Le roman au 18ème siècle

Table des matières

  1. 1700-1715
  2. 1715-1750
    1. Marivaux (1688-1763)
    2. L’Abbé Prévost (1697-1763)
    3. Un cas à part : les Lettres Persanes
    4. Les romans libertins
      1. Crébillon
      2. Duclos
  3. 1750-1789
  4. 1789-1799
  5. Bibliographie

Le roman est le genre littéraire qui se développe le plus au XVIIIème siècle : le plus souvent en prose, multiforme, il se prête particulièrement à l’expression des idées des Lumières, tout comme à la naissance d’une nouvelle sensibilité.
En outre, le lectorat se développe : la bourgeoisie s’enrichit, et augmente d’autant le nombre de ceux qui peuvent accéder au livre ; celui-ci, parallèlement, devient un peu moins cher. La lecture commence à pénétrer dans les campagnes, grâce à la « bibliothèque bleue » diffusée par les colporteurs, et qui comprend également des romans. Enfin, les femmes, très influentes dans les Salons, contribuent au succès du roman.

1700-1715

La fin du règne de Louis XIV voit le succès du roman historique et galant, avec Hamilton, Mémoires de la vie du comte de Gramont (1713), dans la lignée de la Princesse de Clèves. Les contes de fée continuent de connaître un succès foudroyant, après Perrault et Mme d’Aulnoye ; les voyages utopiques, inspirés par Swift (Gulliver) et Cyrano de Bergerac plaisent encore.
Deux romancier – dont la carrière se poursuit bien après 1715, dominent la scène : Challes et Lesage. Challe, Les Illustres Françaises (1713): sept histoires, racontées par 4 narrateurs, sont présentées comme véritables. Elles appartiennent à la tradition des nouvelles psychologiques mises à l’honneur par Mme de Lafayette. Lesage publie sa première édition du Diable Boiteux en 1707 (d’autres versions suivront, en 1726 et 1747). C’est un roman picaresque, racontant les tribulations d’un étudiant, Cléofas, sur les toits de Madrid.

1715-1750

Le XVIIIème siècle commence vraiment, pour les historiens, à la mort de Louis XIV, avec la Régence, dont la liberté d’esprit contraste avec la pesanteur du règne précédent. Mais cette parenthèse se referme vite, tandis que s’effondre le système de Law, causant une catastrophe financière, et que les guerres reprennent de plus belle. Néanmoins, les débuts du règne de Louis XV sont relativement prospères.

C’est la grande vogue du roman-mémoires, dont les fleurons sont l’Abbé Prévost et Marivaux, mais qui dominent une vaste production. C’est aussi la période où émergent des romancières, comme Mme de Tencin.

Marivaux (1688-1763)

Outre une très importante œuvre théâtrale qui ne nous concerne pas ici, Marivaux est l’auteur de deux romans à lire absolument, mais qui sont restés inachevés :

  • La Vie de Marianne (1731-1741)
  • Le Paysan parvenu (1735)

L’Abbé Prévost (1697-1763)

  • Mémoire et Aventures d’un homme de qualité (1728-1731)
  • Manon Lescaut (1731)
  • Le Philosophe anglais ou l’histoire de M. Cleveland (1731-1739), roman multiple et complexe.
  • Histoire d’une Grecque moderne (1740)

Un cas à part : les Lettres Persanes

Parues en 1721, les Lettres Persanes de Montesquieu connurent un succès immédiat. Jean Starobinski en propose une analyse pertinente dans Le Remède dans le mal. Il s’agit d’un roman multiple, polyphonique, où s’entremêle le « roman du Sérail » et la critique de la société occidentale (avec une commune réflexion sur le pouvoir), où chaque protagoniste possède son propre ton ; toutes sortes de genres y sont représentés : nouvelles, contes philosophiques (les Troglodytes)…

Les romans libertins

Crébillon

  • Les Égarements du cœur et de l’esprit (1736-38) constituent son chef d’œuvre.

Duclos

Cet auteur, étiqueté « libertin » connut un succès immense avec ses deux romans.

  • Histoire de Mme de Luz (1740)
  • Confessions du comte de *** (1741) : autobiographie fictive d’un libertin, qui promène son lecteur dans toute l’Europe.

1750-1789

En 1750 paraît le prospectus de l’Encyclopédie ; cette énorme entreprise va influencer toute la fin du siècle, et les combats des Lumières, qui avaient commencé dès la fin du siècle précédent, vont désormais occuper une place prépondérante.

La Guerre de Sept ans (1756-1763) secoue toute l’Europe ; malgré cela, la population européenne augmente ;
Si les Lumières semblent aujourd’hui si triomphantes, elles n’avaient pas à l’époque partie gagnée ; l’obscurantisme et la superstition continuaient d’exister (voir le « massacre des chats » en 1752), la censure, royale ou ecclésiastique, sévissait toujours. Cependant, les
écrivains avaient acquis une grande importance aux yeux de l’opinion publique : Paul Bénichou a pu parler, à cette époque, de « Sacre de l’écrivain ».

  • Les Contes de Voltaire sont-ils vraiment des romans ? Quoi qu’il en soit, ils appartiennent à cette littérature de fiction, qui va souvent de pair avec une intention militante. Candide date de 1759 et l’Ingénu de 1767.
  • Rousseau, La Nouvelle Héloïse (1762) : ce roman épistolaire marque un tournant dans le siècle, vers une sensibilité pré-romantique (déjà existante, cependant, chez Prévost).
  • Diderot avait commencé sa carrière de romancier avec les Bijoux indiscrets en 1748 : conte philosophique ? roman libertin ? Il la poursuit avec la Religieuse en 1760 ; il commence la rédaction du Neveu de Rameau probablement en 1760.
  • Bernardin de Saint-Pierre, héritier spirituel de Rousseau, publie Paul et Virginie en 1788, et remporte un immense succès.
  • Choderlos de Laclos publie les Liaisons dangereuses en 1782 : roman libertin, roman sensible, roman de la passion…
  • Cazotte, quant à lui, initie le récit fantastique, avec Le Diable amoureux (1772) ; il sera suivi par Beckford (Vathek, 1781-1782).
  • Vivant Denon, enfin, achève la période avec Point de lendemain, bref roman paru en 1777.

1789-1799

La période violemment troublée de la Révolution voit proliférer le roman – malgré le rétablissement rapide de la censure.

  • Le roman d’émigration apparaît ;
  • Le roman sentimental continue d’avoir du succès, et n’est pas seulement l’apanage des femmes ;
  • Le roman noir devient un genre populaire.
  • malgré le climat moralisant, et la dureté des temps (ou à cause de tout cela ?) le roman libertin continue de séduire.

Quelques grands écrivains émergent :

  • Louvet de Couvray, avec Les Amours du Chevalier de Faublas ;
  • Le Marquis de Sade, dont l’œuvre couvre toute la période et au-delà, et qui passera le plus clair de son temps en prison ;
  • Senancour, dont les premiers essais annoncent Oberman (1804).

Bibliographie

  • Didier Béatrice, Le Roman français au XVIIIème siècle, ellipses, 1998, 127 p.