant
- ἀντιόων : pour aller au devant de, c’est-à-dire pour prendre sa part de (futur sans sigma). Les Éthiopiens sont les Noirs qui habitaient au sud de l’Égypte, où le cours du Haut Nil les divisait en deux peuples, ceux du Couchant et ceux du Levant. Hérodote rapporte une légende égyptienne (III, 18) selon laquelle, sur une prairie appelée « table du Soleil », les magistrats éthiopiens exposaient la nuit, des viandes que chacun pouvait venir manger pendant le jour.
- ἀρνειός, οῦ : bélier
- δαιτὶ παρήμενος : assis au festin.
- ἀθρόοι : tous ensemble, en rangs serrés
- ἀμύμων, ων, ον : irréprochable. L’épithète s’accorde assez mal avec Égisthe, qui après être devenu l’amant de Clytemnestre, épouse de son cousin, assassina celui-ci à son retour de Troie… Bérard propose de le traduire par « éminent » ou « astucieux »…
- τηλεκλυτός, ός, όν = τηλεκλειτός, ός, όν : célèbre
- ἀθανάτοισι μετηύδα : μεταυδάω-ῶ + datif = parler au milieu de
- ἀτασθαλία, ας : folle présomption, orgueil insensé
- ὑπέρμορον : en allant au-delà du destin (parle de ceux qui aggravent leur destin par leur propre folie, dans l’Iliade et l’Odyssée.)
- γῆμ(ε) : aoriste sans augment de γαμέω-ῶ, épouser
- μνηστὴ ἄλοχος : la femme légitime (μνάομαι : désirer comme femme)
- ἡ ἄκοιτις, ιος : l’épouse
- τίσις, εως : châtiment, vengeance
- ἱμειρεται = subjonctif aoriste de ἱμείρω : souhaiter, désirer.
Mais il s’en alla chez les Éthiopiens qui sont au loin, les Éthiopiens qui sont divisés en deux, les uns au soleil couchant, les autres au levant, pour prendre sa part à l’hécatombe de taureaux et de béliers. Là il se réjouissait, assis au festin. Mais les autres étaient tous ensemble dans le palais de Zeus Olympien. Le père des hommes et des dieux commença à leur parler. Il se souvint en effet en son cœur de l’éminent Égisthe, qu’avait tué le célèbre Oreste, fils d’Agamemnon. Se souvenant de lui, il prononça ces mots devant les immortels : « Hélas ! combien les mortels accusent les dieux ! En effet, ils disent que c’est de nous que viennent les maux ; mais eux-mêmes, par leur propre présomption, ils souffrent des douleurs au-delà de leur destin. C’est ainsi qu’à présent Égisthe, au-delà de son destin, a épousé la femme légitime de l’Atride, et a tué celui-ci à son retour, sachant sa mort profonde, puisque auparavant, nous-mêmes lui avions dit, lui envoyant Hermès, le brillant tueur d’Argos, de ne pas le tuer, et de ne pas désirer l’épouse. D’Oreste viendrait la vengeance de l’Atride, quand il aurait grandi, et qu’il regretterait sa terre. C’est ainsi que parla Hermès, le bon conseiller, mais il ne put convaincre l’esprit d’Égisthe. Et à présent il a payé tout d’un coup.
τὸν δ´ ἠμείβετ´ ἔπειτα θεὰ γλαυκῶπις Ἀθήνη·
« ὦ πάτερ ἡμέτερε Κρονίδη, ὕπατε κρειόντων,
καὶ λίην κεῖνός γε ἐοικότι κεῖται ὀλέθρῳ,
ὡς ἀπόλοιτο καὶ ἄλλος ὅτις τοιαῦτά γε ῥέζοι.
Ἀλλά μοι ἀμφ´ Ὀδυσῆϊ δαΐφρονι δαίεται ἦτορ,
δυσμόρῳ, ὃς δὴ δηθὰ φίλων ἄπο πήματα πάσχει
[1,50] νήσῳ ἐν ἀμφιρύτῃ, ὅθι τ´ ὀμφαλός ἐστι θαλάσσης,
νῆσος δενδρήεσσα, θεὰ δ´ ἐν δώματα ναίει,
Ἄτλαντος θυγάτηρ ὀλοόφρονος, ὅς τε θαλάσσης
πάσης βένθεα οἶδεν, ἔχει δέ τε κίονας αὐτὸς
μακράς, αἳ γαῖάν τε καὶ οὐρανὸν ἀμφὶς ἔχουσι.
Τοῦ θυγάτηρ δύστηνον ὀδυρόμενον κατερύκει,
αἰεὶ δὲ μαλακοῖσι καὶ αἱμυλίοισι λόγοισι
θέλγει, ὅπως Ἰθάκης ἐπιλήσεται· αὐτὰρ Ὀδυσσεύς,
ἱέμενος καὶ καπνὸν ἀποθρῴσκοντα νοῆσαι
ἧς γαίης, θανέειν ἱμείρεται. οὐδέ νυ σοί περ
[1,60] ἐντρέπεται φίλον ἦτορ, Ὀλύμπιε; οὔ νύ τ´ Ὀδυσσεὺς
Ἀργείων παρὰ νηυσὶ χαρίζετο ἱερὰ ῥέζων
Τροίῃ ἐν εὐρείῃ; τί νύ οἱ τόσον ὠδύσαο, Ζεῦ ; »
- γλαυκῶπις : épiclèse d’Athéna, qui signifie d’abord « aux yeux de chouette » : Athéna est la déesse-oiseau ; puis l’on a interprété γλαυκός comme l’adjectif « brillant » (cet adjectif ne se trouve que 2 fois chez Homère (Iliade XVI, 34 et XX, 172) ; enfin il désignera une couleur : vert olive ou bleu gris.
- ὕπατος, η, ον : le plus haut, le plus grand
- ὁ κρίων, οντος : le plus fort
- λίην = λίαν : très
- ῥέζω : faire
- δαίφρων, φρονος : prudent, sage (qualifie Ulysse, Alkinoos, Télémaque…) Noter la paronomase avec δαίομαι, être enflammé
- δηθά : depuis longtemps
- φίλων ἄπο : noter la postposition et l’accent de ἄπο
- ἀμφίρυτος, ος, ον : entouré d’eau de toutes parts ; ici Homère utilise un féminin en –η, hapax. En grec νῆσος désigne l’île ou la presqu’île : il n’y a donc pas pléonasme.
- ὀμφαλός : le nombril, ou la boule au centre du bouclier. Ici, on doit préférer la 2ème interprétation, en référence à la forme de l’île, car la 1ère signifierait que l’île est au « centre de la mer », ce qui ne correspond guère à la géographie homérique.
- νῆσος δενδρήεσσα : emploi assez libre d’une apposition au nominatif
- ὀλοόφρων, φρονος : malfaisant, redoutable
- τὸ βένθος, ους : fond, profondeur
- ἡ κίων, κίονος (ὁ en ionien) : colonne de soutien
- κατερύκω : retenir, arrêter
- ὀδύρομαι : se plaindre, se lamenter
- θέλγω : charmer par des enchantements magiques, séduire
- αἱμύλιος, ος, ον = αἱμύλος, η, ον : séducteur, rusé
- ἐπιλήσεται : indicatif futur avec ὅπως ; < ἐπιλανθάνω, oublier
- καὶ καπνόν : même la fumée, ne serait-ce que la fumée. (ὁ καπνός, οῦ). On ne peut pas ne pas penser à Du Bellay : « quand reverrai-je enfin / fumer la cheminée de ma pauvre maison… »
- ἀποθρῴσκω : s’élancer hors de
- ἐντρέπομαι : se laisser émouvoir
- ὀδύσσομαι : être irrité contre ; jeux de mots avec le nom d’Ὀδυσσεύς ?
Alors la déesse Athéna aux yeux de chouette lui répondit : « Ô mon père le Cronide, le plus puissant des puissants, cet homme gît dans une mort très juste, et que périsse tout autre qui ferait la même chose ! Mais mon cœur brûle pour le sage Ulysse, au triste destin, qui depuis longtemps, loin des siens, souffre des maux dans une île cernée par les eaux, là où se trouve la bosse (le nombril ?) de la mer ; une île couverte d’arbres ; une déesse y habite un palais, fille du redoutable Atlas, qui connaît les profondeurs de toute la mer, et c’est lui qui tient les colonnes qui maintiennent séparés la terre et le ciel ; sa fille retient le malheureux qui se plaint, elle tente sans cesse de l’envoûter par de douces et séduisantes paroles, afin qu’il oublie Ithaque ; mais Ulysse, qui désire voir ne serait-ce que la fumée montant de sa terre, souhaite mourir. Ton cœur ne se laisse donc en rien émouvoir, Olympien ? Ulysse ne t’a-t-il pas charmé un jour en t’offrant des sacrifices près des vaisseaux des Argiens dans la vaste Troade ? Pourquoi t’es-tu irrité contre lui, Zeus ? »
Τὴν δ´ ἀπαμειβόμενος προσέφη νεφεληγερέτα Ζεύς·
« τέκνον ἐμόν, ποῖόν σε ἔπος φύγεν ἕρκος ὀδόντων ;
πῶς ἂν ἔπειτ´ Ὀδυσῆος ἐγὼ θείοιο λαθοίμην,
ὃς περὶ μὲν νόον ἐστὶ βροτῶν, περὶ δ´ ἱρὰ θεοῖσιν
ἀθανάτοισιν ἔδωκε, τοὶ οὐρανὸν εὐρὺν ἔχουσιν;
ἀλλὰ Ποσειδάων γαιήοχος ἀσκελὲς αἰὲν
Κύκλωπος κεχόλωται, ὃν ὀφθαλμοῦ ἀλάωσεν,
[1,70] ἀντίθεον Πολύφημον, ὅου κράτος ἐστὶ μέγιστον
πᾶσιν Κυκλώπεσσι· Θόωσα δέ μιν τέκε νύμφη,
Φόρκυνος θυγάτηρ, ἁλὸς ἀτρυγέτοιο μέδοντος,
ἐν σπέεσι γλαφυροῖσι Ποσειδάωνι μιγεῖσα.
ἐκ τοῦ δὴ Ὀδυσῆα Ποσειδάων ἐνοσίχθων
οὔ τι κατακτείνει, πλάζει δ´ ἀπὸ πατρίδος αἴης.
ἀλλ´ ἄγεθ´ ἡμεῖς οἵδε περιφραζώμεθα πάντες
νόστον, ὅπως ἔλθῃσι· Ποσειδάων δὲ μεθήσει
ὃν χόλον· οὐ μὲν γάρ τι δυνήσεται ἀντία πάντων
ἀθανάτων ἀέκητι θεῶν ἐριδαινέμεν οἶος.
- ἕρκος ὀδόντων : cette formule indique qu’une parole déplacée vient d’être prononcée.
- Περί construit avec le génitif exprime une idée de supériorité : περὶ μὲν νόον ἐστὶ βροτῶν se traduit par « il est par son esprit supérieur aux mortels » ; quand il est construit adverbialement, il garde ce sens : περὶ δ´ ἱρὰ θεοῖσιν / ἀθανάτοισιν ἔδωκε = « plus que tout autre, il a offert des sacrifices aux dieux immortels. »
- γαιήοχος : qui embrasse ou secoue la terre (épithète de Poséidon) ; cf. v. 74 ἐνοσίχθων (ébranleur du sol)
- ἀσκελής, ής, ές : dur, opiniâtre (ici neutre adverbial)
- ἀλαόω-ῶ : aveugler, priver d’un œil
- ἔσκον : imparfait itératif épique de εἰμί.
- Μέδων, οντος : chef, roi
- Πλάζω ἀπὸ πατρίδος αἴης : faire errer loin de sa patrie, écarter…
- Περιφράζομαι : examiner sous toutes ses faces, méditer
- Μεθήσει = futur de μεθίημι : relâcher, détendre.
- ἀέκητι + G : malgré
- ἀντία + G : contre
- ἐριδαίνω : tenir tête
Lui répondant, Zeus qui assemble les nuages dit : « mon enfant, quelle parole s’est échappée de la barrière de tes dents ? Comment pourrais-je, moi, oublier le divin Ulysse, qui l’emporte par son esprit sur les mortels, et qui plus que tout autre a offert des sacrifices aux dieux immortels, qui habitent le vaste ciel ? Mais Poséidon qui embrasse la terre est toujours opiniâtrement fâché à cause du Cyclope, qu’il a aveuglé, Polyphème semblable à un dieu, dont la très grande force régnait sur tous les Cyclopes : la nymphe Thoosa l’avait mis au monde, fille de Phorkys, roi de la mer stérile, s’étant unie à Poséidon au creux de ses cavernes. Poséidon l’ébranleur du sol, à la suite de cela, ne le tue pas, mais le fait errer loin de sa patrie. Mais allez ! Nous tous ici méditons son retour, cherchons comment il reviendra. Poséidon bridera sa colère ; en effet il ne pourra en rien, seul, tenir tête à tous les dieux immortels.