La religion romaine primitive | Le clergé romain | Influences étrangères : Grecque Étrusque Orientale Égyptienne |
Les dieux romains liste |
Mythe et histoire Tite-Live, II : Horatius Coclès, Mucius Scaevola et Clélie |
Les Enfers romains : Virgile, Énéide VI | Le culte impérial : L’Ara pacis augustae La Maison carrée de Nîmes |
Une réaction rationnaliste au 1er siècle av. J-C : Lucrèce |
La divination | Le christianisme à Rome |
Introduction
Dès le départ, Rome s’est trouvée confrontée à toute une série d’influences :
- Un vieux fond italique
- L’influence étrusque, elle-même mêlée d’influence grecque et égyptienne (les Étrusques étaient un peuple de commerçants, qui avaient de nombreux échanges, notamment avec la Grèce continentale (Corinthe), et l’Égypte)
- L’influence grecque de « Grande Grèce », et par son intermédiaire, de la Grèce d’Asie Mineure d’où étaient originaires les colonies grecques (voir le parcours d’un Pythagore, d’Asie Mineure à l’Italie du Sud)
- L’influence carthaginoise, et par là-même, phénicienne…
La conquête se fait certes progressivement, mais les influences la précèdent !
La conquête du bassin méditerranéen
Dès le 3ème siècle, Rome est en contact direct avec le monde grec et le monde étrusque ; au second siècle, la conquête s’étend à l’Asie mineure, et le contact devient direct avec l’Anatolie.
Au 1er siècle av. J-C, c’est la conquête de l’Égypte et de l’ensemble de l’Afrique du Nord… Dès lors, les contacts culturels et religieux ne cesseront plus è présence à Rome de religions orientales et égyptiennes : Cybèle, Mithra, Isis… Présence également de juifs à Rome.
La religion romaine primitive
Sous sa forme première, la religion des Romains était purement latine ou plutôt italique. Et ce qui semble caractériser tout spécialement les premières formes religieuses qui se sont exprimées dans la péninsule, c’est qu’elles sont aussi peu mythologiques que possible. Il s’agit sans doute bien d’un polythéisme, mais les divinités ont une individualité peu marquée ; parfois même leur sexe est douteux, et on les interpelle, par prudence, à la fois au féminin et au masculin ! Elles n’ont ni visage affirmé, ni histoire.
La théogonie, le dogme n’est presque rien ; les rites sont à peu près tout. L’idée maîtresse qui a engendré la religion romaine tout entière, c’est que tout humain, tout groupe (famille, corporation, cité), tout objet, tout acte, tout phénomène naturel, en un mot toute chose, animée ou inanimée, a son génie. Les dieux primitifs de Rome étaient tous des génies ou démons, en nombre quasi infini, et mal différenciés. Ils étaient essentiellement des puissances abstraites appelées “numina” ; tout au plus les classait-on en diexu du ciel, de la terre et des enfers.
Parmi les divinités du ciel, les plus importantes étaient les deux groupes formés par Jupiter ou Diespiter et Juno, Janus et Diana. Les divinités de la terre étaient de beaucoup les plus nombreuses, car elles comprenaient non seulement les dieux et les déesses qui peuplaient les forêts, les montagnes, les champs, qui présidaient à la vie pastorale et à la vie agricole, mais encore tous ceux et toutes celles qui protégeaient l’individu, la famille, l’État, sous l’invocation desquels s’accomplissaient tous les actes de la vie individuelle, de la vie domestique, de la vie sociale. Parmi ces divinités proprement terrestres, nous citerons : Saturne et Ops, Cérès, Liber et Libera, Faunus et Fauna, Silvanus, les génies, les dieux et les déesses des Indigitamenta, les Lares, les Pénates, Vesta, Vénus, Mercure, Mars, Quirinus, Bellone, etc.
Enfin, parmi les divinités des enfers, figuraient non seulement les divinités du monde souterrain proprement dit et de la mort, Dis Pater, les Lémures, les Mânes, etc., mais aussi les dieux et les déesses des eaux, Neptune, les Nymphes, le dieu Fontus, la déesse Juturna. Tel fut, semble-t-il, le fonds primitif de la religion romaine. De toutes ces divinités, nous ne connaissons guère que les noms ; de bonne heure, elles furent presque toutes assimilées à des divinités grecques ; leurs attributions primitives furent effacées ou oubliées. Il n’en serait resté aucune trace, si l’esprit obstinément conservateur de la théologie et du culte romain n’était demeuré fidèle malgré l’invasion des mythologies de la Grèce et de l’Orient, aux rites les plus anciens, aux pratiques vénérables des ancêtres.
A Rome, le culte privé était essentiellement un culte familial, domestique. Le chef de la famille, le père, en était le prêtre. Les cérémonies du culte se célébraient dans l’intérieur de la maison, près du foyer, sur un autel de forme ronde ou carrée ; les dieux, auxquels ce culte s’adressaient, étaient les génies de la famille, les Lares ou les Pénates, sans oublier les Mânes, esprits des morts, à qui l’on apportait des offrandes le jour anniversaire de leur mort. Chaque jour on leur consacrait les prémices du repas. Les jours de four, on leur offrait des gâteaux et du miel ; on les couronnait de guirlandes et de fleurs ; on brûlait devant eux de l’encens et des parfums. Dans ce culte, la flamme même du foyer domestique jouait un rôle capital ; elle ne devait jamais s’éteindre. Aucun des actes les plus graves de la vie individuelle et de la vie sociale ne pouvait s’accomplir sans que le culte domestique y intervint : naissances, mariages, décès donnaient lieu à des cérémonies, à des actes religieux d’une grande importance.
Entre le culte domestique et les cultes publics de l’État, la société romaine connaissait une forme intermédiaire de culte : le culte gentilice et le culte des sodalités. Le culte gentilice était le culte rendu par plusieurs familles, issues d’un même ancêtre, à cet ancêtre commun considéré comme le dieu de la gens ; les gentes les plus illustres de Rome faisaient parfois remonter leur origine à un dieu. Sur le modèle des cultes gentilices se créèrent de très nombreux cultes rendus à une divinité par un groupe de fidèles associés : ces groupes s’appelaient des collèges ou des sodalités ; ils se multiplièrent surtout à la fin de la République et sous l’Empire ; la plupart d’entre eux se préoccupaient en outre d’assurer à tous leurs membres une sépulture convenable.
Le clergé
- Un rex sacrorum
- 15 flamines :
- 3 flamines majeurs (Flamen Dialis (= de Jupiter), de Mars, de Quirinus)
- 12 mineurs : Volcanus, Volturnus, Portunus, Palatua, Carmenta, Flora, Pomona, Furrina, Falacer.
- Tous étaient placés sous la dépendance du grand pontife, Pontifex maximus, véritable chef de la religion romaine : c’est pourquoi les Empereurs prirent tous ce titre.
- 5 Pontifes (dont le Pontifex Maximus)
- 6 Vestales (dont une Grande Vestale)
- Tresuiri (puis septemuiri) epulones
- Quindecimuiri sacris faciundis
- Augures ; Haruspices, deux collèges chargés de la divination.
- Les premiers procédaient en observant le vol des oiseaux,
- les seconds, d’origine étrusque, d’après les entrailles des animaux sacrifiés
- Collèges et sodalités : Luperques du Palatin ; Arvales ; Saliens du Palatin et du Quirinal ; 20 Fétiales.
Influences étrangères
La première influence qui s’exerça sur la religion des Romains fut l’influence étrusque. Il semble que le culte de la Triade Capitoline, Jupiter, Junon et Minerve, fut importé à Rome par les Étrusques ; c’est aux rois étrusques, aux Tarquins (Tarquin l’Ancien, Tarquin le Superbe), que la tradition romaine attribuait sans hésitation la construction du Capitole. En même temps que leurs dieux et leurs rites, les Étrusques introduisirent à Rome les premiers éléments de mythologie grecque qui y pénétrèrent. La légende de la Sibylle de Cumes apportant à Tarquin le Superbe les Livres sibyllins est tout à fait significative (Divination, Oracle).
Sous la République, les divinités grecques envahirent progressivement la religion romaine.
La plupart des divinités grecques furent désignées sous les noms des divinités romaines qui passaient pour leur ressembler le plus si Apollon garda son nom grec, Artémis fut appelée Diane, Arès devint Mars, Déméter fut appelée Cérès, Hermès prit le nom de Mercure, Aphrodite fut déguisée en Vénus, Hephaïstos fut adoré sous le vocable de Vulcain. Les mythes grecs furent transportés à Rome : désormais Diane, Mars, Cérès, Mercure, Vénus, Vulcain eurent leurs mythes et leurs légendes qui n’étaient autres que les mythes et les légendes conçues par l’imagination des Grecs pour Artémis, Arès, Déméter, Hermès, Aphrodite, Hephaïstos. De même Jupiter se confondit avec Zeus, Junon avec Héra, Minerve avec Pallas-Athéna.
Après la Grèce, ce fut le tour de l’Orient.
- Dès l’année 204 av. J.-C., la déesse de Pessinonte, Cybèle ou la grande Mère des dieux, fut amenée en grande pompe de Phrygie à Rome, ou elle fit une entrée solennelle.
- En 186, les cérémonies secrètes du culte de Bacchus faisaient déjà de tels ravages dans la société romaine, que le Sénat romain crut devoir sévir et promulgua le fameux sénatus-consulte De Bacchanalibus. Mais ni la résistance des pouvoirs publics, ni les répressions ne purent empêcher les divinités et les cultes de l’Orient d’envahir Rome.
- Après Cybèle et Bacchus, vinrent les deux grandes divinités de l’Égypte ptolémaïque, Isis et Sérapis ;
- le dieu syrien Adonis ;
- la déesse de Cappadoce, Mà devenue Bellone ;
- sous l’Empire, plusieurs Baals de Syrie, le Baal d’Héliopolis, celui de Dolichè, devinrent des dieux populaires et furent désignés sous les noms de Jupiter optimus Maximus Heliopolitanus, Jupiter O. M. Dolichenus.
- Le culte du dieu persan Mithra se répandit en Italie et dans plusieurs provinces de l’empire ; Élagabal, puis Aurélien donnèrent une importance officielle au culte du Soleil.
Les dieux romains
A ses débuts, la mythologie romaine reposait essentiellement sur les mythes concernant l’histoire de Rome : histoire de Romulus et Rémus, d’Horatius Coclès, Mucius Scaevola et Clélie…
Plus tard, avec l’assimilation de la culture hellénique, la plupart des divinités locales – d’un caractère abstrait – furent oubliées, ou bien se sont confondues aux Dieux grecs dont le caractère anthropomorphique différa des précédents. Ces derniers évoquent en effet bien davantage l’homme et ses actions que les anciennes divinités romaines.
- De fait, les romains se sont appropriés la mythologie grecque et le panthéon des divinités romaines est essentiellement occupé de Dieux de la Grèce antique. Néanmoins, quelques Dieux « locaux » ont relativement subsisté, tel que Janus, un roi latin qui aurait accueillit Saturne sur Terre, et est devenu le Dieu des ouvertures et protecteur des portes de Rome. Quant à lui, Saturne fut assimilé à Cronos.
- Citons aussi Quirinus, le protecteur des agriculteurs. Avec Mars et Jupiter, ils formèrent la triade primitive de la mythologie romaine. Faunus, protecteur des troupeaux et Vesta sont aussi des dieux d’origine locale.
Divinités romaines
Les divinités des premiers Romains (numina) ont rapidement disparu en raison de leur caractère abstrait qui s’oppose à l’anthropomorphisme grec. Malgré l’influence hellénistique, plusieurs divinités locales ont subsisté, notamment dans le culte de Janus, de Saturne, de Quirinus et le culte privé de Vesta ou des dieux Lares.
Janus et Saturne
Janus est une des seules divinités des premiers Romains ayant subsisté. Profondément lié au mythe de l’âge d’or, Janus serait le roi latin ayant accueilli Saturne lors du règne de celui-ci sur terre. Après la modification du panthéon romain, Janus gardera une place moindre, celle de dieu des ouvertures et des portes et de protecteur de Rome en temps de guerre. Saturne, plus tard assimilé à Cronos (à ne pas confondre avec Chronos dieu du temps), est également honoré durant les Saturnales.
Quirinus
Dieu archaïque, Quirinus est originellement le protecteur des agriculteurs et, associé à Jupiter et Mars, fait partie de la triade primitive de la mythologie romaine. Il sera plus tard assimilé à Romulus divinisé.
Faunus
Protecteur des troupeaux contre les loups (d’où son second nom Lupercus), il sera honoré durant les Lupercales jusqu’en 496. On parlera ensuite de faunes, pluralité qui les associera aux satyres grecs et qui assimilera Faunus à Pan.
Culte du foyer
La plupart des divinités des premiers Romains liées au foyer demeurent dans le culte romain : les Romains vénèrent les Lares et les Pénates, ainsi que les ancêtres morts (mânes). Selon la légende, les Pénates originels proviendraient de Troie. C’est Énée qui, en s’enfuyant avec son père Anchise sur le dos et son fils Iule à la main, les aurait emportés. À Troie, ils avaient, semble-t-il, le même rôle que celui qui leur fut dévolu à Rome. Le culte public de Vesta, plus tard assimilé à Hestia, est également hérité des croyances anciennes (la mère de Romulus et Rémus est une vestale).
Mythes romains
Rome possède ses propres mythes, souvent liés à sa fondation et à son histoire. Elle assimilera ensuite les mythes grecs mais gardera ses mythes fondateurs au centre de sa culture.
Mythe de l’âge d’or
La période de l’âge d’or, également appelée « règne de Saturne » est la période durant laquelle Saturne, détrôné par son fils, fut accueilli en Italie par le roi Janus avec qui il partagea le pouvoir. Cette période fut marquée par une prospérité et une équité absolue: les hommes vivaient de cueillette sans avoir à travailler, ne connaissaient pas la guerre et vivaient en harmonie avec les dieux et la nature. Les cultes de Saturne et de Janus viennent de cette légende. Le mythe des races est quant à lui hérité de la culture grecque.
L’Énéide
Le mythe d’Énée fait partie des légendes de la fondation de Rome. Il décrit le voyage d’Énée depuis sa fuite de Troie jusqu’à son arrivée dans le Latium. Commandée par Auguste à Virgile, l’Énéide a surtout pour but de montrer le caractère divin de Rome et l’ascendance divine de la gens Julia (à laquelle appartient Auguste). La légende donne également à Rome une revanche sur la Grèce en montrant que Troie n’a pas été détruite mais qu’au contraire, les survivants ont fondé une cité puissante capable de l’anéantir. Cette perspective de propagande laisse penser que Virgile a remodelé la légende afin de satisfaire les demandes d’Auguste, mais l’épopée s’appuie d’abord sur la tradition qui donnait pour ancêtres au peuple romain Énée et les derniers Troyens.
Romulus et Rémus
Cette légende, probablement la plus célèbre de la mythologie romaine et narrée de nombreuses fois par les auteurs latins, est à l’origine des institutions romaines : le meurtre de Rémus par Romulus montre la prédominance de la patrie sur les liens du sang, l’enceinte (pomoerium) de Rome tracée par Romulus, demeurera sacrée (sauf pour les triomphes). La légende donne également une origine divine à Rome, Mars étant le père des jumeaux.
Les légendes de l’histoire de Rome
Les nombreuses légendes qui entourent l’histoire de Rome consolident de même les institutions romaines. Elles sont racontées aux jeunes romains et constituent la seule littérature enfantine de l’époque. Certaines vantent la virtus latine (vertu et courage), ce sont les exempla et d’autres expliquent la fondation de Rome, ce sont les mythes fondateurs. On peut citer parmi les plus célèbres celles de l’enlèvement des Sabines, de Tarpéia (peine de mort pour les traîtres), de Clélie, d’Horatius Coclès et de Mucius Scaevola, de Lucrèce (fin de la royauté à Rome) et celle du combat des Horaces et des Curiaces.
Petite liste des dieux romains
- Angita : déesse de la Guérison et de la Sorcellerie ;
- Aurore : déesse de l’aurore ;
- Bacchus : dieu de la vigne, de la fête (les Bacchanales) et de l’ivresse ;
- Bellone : déesse de la guerre ;
- Cerbère : protecteur de la porte des Enfers ;
- Cérès : déesse de l’agriculture et de la fertilité ;
- Cupidon : dieu de l’amour ;
- Cybèle : déesse de la Fécondité (divinité d’origine phrygienne) ;
- Diane : déesse de la chasse et de la Lune ;
- Discorde : déesse mère de tous les fléaux ;
- Esculape : dieu de la médecine ;
- Les Faunes : demi-dieux champêtres et forestiers, associés au culte de Dionysos ;
- Faunus : dieu des bergers d’Arcadie, divinité de la fécondité, puis incarnation de l’Univers ;
- Fama : déesse de la renommée et des ragots ;
- Iris : personnification de l’arc-en-ciel ;
- Janus : dieu des passages ;
- Junon : reine des dieux, protectrice des femmes mariées ;
- Jupiter : roi des dieux et dieu du ciel ;
- Juventas : déesse de la jeunesse ;
- Kerta : Déesse du chaos ;
- Latone : Mère d’Apollon et de Diane ;
- Libitina : déesse des funérailles ;
- Luna : déesse de la Lune, associée à Diane ;
- Lupercus : dieu des troupeaux ;
- Mars : dieu de la guerre, du combat ;
- Mater Matuta : déesse marine bienfaisante ;
- Mercure : messager des dieux ;
- Minerve : déesse des techniques, des combats justes et de la sagesse ;
- Neptune : dieu des mers et des océans ;
- Orcus : dieu ou messager de la Mort ;
- Pluton : dieu des Enfers ;
- Mutinus Mutunus ou Priape : dieu protecteur des vergers et des vignobles, personnification de la virilité ;
- Proserpine : reine des Enfers ;
- Quirinus : forme divinisée de Romulus ;
- Salus : déesse de la santé ;
- Saturne : dieu du temps ;
- Sol : ancien dieu soleil, équivalent d’Hélios ;
- Sylvain : dieu de la forêt dans la mythologie romaine ;
- Tellus : déesse personnifiant la Terre en formation. Elle est l’ancêtre maternel des dieux et de monstres ;
- Terra : déesse-mère, personnification de la Terre (équivalent grec Gaïa) ;
- Uranus : dieu-père, personnification du Ciel ;
- Vénus : déesse de la beauté et de l’amour ; Vénus Victrix sa déclinaison « victorieuse »
- Vesta : déesse du foyer ;
- Vulcain : dieu du feu et du fer, forgeron des dieux.
Le culte impérial
L’œuvre religieuse d’Auguste
Après la violence des guerres civiles, Octave, devenu Auguste se pose en restaurateur de la religion nationale – même si sa propre conception de la religion est plutôt tournée vers l’Apollinisme et le rite grec.
- il réunit en sa personne l’essentiel des sacerdoces : son nom d’Augustus, accordé par le Sénat en 27 av. J-C, fait référence aux Augures ; il se fait élire Pontifex Maximus après la mort de Lépide.
- Il restaure les anciens rites, tel celui du fécial, contre Antoine : un javelot dardé vers la terre adverse voue magiquement l’adversaire à la défaite ; il recourt également massivement à la divination (auspices, haruspicine, interprétation des prodiges).
- Il restaure les flamines, notamment celui de Jupiter qui depuis 75 ans n’avait plus de titulaire ; il redonne vie aux vieilles sodalités (Féciaux, Saliens, Arvales), et aux rites anciens (rites de Janus, culte des Castores…)
- Il rebâtit 82 temples au total.
- Il redonne un caractère sacré (et funéraire) aux combats de gladiateurs, en l’honneur d’Agrippa ou de Drusus.
- Enfin, il donne la préférence aux cultes italiens sur les cultes orientaux : en 28, il interdit toute chapelle privée à Isis et Osiris dans le Pomoerium ; et s’il rebâtit le temple de Cybèle, la plus ancienne des déesses orientales, il l’associe étroitement à sa propre famille : Livie, son épouse, sera associée à Cybèle, comme à Junon.
La naissance du culte impérial
La restauration religieuse d’Auguste va de pair avec d’audacieuses innovations, qui conduiront à l’instauration d’un véritable culte impérial.
Dès 44, Octave utilise l’apparition d’une comète durant les jeux qu’il célébrait en l’honneur de César assassiné, pour héroïser celui-ci ; devenu lui-même Julius par l’adoption de César, il se présente comme « fils d’un homme divinisé », Diui filius ; c’est le premier pas vers sa propre divinisation. En 29, il consacre sur le forum un temple à César, à l’emplacement de son bûcher funéraire.
Auguste s’appuie sur les cultes de Mars Ultor (vengeur) et Venus Genetrix, déjà mis en avant par César, afin d’unir dans l’opinion la tradition latine de Romulus, et la tradition grecque d’Énée. On l’a vu dans l’Énéide : Énée, ancêtre des Romains en général et de la gens Iulia en particulier, est fils de Vénus, et dès 46, César avait développé le culte de Vénus, associé à sa famille. Quant au culte de Mars, il sera consacré à la célébration des triomphes militaires de Rome – au point de remplacer le Capitole dans les triomphes !
Dès qu’il fut nommé Grand Pontife, Auguste, au lieu d’occuper la demeure de sa charge, près de la Regia au forum, décréta que sa propre maison, sur le Palatin, devenait le siège officiel du pontificat : ainsi, la fonction et la personne étaient intimement liées, et de surcroît, le Palatin étant la colline originelle où Romulus avait fondé Rome, Auguste apparaissait comme un « nouveau Romulus », un refondateur. Cette innovation fut apparemment acceptée sans résistance.
Alors qu’en Égypte, Antoine et Cléopâtre se faisaient passer pour des dieux vivants dans la tradition orientale, à Rome Octave se présentait sous les traits du Sauveur bienfaisant, sous la protection astrale de Vénus. A cela s’ajoute la mystique du commandement consacré, l’imperium : dès 27, Auguste se fait proclamer imperator à perpétuité, un titre devenu héréditaire. En somme, il attache à sa personne les deux pouvoirs les plus sacrés de Rome :
- le pouvoir militaire, l’imperium
- Le pouvoir religieux (il détient tous les sacerdoces).
Et l’ensemble de ces pouvoirs devient héréditaire.
Il restait à rendre sa personne elle-même sacrée : l’antique religion romaine le permettait. Parmi les cultes domestiques figurait celui du Genius, le « génie » du paterfamilias. En outre les Romains honoraient deux sortes de Lares : les Lares du foyer, et ceux, publics, des carrefours ; les uns et les autres sont déclarés « augusti », et aux Lares publics on adjoint le Genius Caesaris, le Génie de l’empereur vivant… Le jour de son anniversaire, il sacrifiait à son propre Génie, tandis que les Chevaliers célébraient cette fête en corps ! Maintes familles, en outre, intégraient le Genius Caesaris dans leur culte domestique. Ainsi, l’empereur était célébré partout, en Italie d’abord, puis dans l’ensemble des provinces.
L’homme n’était pas encore tout à fait divinisé ; mais l’idée grecque d’immortalisation par les vertus progressait ; en 19, l’autel de Fortuna Redux (la Fortune du Retour, ainsi nommée pour corriger les trop nombreuses absences d’Auguste, dues à sa santé) fut érigé en face du temple de Virtus et Honos. En 13 fut voué (et en 9 consacré) l’Ara Pacis Augustae.
La dernière étape fut franchie quand on se mit, insensiblement, à considérer Auguste lui-même comme un dieu, et à vouer un culte au Numen Augusti.
Auguste s’arrêta à cette limite : il refusa un temple à son nom dans Rome. Il en accepta dans les provinces, à condition que son culte soit associé à celui de Rome.
C’est pour Auguste que s’inaugura le rituel du « passage à la divinité » (Apotheosis) : du bûcher funéraire, consacré par la procession circulaire des prêtres, on fit s’envoler un aigle, censé emporter l’âme du prince. Dès le 5ème siècle av. J-C, les Grecs avaient admis la transformation des âmes en étoiles ; le peuple était persuadé que la comète de 44 était César lui-même devenu diuus… et tandis que Livie avait fait construire pour le corps de son époux, sur le champ de Mars, un gigantesque tombeau en forme de rotonde (à la mode étrusque), un temple s’élevait à l’intérieur du Pomoerium, au pied du Palatin. Auguste est donc à la fois un dieu céleste, et un mort héroïsé. La même dualité persistera, notamment pour Hadrien (voir son tombeau, l’actuel Château Saint-Ange). Auguste eut son flamine, son culte, son collège religieux, les Sodales Augustales.
Les successeurs d’Auguste.
Des dix empereurs qui suivirent, seuls trois furent officiellement divinisés : Claude, Vespasien et Titus.
Une sorte de tradition administrative se créait : les bons empereurs étaient divinisés, les autres étaient condamnés (damnatio memoriae). A partir de Nerva et jusqu’à la fin du 1er siècle, l’apothéose de l’empereur fut de règle, s’étendant parfois jusqu’à l’impératrice, voire à tout le groupe familial : ce furent le cas de Trajan et d’Hadrien.
Mais cela multiplia les Diui, au point de banaliser l’apothéose : dans l’Apocoloquintose, on voit Sénèque se moquer de l’apothéose de Claude.
Du coup, on tendit à transférer le caractère sacré de l’empereur, du mort au vivant. Ainsi, Néron se présente comme Apollon, Commode comme un « Hercule romain » ; Vespasien passe pour avoir le don des miracles ; Marc-Aurèle est déclaré spontanément « dieu propice » et prophétique… Un culte populaire s’instaure, qui traite l’empereur en dieu vivant. Beaucoup plus tard, Héliogabale se présentera comme un « dieu-soleil ».
L’Ara Pacis Augustae
Voir le dossier de Musagora sur Auguste et l’Ara Pacis
La maison carrée de Nîmes
Ce petit temple romain hexastyle, édifié au début du 1er siècle, l’un des temples les plus célèbres et les mieux conservés du monde romain, surélevé sur son haut podium, dominait le forum, centre administratif et cœur économique de la ville antique. Un portique, dont on peut encore observer la base des colonnes sur la place attenante, entourait la Maison Carrée et s’étendait bien au-delà vers le nord, figurant ainsi l’emplacement du forum nîmois.
Lors de sa construction, la Maison Carrée est dédiée par Auguste à la gloire de ses deux petits-fils : les consuls et chefs militaires Lucius Caesar et Caius Julius Caesar. Au fil des siècles, le temple est notamment devenu une maison consulaire, une église puis un musée des arts antiques. Il s’agit aujourd’hui d’un des temples romains les mieux conservés au monde.
Son architecture est inspirée de celle du temple d’Apollon à Rome, comme en témoignent ses proportions (26,42 mètres de longueur, 13,54 de largeur, 17 de hauteur) et l’influence grecque antique manifeste. Ses colonnes sont sculptées, ses chapiteaux sont ornés de feuilles d’acanthe (chapiteaux corinthiens), et d’une corniche agrémentée d’une frise très ornementée sur trois des côtés, le temple portait sur son frontispice, inscrite en lettres de bronze scellées dans la pierre, une dédicace expliquant le rôle de l’édifice. Cette dédicace est aujourd’hui disparue, mais grâce à la disposition des trous de scellement encore visibles, le grand érudit nîmois Jean-François Séguier est parvenu en 1758 à recomposer le texte original : « À Caius Cesar consul et Lucius Caesar consul désigné, fils d’Auguste, princes de la jeunesse. ».
Les religions orientales à Rome