Plutarque, « Vie de Cicéron »

“Buste de Cicéron, Trinity College, Dublin – Photo de Roger Torrenti, 2017”

“Buste de Cicéron, Trinity College, Dublin – Photo de Roger Torrenti, 2017”

Composition du texte

  • Paragraphes 1-9 : origine, noms, naissance et enfance de Cicéron, sa formation jusqu’à ses premiers succès d’orateur. On le voit suivre les étapes du cursus honorum.
  • Paragraphes 10-23 : le grand exploit de Cicéron : la lutte contre la conjuration de Catilina
  • Paragraphes 24-27 : traits de caractère et anecdotes ; l’art de se faire des ennemis.
  • Paragraphes 28-35 : lutte contre Clodius, exil et retour triomphal ; échec du Pro Milone.
  • Paragraphe 36 : un intermède heureux, le proconsulat en Cilicie.
  • Paragraphes 37-39 : dans la guerre civile, Cicéron choisit à contre-cœur le camp de Pompée ; après Pharsale, il refuse le commandement militaire, et se rallie plus ou moins à César. Incertitudes et atermoiements ; il continue à se faire des ennemis dans les deux camps.
  • Paragraphes 40-41 : retrait dans la sphère privée ; ennuis domestiques (divorce, remariage, mort de Tullia)
  • Paragraphe 42 : assassinat de César
  • Paragraphes 43-48 : conflit entre Antoine et César-Octave : Cicéron se fait manipuler par ce dernier. Second triumvirat, proscriptions. Cicéron est assassiné.
  • 49 : épilogue
  • 50-54 : comparaison entre Démosthène et Cicéron.

Les débuts de Cicéron : le Pro Roscio

[1] Κικέρωνος δὲ τὴν μὲν μητέρα λέγουσιν Ἑλβίαν καὶ γεγονέναι καλῶς καὶ βεβιωκέναι, περὶ δὲ τοῦ πατρὸς οὐδὲν ἦν πυθέσθαι μέτριον. Οἱ μὲν γὰρ ἐν γναφείῳ τινὶ καὶ γενέσθαι καὶ τραφῆναι τὸν ἄνδρα λέγουσιν, οἱ δ´ εἰς Τύλλον Ἄττιον ἀνάγουσι τὴν ἀρχὴν τοῦ γένους, βασιλεύσαντα λαμπρῶς ἐν Οὐολούσκοις καὶ πολεμήσαντα Ῥωμαίοις οὐκ ἀδυνάτως. Ὁ μέντοι πρῶτος ἐκ τοῦ γένους Κικέρων ἐπονομασθεὶς ἄξιος λόγου δοκεῖ γενέσθαι· διὸ τὴν ἐπίκλησιν οὐκ ἀπέρριψαν οἱ μετ´ αὐτόν, ἀλλ´ ἠσπάσαντο, καίπερ ὑπὸ πολλῶν χλευαζομένην. Κίκερ γὰρ οἱ Λατῖνοι τὸν ἐρέβινθον καλοῦσι, κἀκεῖνος ἐν τῷ πέρατι τῆς ῥινὸς διαστολὴν ὡς ἔοικεν ἀμβλεῖαν εἶχεν ὥσπερ ἐρεβίνθου διαφυήν, ἀφ´ ἧς ἐκτήσατο τὴν ἐπωνυμίαν. Αὐτός γε μὴν Κικέρων, ὑπὲρ οὗ τάδε γέγραπται, τῶν φίλων αὐτὸν οἰομένων δεῖν, ὅτε πρῶτον ἀρχὴν μετῄει καὶ πολιτείας ἥπτετο, φυγεῖν τοὔνομα καὶ μεταθέσθαι, λέγεται νεανιευσάμενος εἰπεῖν, ὡς ἀγωνιεῖται τὸν Κικέρωνα τῶν Σκαύρων καὶ τῶν Κάτλων ἐνδοξότερον ἀποδεῖξαι. Ταμιεύων δ´ ἐν Σικελίᾳ καὶ τοῖς θεοῖς ἀνάθημα ποιούμενος ἀργυροῦν, τὰ μὲν πρῶτα δύο τῶν ὀνομάτων ἐπέγραψε, τόν τε Μᾶρκον καὶ τὸν Τύλλιον, ἀντὶ δὲ τοῦ τρίτου σκώπτων ἐρέβινθον ἐκέλευσε παρὰ τὰ γράμματα τὸν τεχνίτην ἐντορεῦσαι. Ταῦτα μὲν οὖν περὶ τοῦ ὀνόματος ἱστόρηται. […]

[3] Ἀπαλλαγεὶς δὲ τῶν ἐν παισὶ διατριβῶν, Φίλωνος ἤκουσε τοῦ ἐξ Ἀκαδημείας, ὃν μάλιστα Ῥωμαῖοι τῶν Κλειτομάχου συνήθων καὶ διὰ τὸν λόγον ἐθαύμασαν καὶ διὰ τὸν τρόπον ἠγάπησαν. Ἅμα δὲ τοῖς περὶ Μούκιον ἀνδράσι πολιτικοῖς καὶ πρωτεύουσι τῆς βουλῆς συνών, εἰς ἐμπειρίαν τῶν νόμων ὠφελεῖτο, καί τινα χρόνον καὶ στρατείας μετέσχεν ὑπὸ Σύλλᾳ περὶ τὸν Μαρσικὸν πόλεμον. Εἶθ´ ὁρῶν εἰς στάσιν, ἐκ δὲ τῆς στάσεως εἰς ἄκρατον ἐμπίπτοντα τὰ πράγματα μοναρχίαν, ἐπὶ τὸν σχολαστὴν καὶ θεωρητικὸν ἀνελθὼν βίον Ἕλλησί τε συνῆν φιλολόγοις καὶ προσεῖχε τοῖς μαθήμασιν, ἄχρι οὗ Σύλλας ἐκράτησε καὶ κατάστασίν τινα λαμβάνειν ἔδοξεν ἡ πόλις. Ἐν δὲ τῷ χρόνῳ τούτῳ Χρυσόγονος ἀπελεύθερος Σύλλα προσαγγείλας τινὸς οὐσίαν, ὡς ἐκ προγραφῆς ἀναιρεθέντος, αὐτὸς ἐωνήσατο δισχιλίων δραχμῶν. Ἐπεὶ δὲ Ῥώσκιος ὁ υἱὸς καὶ κληρονόμος τοῦ τεθνηκότος ἠγανάκτει καὶ τὴν οὐσίαν ἐπεδείκνυε πεντήκοντα καὶ διακοσίων ταλάντων ἀξίαν οὖσαν, ὅ τε Σύλλας ἐλεγχόμενος ἐχαλέπαινε καὶ δίκην πατροκτονίας ἐπῆγε τῷ Ῥωσκίῳ, τοῦ Χρυσογόνου κατασκευάσαντος, Ἐβοήθει δ´ οὐδείς, ἀλλ´ ἀπετρέποντο, τοῦ Σύλλα τὴν χαλεπότητα δεδοικότες, οὕτω δὴ δι´ ἐρημίαν τοῦ μειρακίου τῷ Κικέρωνι προσφυγόντος οἱ φίλοι συμπαρώρμων, ὡς οὐκ ἂν αὐτῷ λαμπροτέραν αὖθις ἀρχὴν πρὸς δόξαν ἑτέραν οὐδὲ καλλίω γενησομένην. Ἀναδεξάμενος οὖν τὴν συνηγορίαν καὶ κατορθώσας ἐθαυμάσθη, δεδιὼς δὲ τὸν Σύλλαν ἀπεδήμησεν εἰς τὴν Ἑλλάδα, διασπείρας λόγον ὡς τοῦ σώματος αὐτῷ θεραπείας δεομένου. Καὶ γὰρ ἦν ὄντως τὴν ἕξιν ἰσχνὸς καὶ ἄσαρκος, ἀρρωστίᾳ τοῦ στομάχου μικρὰ καὶ γλίσχρα μόλις ὀψὲ τῆς ὥρας προσφερόμενος· ἡ δὲ φωνὴ πολλὴ μὲν καὶ ἀγαθή, σκληρὰ δὲ καὶ ἄπλαστος, ὑπὸ δὲ τοῦ λόγου σφοδρότητα καὶ πάθος ἔχοντος ἀεὶ διὰ τῶν ἄνω τόνων ἐλαυνομένη, φόβον παρεῖχεν ὑπὲρ τοῦ σώματος.

On dit que la mère de Cicéron, Helvia, était née et avait vécu honorablement ; mais au sujet de son père, il n’y avait aucune information mesurée. En effet, les uns prétendent qu’il est né et a été nourri dans un atelier de foulon, les autres font remonter à Tullus Attius l’origine de sa race, qui régna glorieusement sur les Volsques et combattit vaillamment les Romains. Assurément le premier de sa lignée qui fut surnommé Cicéron semble avoir été digne qu’on en parle ; c’est pourquoi ses descendants ne rejetèrent pas cette appellation, mais la chérirent, bien qu’elle fût l’objet de bien des moqueries. En effet les latins appellent « cicer » le pois chiche, et cet homme avait au bout du nez, semble-t-il, une petite fente comme le sillon d’un pois chiche, d’où il acquit ce surnom. Quant au Cicéron lui-même, sur lequel ce livre est écrit, alors que ses amis pensaient qu’il devrait, lorsqu’il briguerait une magistrature et toucherait à la politique, fuir ce surnom et le changer, il répliqua, dit-on, avec fougue qu’il lutterait pour rendre Cicéron plus illustre que les « boiteux » (Scaurus) et les « Petits chiens » (Catulus). Et tandis qu’il était questeur en Sicile, offrant un ex-voto d’argent aux dieux, il fit inscrire ses deux premiers noms, Marcus et Tullius, mais pour le troisième, par dérision, il ordonna à l’artiste de graver un pois chiche à côté des lettres. Voilà donc ce que l’on raconte au sujet de son nom. […]

[3] Sorti des occupations de l’enfance, il écouta Philon l’académicien, que les Romains, parmi les disciples de Clitomaque, admiraient le plus pour son éloquence et appréciaient pour son caractère. Fréquentant en même temps les hommes politiques de l’entourage de Mucius, et ceux qui occupaient le premier rang à l’assemblée, il en usa pour parfaire sa connaissance des lois, et il participa quelques temps à l’armée sous Sylla dans la guerre contre les Marses. Ensuite, voyant les affaires publiques tomber dans la guerre civile, et de la guerre civile dans une monarchie sans limite, se tournant vers une vie studieuse et contemplative, il fréquentait les philosophes grecs et étudiait les sciences, jusqu’à ce que Sylla eût le pouvoir et que la cité parût recouvrer quelque stabilité.Durant cette période, Chrysogonos, un affranchi de Sylla, ayant fait mettre en vente la propriété d’un homme tué à la suite des proscriptions, l’acheta lui-même pour deux mille drachmes (environ 100 000 €). Mais lorsque Roscius, le fils et l’héritier du mort s’indigna et démontra que la propriété valait 250 talents (75 millions € !), Sylla furieux d’être confondu, intenta à Roscius un procès en parricide, à l’instigation de Chrysogonos. Personne ne lui venait en aide, mais tous se détournaient, craignant l’hostilité de Sylla ; dans son abandon, le jeune homme ayant trouvé refuge auprès de Cicéron, ses amis le poussaient également, lui disant qu’il n’aurait pas à nouveau un commencement plus éclatant ni plus glorieux de sa gloire. S’étant donc chargé de sa défense et ayant gagné le procès, il fut admiré, mais craignant Sylla, il partit en Grèce, ayant fait courir le bruit qu’il devait se soigner. Et de fait il était réellement maigre et sec de constitution, ne supportant qu’à grand peine, tard le soir, de petits repas légers, à cause de la déficience de son estomac ; sa voix, elle, était forte et belle, rude et sans souplesse, et sous l’effet d’un discours véhément et passionné, comme elle s’élevait toujours dans les tons les plus hauts, elle faisait craindre pour sa santé.

  • ἀσπάζομαι : accueillir avec bienveillance, chérir
  • χλευὰζω : railler, moquer
  • ὁ ἐρέβινθος, ου : le pois chiche
  • ἡ διαστολή, ῆς : dilatation (cf. le français « diastole »), élargissement, fente
  • ἀμβλύς,εῖα, ύ : émoussé, mou
  • ἡ διαφυή, ῆς : fente
  • μετῄει : imparfait de μέτειμι, rechercher, briguer

Le cursus honorum : une irrésistible ascension.

Homme nouveau (il est né à Arpinum, hors de Rome ; il possède une fortune relativement modeste (cf. § 7 p. 48) et n’appartient pas à l’ordre sénatorial), il doit faire ses preuves et grimper à la force du poignet. Il suit rigoureusement les étapes du cursus honorum :

Il est questeur en 75, c’est-à-dire à 31 ans, un peu après l’âge légal ; (p. 47) ; nommé en Sicile, il apprend à connaître le pays et ses habitants, ce qui lui sera bien utile contre Verrès, quelques années plus tard ;

Plutarque passe sur une probable charge d’édile ; l’on retrouve alors Cicéron, brillant avocat, qui fait condamner Verrès, pourtant soutenu par la noblesse (on est en 70).

Il est ensuite prêteur (§ 9)

Enfin, il sera élu consul fin 64, exerçant la charge en 63. Il a alors 43 ans. Ce sera l’apogée de sa carrière, avec la lutte contre la conjuration de Catilina et l’arrestation des complices de celui-ci. Il s’affirme alors comme le meilleur rempart de l’ordre sénatorial et des « optimates ».

La suite de sa carrière sera une longue suite d’échecs : exilé sur l’ordre de Clodius en 58, il rentre triomphalement en 57 ; mais il vit alors dans une semi-retraite, sans vrais appuis politiques. Il n’obtiendra son proconsulat en Cilicie qu’en 51. C’est le dernier moment heureux ; rentré à Rome en 49, il se rallie sans enthousiasme à Pompée, mais n’exerce plus de charge officielle.

La conjuration de Catilina

Sur les événements, voir ici.

Les sources dont nous disposons :

On remarquera que Plutarque suit ces deux sources, mais n’utilise aucune source favorable à Catilina ou aux « populares » (bien que Salluste leur soit moins hostile que Cicéron). Il faut donc relativiser le récit…

L’art du récit

  • Le travail de l’historien
  • Le goût pour les digressions (cf. § 13)
  • Les considérations morales

§ 24-36 : Lutte contre Clodius et ultimes réussites : le proconsulat de Cilicie.

  • Le triomphe de Cicéron, ou l’art de se faire des ennemis
  • Premiers conflits avec Clodius, patricien de la très grande famille des Claudii, mais qui a choisi le camp des Populares ;
  • L’exil de 58 et la faiblesse de Cicéron
  • Le retour triomphal ; l’assassinat de Clodius, le Pro Milone
  • Le proconsulat en Cilicie, dernière période heureuse pour Cicéron.

§ 37-41 : la guerre civile, jusqu’à l’assassinat de César.

Plutarque dit peu de choses des positions à la fois originales et intenables de Cicéron face à la guerre civile : il aurait en effet souhaité une « concordia ordinum » c’est-à-dire un accord des modérés des deux camps (Populares et Optimates) dans le but d’éliminer les extrémistes et de rétablir la paix civile – une position moralement acceptable, mais qui n’a jamais fonctionné dans l’histoire.

Le fameux passage du Rubicon, la marche sur Rome et la fuite éperdue des Sénatoriaux sont traités en deux lignes (p. 77), et l’on voit Cicéron hésiter longuement entre les deux camps.

On remarquera que la réflexion de Plutarque est ici moins politique que psychologique : c’est l’indécision de Cicéron plus que la difficulté de trancher entre les deux imperatores qui est soulignée.

Ce trait de Plutarque s’affirme encore plus dans le passage presque comique qui décrit Cicéron dans le camp de Pompée : mécontent de tout, incapable de participer aux opérations, éternel râleur, Cicéron est un peu la caricature du « civil » égaré dans un camp militaire… Les anecdotes occupent la totalité du § 38, alors que la bataille de Pharsale (8 août 48), si décisive pour la République romaine, puisqu’elle voit le triomphe de César et la mort de Pompée, ainsi que l’écrasement définitif de son camp, ne mérite à ses yeux qu’une ligne – il est vrai qu’il a écrit ailleurs une « Vie de César ».

La suite est assez piteuse : Cicéron refuse le commandement de ce qui reste des troupes de Pompée, et rentre en Italie pour attendre le bon vouloir de César – trop intelligent pour humilier un homme qui jouit encore d’un prestige considérable ! (César qui par ailleurs tient à soigner son image de clémence…)

Le § 40 nous montre un Cicéron revenu à la vie civile et privée, préoccupé de ses affaires personnelles (il divorce, perd sa fille, divorce une seconde fois) et surtout en train d’écrire l’essentiel de son œuvre philosophique, dont Plutarque ne cite pas les titres : De Oratore (repris en 46), Brutus (critique littéraire), De Finibus, Tusculanes, De Senectute, De Amicitia, De Officiis… C’est une œuvre considérable, tant sur le plan littéraire, linguistique que philosophique.

§ 42-49 : de l’assassinat de César à celui de Cicéron.

Ces huit derniers paragraphes concentrent les événements les plus tragiques de la République romaine, puisqu’ils aboutissent à l’instauration d’un nouveau régime.

L’assassinat de César

La correspondance de Cicéron montre la déception éprouvée par celui-ci face à l’incapacité de Brutus et de ses complices : ils ont été totalement inaptes à utiliser la situation politique qu’ils avaient eux-mêmes créée, et n’ont rien eu de plus pressé que de partir en exil ! Ils laissaient ainsi le champ libre à deux hommes, Antoine, puis le jeune Octave, qui se présentaient comme les héritiers de César.

On retrouve ici la ligne politique de Cicéron : p. 83 : recherche de la concorde à tout prix… avec toujours le même résultat : l’échec assuré.

Le § 43 montre le caractère influençable et presque naïf du personnage : il écoute « deux hommes de bien », Hirtius et Pansa, puis il se laisse convaincre par « des bruits merveilleux » ; et son incapacité à manier Antoine : dès la première minute de son retour il s’arrange pour l’indisposer ! (réception triomphale, refus de se rendre au Sénat…)

L’arrivée d’Octave

Cicéron s’empresse de prendre le parti du « jeune César », et Plutarque donne plusieurs explications :

  • un échange de bons procédés, Cicéron soutenant Octave de son prestige et de son éloquence, et Octave protégeant Cicéron ;
  • un songe prémonitoire, signe extrêmement important tant chez les Grecs que chez les Romains
  • la haine d’Antoine
  • l’ambition personnelle.

Mais en réalité Octave se sert de Cicéron, en particulier lorsqu’il se trouve en difficulté (cf. § 45).

Le second triumvirat

Cette trahison d’Octave, et cette alliance aussi contre-nature que précaire donne lieu à l’une des pires périodes de l’histoire romaine, avec le retour des proscriptions ; chacun en profite pour liquider ses ennemis personnels – or Cicéron, avec ses Philippiques, s’était attiré la haine irréconciliable d’Antoine… et Octave renonce à le protéger. Cicéron, dès lors, est condamné.

Les derniers paragraphes sont pathétiques : Cicéron apparaît essentiellement victime de son éternelle indécision, qui le fait s’embarquer, revenir à terre, repartir, et perdre un temps considérable.

Plutarque insiste surtout sur l’atmosphère de trahison généralisée, qui donne une image assez terrifiante de la République romaine finissante : Quintus est tué par une trahison de ses serviteurs ; Popillius, le tribun militaire, avait été défendu autrefois par Cicéron ; Philologus, qui livre Cicéron aux soudards, était un affranchi de Quintus, et avait été formé par Cicéron…

Conclusion

Plutarque effectue alors un saut dans le temps : après la punition de Philologus et le triomphe provisoire d’Antoine, Octave a pris le pouvoir ; en 28 il a instauré un nouveau régime, le Principat. Nous le retrouvons, longtemps après, devenu grand-père : il accorde alors à Cicéron une forme de revanche, reconnaissant sa valeur, et achevant de détruire celui qui reste le pire ennemi de Cicéron : Antoine.