Andocide, « Sur les Mystères » (399)

Composition du discours

Texte 1 : exorde, 1-10

Vocabulaire, grammaire

§ 1 :

  • ἡ Παρασκευή : préparation, préparatifs. Dans un procès, efforts des parties pour gagner ; d’où cabales, menées, intrigues.
  • σχεδόν τι : un peu, près, peut-être
  • χαρίζεσθαι : être agréable, accorder une faveur

  § 2

  • ἐνθυμηθῆναι < ἐνθυμέομαι-μοῦμαι : réfléchir, désirer, déduire. Il s’agit d’un infinitif employé absolument, avec un sens injonctif.
  • ἐγγυητάς < ἐγγυητής,οῦ : garant, caution
  • περιόψεσθαι< περιοράω-ῶ : regarder avec indifférence, laisser (faire)
  • Construction des infinitifs γνώσεσθαι et περιόψεσθαι : construction assez lâche avec πιστεύσας : μάλιστα μὲν… ἔπειτα δέ (= zeugma)

  § 3

  • εἰκότως : vraisemblablement, à bon droit
  • προκαταγιγνώσκειν : se prononcer d’avance contre quelqu’un ; condamner d’avance (à mort)

§ 4

  • οἰχησομαι : futur de οἴχομαι ; s’en aller
  • ἀποπλεύσας : s’éloigner par mer (ἀποπλέω, -πλεύσομαι, -έπλευσα)

§ 5

  • δέχομαι : recevoir, accepter, se résigner à
  • στέρομαι ( + gén.) : être privé de

§ 6

  • συντίθημι : réunir, combiner, machiner (è revoir la conjugaison de τίθημι)
  • διαβολή, ῆς : calomnie

§ 7

  • ἐνθυμητέον : adjectif verbal exprimant l’obligation
  • παραχρῆμα : sur-le-champ, à l’instant même
  • ἐξηλέγχθησαν < ἐξελέγχω : convaincre d’une faute
  • ἑάλωσαν : être pris (< ἁλίσκομαι, aoriste ἑάλων)

Commentaire

Un exorde tout fait, où l’on trouve beaucoup de généralités et peu d’éléments personnels (simple allusion à Chypre, où il s’est vu offrir un domaine par les rois de Kition et de Salamine, et aussi sa volonté de vivre à Athènes quoi qu’il arrive)

Une grande simplicité de langue (peu de vocabulaire rare ou technique)

Une argumentation serrée : antithèses (μὲν…. δέ, § 1 ; μὴ… ἀλλὰ, § 2 ;ὁπόσοι μὲν… ὁπόσοι δέ) ; examen des vraisemblances et usage d’un lieu commun : s’il est présent à son procès, s’il n’a pas fui, c’est qu’il n’a rien à redouter de la justice ; c’est donc qu’il est innocent.

Disqualification des adversaires, toujours désignés au pluriel, indifférenciés, et présentés comme des comploteurs, qui peuvent avoir pour eux les apparences, mais sont en réalité des menteurs.

Texte 2 : La parodie des Mystères (11-18)

Revoir cours sur les mystères d’Eleusis.

Vocabulaire, grammaire

§ 11

  • ἐξώρμει < ἐξορμέω-ῶ : mouiller au large
  • ἀναστας < ἀνίστημι : revoir la conjugaison
  • ἀρεῖσθαι : soulever, obtenir (infinitif futur moyen de αἴρω)
  • ἀποδείκνυμι : revoir la conjugaison
  • ἀμύητος : non initié
  • χρῆσθε : impératif de χράομαι-ῶμαι : user de

ἄδεια, ας : sécurité, amnistie, impunité. Terme de droit attique signifiant l’absence de responsabilité ; autorisation accordée à un citoyen condamné, privé de droit, ou à un non-citoyen (étranger ou esclave) d’intenter une action publique. Mais aussi garantie d’impunité. L’ ἄδεια préfigurait l’impunité accordée aux « repentis » de la Mafia pour dénoncer leurs complices. Voir lexique juridique grec.

§12

  • ἐξάρνου ὄντος : niant
  • ὁ πρυτάνις, εως : le prytane
  • μεθίστημι : déplacer, éloigner
  • τὸ μειράκιον, ου : jeune homme

§ 13

  • μηνύω : dénoncer
  • ἀπογράφω : inscrire sur un registre ; déposer plainte contre
  • κατέγνωτε < καταγίγνωσκω : condamner (voc. Judiciaire)

§ 14

  • Ὁ ζητητής, οῦ : l’enquêteur

§ 15

  • ὑπεξέρχομαι : partir secrètement (par-dessous) ; émigrer
  • ἡ περικοπή, ῆς : mutilation – Ἑρμῶν : des Hermès

§ 17

  • ἐγκεκαλυμμένον < ἐγκαλύπτω (καθεύδειν) : s’envelopper de couvertures pour dormir

  § 18

  • ἀδελφιδεός-οῦς, εοῦ-οῦ : neveu
  • θεῖος, ου : oncle

Realia

Les institutions athéniennes :

  • L’ecclésia ou assemblée générale
  • Les prytanes
  • La boulè

Le fonctionnement de la justice

  • «γραφή παρανόμων »
  • Le tribunal de l’Héliée (6 000 Athéniens)

L’expédition de Sicile

  • Nicias ( 470-413) : Homme politique et général athénien, très riche et très attaché à la démocratie. Religieux et modéré, il s’oppose à Cléon, et jouit d’une grande confiance. Nommé stratège en 425, il occupe Cythère en 424 et prend Mendé en 423. Après la mort de Cléon, il fait, en 421, ratifier un traité entre Athènes et Sparte, qui devait durer 30 ans, appelé paix de Nicias. Il s’oppose fermement à Alcibiade lorsque celui-ci fait accepter le principe de l’expédition de Sicile. Quand Alcibiade s’enfuit dans le Péloponnèse après le scandale de la mutilation des Hermès, il reste seul chef de l’expédition.
  • Lamachos : général athénien participant à l’expédition de Sicile ; il meurt dans les combats. Caricaturé dans les Acharniens d’Aristophane.
  • Alcibiade

Commentaire

L’extraordinaire multiplication des dénonciations, qui se succèdent, mettant en cause à chaque fois des gens différents : la parodie des mystères n’est pas simplement une plaisanterie de potaches, due à des jeunes gens aussi ivres qu’inconscients ; c’est une conjuration de grande ampleur, qui frappe le cœur religieux d’Athènes. Effet de dramatisation dû à l’accumulation (il y en eut une autre, puis une autre…), retraçant le climat délétère qui règne dans la cité : délation – pour des motifs souvent douteux : un certain « Teucros », sans doute pour de l’argent ; une femme, peut-être une maîtresse trahie… et terreur. Chaque dénonciation se traduit par des condamnations à mort.

La minutie d’Andocide, qui cherche moins à émouvoir qu’à établir des faits : documents lus par le greffier, témoignages… Le tout pour démontrer une seule chose : son père a été solennellement blanchi de toute accusation dans l’affaire des Mystères, devant l’Héliée au grand complet. Et lui-même n’a jamais été mis en cause.

Pour nous, témoignage émouvant : c’est un vrai procès qui se déroule sous nos yeux. Intervention du greffier, des témoins, interpellation des juges, discours direct… et un procès d’autant plus dramatique qu’Andocide y risque sa vie.

Texte 3 : 19-24 : Andocide accusateur de son propre père ?

Vocabulaire, grammaire

§ 19

  • ἐξελέγχειν : accuser, convaincre d’une faute
  • ἐλεξαν < λέγω, λέξω, ἔλεξα : énumérer, détailler (ou dire ; mais cet aoriste est inusité en attique.)
  • γόνυ, γόνατος : le genou. Voir déclinaison in Grammaire Allard et Feuillâtre, p. 29.

§ 21

  • ἐγγυήσασθαι : ἐγγυάομαι-ῶμαι : se porter caution
  • παραιτεῖσθαι : demander qqch. par des prières

ΝΒ : On pouvait toujours échapper à une condamnation à mort en choisissant l’exil volontaire. Cf. cours sur la justice.

§22

  • βασανίζω : éprouver, mettre à la question, torturer
  • ἐλέγχειν : réfuter
  • παραδίδωμι : transmettre, accorder, livrer

La monnaie à Athènes

L’unité de mesure est la drachme, qui vaut à peu près 50 € et se divise en 6 oboles. Une obole, dans la France contemporaine, serait l’équivalent d’environ 8 €. On peut arriver à ce calcul de la manière suivante : un ouvrier gagnait environ 1 drachme par jour, et travaillait 25 jours par mois. Le SMIC actuel étant de 1254 € par mois, cela donne à la drachme la valeur d’environ 50 €…

  • 1 obole
  • 1 drachme = 6 oboles
  • 1 mine = 100 drachmes
  • 1 talent = 6 000 drachmes
  • 8,33 €
  • 50 €
  • 500 €
  • 300 000 €

Mais la correspondance est purement indicative : une récompense de 10 000 drachmes (500 000 €) peut paraître énorme en Europe occidentale aujourd’hui ; elle correspondait effectivement à une forte somme dans la Grèce du 5ème siècle.

Une démonstration convaincante, qui s’appuie sur des faits

En cas de dénonciation, si la personne dénoncée est reconnue innocente, c’est son dénonciateur qui est condamné à mort. Il est donc impossible que dénonciateur et dénoncé soient saufs tous les deux. Or c’est le cas d’Andocide et de son père… C’était probablement l’accusation la plus dangereuse, la plus susceptible d’attirer la haine des jurés sur Andocide ; mais aussi la moins fiable. Cf. comment pareille rumeur a pu naître (introduction de l’édition Budé, p. XXI)

La mutilation des Hermès (§ 34-59)

Texte 4 : la dénonciation de Dioclidès (§ 34-42)

Vocabulaire et grammaire

§ 34

  • ἀναθήμα, ματος : offrande religieuse, statue, objet commémoratif
  • ὑπέχω : soumettre une proposition, offrir
  • δυοῖν δέοντας εἴκοσιν : « 20 moins 2 » = 18

  § 35

  • προσήκων, οντος : proche, parent

§ 37

  • ἐπαρθείς : participe aoriste passif de ἐπαίρω : soulever, exciter

§ 38

  • κομίσασθαι : obtenir le fruit de qqch., recouvrer
  • ἀποφορά, ᾶς : produit d’un esclave, ce qu’il rapporte à son maître lorsqu’il travaille à l’extérieur.
  • προπύλαιον, ου : vestibule d’un temple
  • μεταξύ : au milieu, entre
  • κίων, κίονος : colonne
  • ὁ ἀριθμός, οῦ : nombre, dénombrement

§ 40

  • μήνυτρον, ου : récompense d’une dénonciation
  • 100 mines = 120 000 € : une très grosse somme !

  § 41

  • οἴδε : sujet du verbe περιμένω
  • περιμένω : attendre
  • ἀπωθεῖσθαι < ἀποθέομαι-οῦμαι : repousser
  • συνειδώς, δότος  < σύνοιδα : être dans la confidence, être complice
  • 2 talents = 1 440 000 €

  § 42

  • Κηδεστής, οῦ : tout parent par alliance ; beau-frère
  • Μήν, μηνός : mois

Realia

§ 36 : Pisandre et Chariclès « montraient alors beaucoup de zèle pour la démocratie »… Or Pisandre fera partie de ceux qui la feront tomber en 411, pour installer la dictature des 400… et il sera même un oligarque intransigeant.

Une atmosphère de terreur, dès cette époque : chacun craint dénonciations et arrestations, qui pouvaient conduire à la mort. Climat totalement empoisonné.

Texte 5 : Une arrestation dramatique (§ 43-47)

  § 43

  • ἀναβιβάζειν : faire monter
  • ὁ τροχός, οῦ : la roue (instrument de supplice)
  • ἀνακράζω (ἀνέκραγον) : pousser un cri

  § 44

  • στρεβλωθήναι < στρεβλόω-ῶ : tordre
  • αὐτομολέω-ῶ : passer volontairement d’un camp à l’autre, être transfuge
  • ἐνέχομαι : être exposé ou soumis à

  § 45

  • ἐν ἀπορρήτῳ : en secret
  • ἐν τοῖς ξύλοις : entraves pour les pieds

§ 47

  • ἀνεψιός, οῦ : cousin germain

Comparer avec le texte de Thucydide, VI, 61 :

« de fait, par une coïncidence singulière, au moment de toute cette agitation, une armée lacédémonienne peu nombreuse s’était avancée jusqu’à l’Isthme, de connivence avec les Béotiens. On attribuait sa venue à quelque complicité d’Alcibiade ; les Béotiens, disait-on, n’y étaient pour rien, et, si on n’eût prévenu les conjurés en les arrêtant à la suite de la dénonciation, la ville eût été livrée à l’ennemi. Les habitants passèrent même une nuit en armes au Théséion, sanctuaire dans l’intérieur de la ville. »

Obsession d’un complot, dont Alcibiade se serait rendu coupable, avec la profanation des Mystères et la mutilation des Hermès, avec pour but de renverser la démocratie… On comprend qu’il ait faussé compagnie à ceux qui le ramenaient de Sicile pour être jugé, même si, ce faisant, il semblait leur donner raison…

Un portrait peu flatteur des Athéniens

  • Pisandre, qui manipule le Conseil au nom de la défense de la démocratie, alors qu’il se révèlera un des pires oligarques en 411 ;
  • Le Conseil, qui acclame un déni de justice (infliger à des citoyens athéniens, et même à des collègues, un traitement réservé aux esclaves)
  • Les deux bouleutes menacés, qui laissent leurs garants se faire torturer à leur place…
  • Une justice rien moins que sereine, avec l’obsession de la conspiration anti-démocratique, des haines inexpiables entre individus, des arrestations massives sur la foi de simples dénonciations, des condamnations sommaires : atmosphère de terreur, de guerre civile, générée par la guerre étrangère.
  • Et un personnage aussi douteux que Dioclidès, qui eût été prêt à dissimuler ce qu’il savait pour de l’argent, est nourri au prytanée, ce qui est le plus grand honneur possible !

Cela dit, peut-être Andocide force-t-il le trait, pour que son propre comportement paraisse acceptable : il se pose en victime, et bientôt en sauveur, alors qu’il  a trahi ses complices…

Texte 6 : Nuit d’angoisse et dénonciation (§ 48-55)

  § 48

  • ἐδεδέμεθα < δέω, δήσω, ἔδησα, δέδεκα : lier
  • συνεκέκλῃτο < συγκλείω (plus que parfait passif) : enfermer ensemble
  • ὁ οἶκτος, ου : lamentation, plainte
  • ὀδύρομαι : se plaindre
  • συνεκτραφείς < συνεκτρέφω : élever avec

  § 50

  • ἀναγκαίος : parent par le sang (litt. « celui qui est contraint d’accepter les charges d’un héritage. Cf. latin : necessarii)
  • ἀνιάω-ῶ : chagriner
  • πρόθυμος, ος, ον : plein de zèle, de bonne volonté

 Discours au style direct, très émouvant, de Charmidès, dans une ambiance effroyable : obscurité, plaintes, situation tragique d’innocents qui vont mourir, y compris peut-être les femmes et enfants… Dans quelle mesure n’est-ce pas exagéré ? Mais l’on est face à un sacrilège : il est possible que la justice archaïque de la responsabilité familiale soit pour ce cas envisagée. Dilemme d’Andocide : dénoncer ses amis, ou laisser périr sa famille ?

Usage pathétique du discours direct dans les plaidoyers ; peut nous paraître surprenant, mais usage constant (cf. les discours chez les historiens). Sorte d’exercice obligé. A ce discours va d’ailleurs faire écho un autre discours, intérieur cette fois, mais toujours au style direct.

  § 51

  • ἀντιβολέω-ῶ : se jeter au devant de, supplier
  • περιπεσών : tomber sur (à l’improviste) < περιπίπτω, -πεσοῦμαι, -έπεσον
  • περιίδω … ἢ εἴπω : subjonctifs délibératifs (< περιοράω-ῶ)
  • δημεύω : confisquer au profit de l’Etat
  • ἀλιτήριος τῶν θεῶν : coupable envers les Dieux

  § 52

  • κατέγνωστο < καταγιγνώσκω : condamner. (aoriste passif, dont le sujet est θάνατος)

  § 53

  • ὄλεθρος, ου : perte, ruine, mort

Andocide montre le cas de conscience qui lui est imposé, et fait en sorte que sa décision (dénoncer ses amis) paraisse légitime :

  • il se désolidarise du fait, en les montrant comme des criminels ;
  • il met en balance la vie de 4 hommes, et celle de 300 Athéniens dénoncés par Dioclidès, + ses propres parents + la paix de la cité ;
  • Les 4 hommes en question n’ont pas trop souffert : actuellement, ils se portent bien, et n’ont même pas été privés de leurs biens… Sa famille, elle, risquait la mort.

§ 54

  • παρειστήκει : plus que parfait actif, 3ème singulier de παρίστημι : se présenter, inspirer.

  § 55

  • ἐλέγχειν : confondre quelqu’un

 Texte 7 : Récit des événements (§ 61-69)

  § 61

  • Εἰσηγήσατο : < εἰσηγέομαι-οῦμαι : proposer, conseiller
  • ἐν Κυνοσάργει : < τὸ Κυνόσαργες, ους,  le Cynosarge, place d’Athènes avec un gymnase.
  • τὴν κλεῖν = τὴν κλείδα : le verrou, la clavicule
  • συντρίβω : briser

Le discours indirect : mêmes temps et modes que le discours direct.

  § 62

  • ἡ Αἰγὴς : la tribu Aegide, à Athènes

§ 65

  • Alcibiade de Phégonte est le cousin d’Alcibiade, fils de Clinias, que nous connaissons.

  § 66

  • καταδέξασθε < καταδέχομαι : accueillir chez soi les exilés.

Débat sur les lois (§ 70-109)

Texte 8 :  Le décret de Patroclidès (§ 70-76)

§ 71

  • ἐνδείνυμι (ἐνδείξις) : dénonciation, en particulier pour usurpation de fonctions publiques.
  • ψήφισμα, ματος : décret
  • οὐδεν ἐμοὶ προσήκει + gén. : concerner, regarder, intéresser (dat. de la personne et gén. de la chose)
  • Εἴργεσθαι τῶν ἱερῶν : chasser, écarter des temples

§ 72

  • ἄκυρος, α, ον : sans autorité, sans valeur, sans force de loi

Raisonnement un peu tordu, mais qui annonce ce qui va suivre : si Andocide ne parvient pas à démontrer que le décret au nom duquel on l’accuse a été aboli, il sera condamné ; mais s’il parvient à le démontrer, alors il parle en faveur de gens qui auraient dû, autant et plus que lui, être visés par ces mêmes lois aujourd’hui abolies… Ce qu’il montrera dans la dernière partie de ce discours, en accusant à son tour ses accusateurs.

§ 73

  • ἡ πολιοκία, ας : siège d’une ville
  • ὦφλον < ὀφλισκάνω, ὀφλήσω, ὦφλον, ὤφληκα : être condamné à une amende, être accusé de.
  • Εὔθυνα, ης : reddition de compte d’un magistrat ; par suite, être accusé de malversation
  • ἐξούλη, ης : procès pour expulsion illégale
  • ἐπιβολή, ῆς : impôt, amende
  • ὠνα, ας : achat, emplette, fermage

§ 74

  • ψευδοκλητεία, ας : action pour fausse assignation

§ 75

  • ἡ πρόσταξις, εως : privation d’une partie des droits civils

§ 76

  • ἐξαλεῖψαι < ἐξαλείφω, -λείψω, -ήλειψα : enduire pour effacer des décrets ou des lois

Le décret de Patroclidès : Premier intérêt de ce texte, un exposé de droit, énumérant les différentes formes d’atimie (ou privation des droits civiques), partielles ou totales. On remarquera que l’échelle des valeurs n’est pas la même qu’aujourd’hui : voler le trésor est passible non seulement d’une atimie totale, mais en outre transmissible aux héritiers ; ceux qui avaient volé des particuliers étaient également lourdement condamnés… ainsi que leurs descendants.

En revanche, des crimes qui nous semblent plus graves ne sont passibles que d’atimie partielle, frappant la personne mais non les biens, et sans que la famille soit touchée : déserteurs, menteurs de tous poils, et même tortionnaires de leurs parents…

Le second intérêt est historique : l’on voit s’exercer « en direct » la démocratie athénienne, et en particulier le pouvoir législatif du peuple ; une loi d’amnistie peut être votée par le peuple, dès lors que quelqu’un le propose.

Le troisième intérêt concerne le procès d’Andocide lui-même. Quel intérêt pour sa cause ? Sa défense pourrait tenir dans le seul paragraphe 71. Il est accusé au nom d’un décret d’Isotimidès excluant des temples ceux qui ont commis un sacrilège. Or :

  • Andocide n’a jamais commis de sacrilège (comme il l’a démontré précédemment) ; il n’a participé ni à la parodie des Mystères, ni à la mutilation des Hermès ;
  • De plus, ce décret a été aboli.

Cela devrait suffire. Pourquoi donc ce long développement sur le décret de Patroclidès ?

  • Pour montrer qu’un décret peut en abolir un autre ;
  • Pour montrer la démarche d’Athènes : lorsque la cohésion nationale est nécessaire, la cité n’hésite pas à amnistier largement, à « remettre les compteurs à zéro », y compris à l’égard d’anciens ennemis. Pourquoi donc poursuivre Andocide pour des faits largement antérieurs ?
  • Pour annoncer l’estocade finale contre ses adversaires : eux-mêmes ont largement bénéficié de telles amnisties ; c’est pourquoi ils peuvent aujourd’hui l’attaquer en toute impunité… alors qu’ils auraient dû, au minimum, être exclus de toute vie publique.

Texte 9 : La révision des lois et le décret de Tisamène (§ 80-91)

§ 80

Résume en quelques lignes la période la plus sombre de la guerre du Péloponnèse, les années 405-403 : défaite d’Aegos-Potamoi, siège d’Athènes, capitulation humiliante qui conduit à la destruction des Longs-Murs, au retour des oligarques exilés, et surtout à la mort de la démocratie, remplacée par la dictature des Trente, et son cortège d’arrestations et d’exécutions arbitraires. Lire le Contre Erathosthène de Lysias. La prise de Phylè et de Municie correspondent à la reconquête par Thrasybule en 403, et donc au retour de la démocratie – d’où les hésitations sur le texte (voir notes). Durant toute cette période, Andocide se trouvait en exil, et il n’a pu obtenir le droit de rentrer qu’en 402.

§ 81

  • ἐᾶν : laisser, omettre
  • μνησικακεῖν : garder rancune
  • τέως : aussi longtemps que, jusque là. Souvent en corrélation avec ἕως
  • θεσμός, οῦ : institution, loi écrite, avec une nuance de sacré. Désigne la loi humaine écrite, mais aussi la loi divine.

§ 82

  • ἔνοχος : assujetti à, passible de
  • δοκιμάζω : mettre à l’épreuve. Verbe important pour la légalité athénienne :
    • vérifier l’aptitude ou l’éligibilité ;
    • vérifier la légalité d’une décision ou d’une proposition de loi ;
    • reconnaître l’aptitude des jeunes gens à être admis parmi les éphèbes ( = rite de majorité)
  • ἡ στοά, ᾶς : le portique
    • στοά τοῦ βασιλέως : portique où siégeait l’Archonte-Roi, à droite dans le Céramique, et où étaient affichés les lois ou décrets (la traduction par Poecile est donc fautive)
    • στοὰ ποικίλη : portique coloré (= orné de peintures) ou Poecile, où enseignait Zénon, d’où le nom donné aux philosophes stoïciens : « philosophes du Portique ».

Voir le plan de l’agora d’Athènes.

§ 83

  • ἐν σανίσιν < σανίς, σανίδος : écriteaux de bois sur lesquels on affichait certains décrets ou avis, notamment les propositions de loi, les listes…

§ 87

  • κρύβδην : secrètement

Longue argumentation visant à un seul but :  montrer que  les lois en vertu desquelles Andocide est accusé ne sont plus valables.

Pourquoi l’exposer si longuement, et avec tant d’insistance pédagogique ? Pour rappeler aux Athéniens l’importance cruciale qu’a eue cette révision des lois après le retour de la démocratie :

  1. empêcher les règlements de compte, la sycophantie ;
  2. permettre une réconciliation nationale ;
  3. permettre à la démocratie de partir sur des bases juridiques saines, et admises par tous.

C’est cet effort politique que les accusateurs d’Andocide mettent en péril, en exhumant une affaire ancienne, en vertu de lois périmées.

L’ordre du discours paraît donc cohérent :

  1. démonstration de son innocence : ne touche que sa propre personne, et ses proches
  2. démonstration de l’illégalité et de la dangerosité de l’action intentée contre lui : cette fois, c’est la stabilité d’Athènes qui est mise en péril.

Et dans les deux cas, Andocide met en valeur son souci de l’intérêt général.

§ 90

  • ὀμωμόκατε : 2ème personne du pluriel, parfait actif de ὄμνυμι (ὤμνυν, ὀμοῦμαι, ὤμοσα, ὀμωμοκα) : jurer
  • σχολή, ῆς : loisir ; ἧ που σχολῇ · dans une apodose, après protase négative : « encore moins »

« là où donc, à l’égard des Trente eux-mêmes, coupables des plus grands maux, vous avez juré de ne garder aucun ressentiment, s’ils rendaient des comptes, encore moins jugiez-vous bon d’en conserver pour un autre citoyen. »

§ 91

  • ἀπαγωγή, ῆς : arrestation d’un malfaiteur pris en flagrant délit et emmené devant le tribunal.

Texte 10 : Andocide accuse ses accusateurs § 92-109)

Accusations ad hominem qui pourrait paraître choquante aujourd’hui, mais qui était la règle dans l’éloquence judiciaire. Après s’être défendu, Andocide va maintenant mener une contre-attaque, pour montrer que ses adversaires ne sont pas dignes de foi ni d’estime. C’est un « topos » classique, que l’on retrouve dans la Rhéthorique d’Aristote.

§ 92-93

  • ὑπάρχον est un participe présent, dont le sujet est l’interrogatif τί. Ὑπάρχειν + datif : « il est permis, il est possible, il est à disposition de »… traduit mot à mot : « observez, conformément à la loi, les accusateurs, *quoi leur étant possible* ils accusent les autres. » è observez […] dans quelle situation se trouvent les accusateurs, pour qu’ils accusent les autres.
  • Rappel : la proposition interrogative indirecte ne diffère en rien de l’interrogative directe : (Allard & Feuillâtre § 251)
    • – mêmes mots introducteurs (pronoms, adjectifs, adverbes…) : λέγε μοι τίς ἦλθεν.
    • – temps et mode de l’interrogative directe. Ἠρώτησε διὰ τί μένειν βούλομαι
    • – Même négation. Λέγε μοι πότερον ἦλθεν ἢ οὔ. (dis-moi s’il est venu ou non). On peut aussi trouver μή.
    • – Seule différence : l’usage possible de l’optatif oblique : Ἠρώτησε διὰ τί μένειν βουλοίμην.
  • ὠνή, ῆς ἐκ τοῦ δημοσίου : acheter la ferme des revenus publics (= équivalent d’un fermier général de l’Ancien Régime)
  • ἡ ἐπικαρπία, ας : revenu foncier, impôt foncier pour droit de pâturage. Τῶν ἐν τῇ γῇ γεωργούντων : on investissait dans des esclaves (aux mines, aux champs…) comme aujourd’hui dans des actions. Le revenu rapporté par les esclaves était l’équivalent de ce que rapportent des dividendes de nos actionnaires.
  • ἐνενήκοτα μνᾶς = 90 mines = environ 45 000 €. Un revenu assez coquet !

1er personnage : Képhisios. Un escroc, qui a volé le trésor ! Et devenu, en outre, sycophante, la pire injure qui se puisse trouver.

§ 94

  • ἀπάγω : arrêter en flagrant délit et emmener devant un tribunal. Tout citoyen pouvait le faire, s’il était témoin d’un crime. Voir « ἀπαγωγη» dans le lexique juridique.
  • ἐνέχομαι : être exposé ou soumis à (une peine, une accusation…)
  • οὐδ’ αὐτὸς ἀντιλέγει ὡς οὐκ ἀπηγαγεν : succession assez confuse de négations, qui n’annulent mutuellement : il ne prétend pas qu’il ne l’a pas arrêté => il ne nie pas l’avoir arrêté.

2ème personnage : Mélétos. Son cas est plus grave, puisqu’il y a eu mort d’homme. Et son impunité paraît d’autant plus scandaleuse : mention pathétique des enfants de Léon, qui ne pourront jamais obtenir justice. S’agit-il de l’accusateur de Socrate ? Cela paraît peu probable…

§ 95

  • μνησικακέω-ῶ : garder rancune, exercer des représailles
  • νηποινεί : impunément

3ème personnage : Épicharès. Admirons la progression : celui-là a carrément été bouleute pendant les 30, donc leur complice objectif… et l’on peut supposer qu’il a plus d’une mort sur la conscience. Il serait passible de la peine la plus grave s’il n’y avait pas eu l’amnistie.

Andocide, par ces rappels, et par la lecture solennelle de la loi de Solon, s’ingénie à raviver la haine, apaisée précisément par l’amnistie. C’est habile : si les complices mêmes de la dictature peuvent impunément vivre à Athènes, comment lui, dont le cas est infiniment moins grave, pourrait-il en être exclu ?

La loi : impératifs présents (vérité générale).

Harmodios et Aristogiton, les « tyrannoctones » (copie romaine d’après un original grec – musée de Naples)

Allusion à Harmodios et Aristogiton, les « tyrannoctones » deux frères qui avaient tué en 514 Hipparque, fils de Pisistrate, et tyran. Leur nom est symbole de la démocratie athénienne, et de sa haine des tyrans. Ils avaient une statue, œuvre d’Anténor, sur l’Agora ; enlevée par les Perses, elle fut refaite, en bronze, par Critios et Nésiotès aussitôt après les guerres médiques (milieu du Vème siècle).

§ 96

  • λαχόντες τῷ κυάμῳ : λαγχάνω : obtenir une charge par tirage d’une fève (= par tirage au sort) [κύαμος, ου : fève]

§ 97

  • καθ’ἱερῶν τελείων : sacrifices parfaits (sans tâche, ou à qui rien ne manque)

§ 98

  • ἐπεύχεσθαι : souhaiter
  • ἐξώλη, ης : anéantissement, extermination
  • § 99
  • ἐπίτριπτον : rompu au métier, rusé, roué
  • τὸ κίναδος, ους : renard, homme fourbe, bête malfaisante

Noter la violence de l’insulte !

§ 100

  • μνεία, ας : souvenir, mention
  • τὴν ἰδέαν : accusatif « de relation », se rapportant à μοχθηρὸς ὤν : aspect extérieur, forme.

Commentaire

Noter la grande vivacité du discours : changement d’interlocuteur (s’adresse d’abord à son accusateur, ensuite aux juges), violence du propos, jeu de mots sur ἑταιρεία /ἑταίρησις, fondés sur la même racine, mais signifiant, l’un, parti politique, l’autre… accointance de débauchés, pour ne pas dire compagnons de partouze. Allusion à la fois aux mœurs d’Epicharès (homosexuel, ce qui en soi ne choquait pas vraiment, mais surtout prostitué de bas étage) et à ses disgrâces physiques, ce qui aujourd’hui ne serait pas très élégant…

§ 101

Andocide fait revivre, de manière très animée, par un dialogue fictif, un interrogatoire sous les Trente – rappelant au passage que deux de ses accusateurs, Epicharès et Chariclès, en faisaient partie.

  • ἀγωνίζομαι : être poursuivi dans un procès
  • ὑπάρχω : ici, être
  • ἔτεμες  < τέμνω, τεμῶ, ἔτεμον, τέτμηκα : couper, ravager, dévaster
  • ἐλῄσω : ληίζω, emmener comme butin, exercer la piraterie (aoriste moyen)
  • συγκατασκάπτω : faire périr avec, aider à détruire

§ 105

  • ἀκροασόμενοι < ἀκροάομαι-ῶμαι :  écouter, prêter l’oreille à

Andocide souligne les enjeux politiques de son procès : s’il peut être jugé en vertu de lois et de décrets théoriquement abolis, s’il peut être condamné alors qu’il n’a pas participé aux crimes des Quatre-cents ou des Trente, alors tout le travail de réconciliation nationale sera perdu, et ce sera la porte ouverte à une nouvelle épuration.

§ 106-109

Éloge de la concorde et donc de la réconciliation nationale ; évocation d’un précédent célèbre : durant les guerres Médiques, devant les menaces des Perses, les Athéniens ont su oublier leurs différents et s’unir, obtenant ainsi la victoire de Marathon. Une manière aussi pour Andocide d’évoquer ses brillants ancêtres : Léogoras, son arrière-grand-père, et Charias, le père de son arrière-grand-mère, qui firent tomber Hippias et Hipparque. Voir l’histoire des Tyrannoctones.

Affaire du rameau de suppliant (§ 110-139)

Texte 10 :  Andocide rappelle les faits (§ 110-116)

§ 110

  • ἡ ἱκετηρία, ας : rameau de suppliant

phrase assez mal bâtie : reprise de ἃ αὐτοὶ κατεσκεύασαν par ἃἐπεβούλευσαν. « ils sont tellement audacieux que, ce qu’ils avaient tramé, il ne leur suffit pas de n’avoir pas obtenu ce qu’ils avaient comploté, mais en plus ils m’accusent de sacrilège. »

§ 111

  • κατὰ τὴν τελετήν : pendant la cérémonie, célébration
  • ἕδραν ποιεῖν : siéger

§ 115

  • ἐξηγεῖσθαι : exposer, interpréter ; dans un contexte religieux. Seuls les Kéryces avaient le droit d’exégèse sur les questions portant sur les fêtes d’Éleusis. Képhalos, ancien potier et politicien démocrate, soutenait Andocide dans son procès (cf. § 150) ; il passait pour bon orateur.

Rappel des faits :

  • aucune preuve qu’Andocide ait déposé ce rameau : personne ne l’ a vu, et Callias, qui l’accuse, ne peut nommer son témoin.
  • Et même à supposer qu’il l’eût fait, il ne serait passible que d’une amende.
  • Enfin, l’argument selon lequel les Déesses auraient voulu le perdre ne tient pas : si elles l’avaient voulu, elles l’auraient poussé à avouer, même innocent !

Texte 11 : les motivations de Callias (§ 117-131)

Callias veut s’emparer d’une fille épiclère, qui est aussi sa petite-fille. (§ 117-123)

§ 117

  • ἄρρην, ἀρρένος : mâle

§ 118

  • οἰκειότης : parenté, liaison d’amitié

§ 119

  • εύτυχια ἀνδρός : bonheur, prospérité d’un mari
  • ἐπιδικάζομαι : réclamer en justice, se faire adjuger

§ 120

  • καμοῦσα < κάμνω, καμῶ,ἔκαμον, κέκμηκα : être souffrant, tomber malade
  • παράστασις, εως : consignation préjudicielle d’une somme d’argent (terme de droit)
  • λαγχάνω, ἔλαχον : intenter un procès , revendiquer en justice

§ 122

  • βδελυρία, ας : impudeur, conduite infâme
  • ἀπαλλάττω : se tirer d’affaire, abandonner

Une fille épiclère (qui dispose d’un héritage) non mariée, doit épouser son parent le plus proche, à l’exclusion de ses ascendants (ce qui exclut Callias, son grand-père). Andocide et Léagros sont ses deux oncles. Ce passage est très obscur. Callias aurait épousé une fille de Glaucon, et serait donc le beau-frère de Léagros, et le grand-père de l’épiclère…

Curieuses motivations de Callias : pourquoi veut-il d’une fille qui n’hérite que de trois talents… de dettes ? Est-ce par simple débauche ? Ou aurait-il des motivations plus nobles, qu’Andocide passe sous silence ?

Le fils de Callias : une naissance honteuse. (§ 124-129)

Andocide s’attaque à la généalogie de son second fils, né d’un second mariage : alors que d’un premier mariage avec la fille de Glaucon, Callias a dû avoir deux enfants, un fils nommé Hipponicos, comme son grand-père, et une fille, épouse d’Epilycos (et mère des deux Epiclères qui font l’objet du conflit entre Callias et Andocide), il s’est remarié avec Chrysilla 2, puis avec la mère de celle-ci, Chrysilla 1 (dont nous ignorons la parentèle), dont il a eu un fils.

C’est pour celui-ci qu’il revendique la fille épiclère… à moins qu’il ne la veuille pour lui-même, achevant ainsi de brouiller l’ordre des générations !

§ 125

  • λυσιτελεῖν : être avantageux. Τεθνάναι λυσιτελεῖ ἢ ζῆν : il vaut mieux être mort que vivre
  • ἀπάγχομαι : se pendre
  • διαπεπλησμένος < διαπίμπλημι : être saturé, fatigué de
  • κυεῖν : être enceinte
  • ἔξαρνός,ου εἰμι : nier

Ne pas voir cette histoire avec nos yeux à nous : préférer une belle-mère de 40 ans à une épouse de 20 ne choque plus, ou choque moins : le cinéma est plein de ces histoires. Il n’en était pas de même jusqu’à une époque récente.

Les Grecs n’avaient pas nos moyens pour savoir si un enfant étaient légitime ou non, et quel était son père : seul le serment du père primait.

Ce qui choque, ici, c’est le double serment contradictoire – Callias s’est parjuré au moins une fois, ce qui disqualifie son action contre un prétendu sacrilège d’Andocide. Puisqu’il respecte si peu les déesses, le fait qu’il ait lui-même déposé le rameau est encore plus plausible.

Enfin, on apprend qu’il vit encore avec Chrysilla au moment où il revendique la fille d’Epilycos :va-t-il la chasser une seconde fois, ou faire cohabiter grand-mère et petite-fille ?

§ 129

  • ἡ τήθη : grand-mère

Et par-dessus le marché, Callias a ruiné son propre père ! (§ 130-131)

  • Παιδαριον : jeune enfant
  • Κληδών : tout ce qu’on entend : présage, rumeur
  • ἀλιτήριος, ος, ον : criminel, fléau

Texte 12 : les motivations des autres accusateurs (§ 132-136) : une sombre histoire de fermage

Après avoir réglé son compte à Callias, Andocide se tourne à présent vers les autres accusateurs : quelles sont leurs motivations ? Pourquoi ne l’ont-ils pas attaqué plus tôt ?

§132

  • ἐπιδημέω-ῶ : résider à
  • μυῶ : mot à mot se tenir bouche close è initier aux mystères (μύστης)
  • προβάλλειν : proposer pour une fonction
  • ἀρχεθέωρος : chef des théores (= députés envoyés par les Etats grecs, notamment pour participer aux grands jeux)
  • ταμίας : intendant

§ 133

  • ἀρχώνης, ου : fermier général des impôts
  • ἡ πεντεκοστή : taxe de 2 % sur les importations et exportations
  • ἡ λεύκη, ης : peuplier blanc
  • ὑπερβάλλω : surenchérir

§134

  • μεταδίδωμι : communiquer, donner une part
  • ἐωνοῦντο : étaient achetés (ὠνέω, verbe défectif : part. pf. Actif, passif impft. et aoriste.)
  • ζημιόω-ῶ : causer du dommage

Texte 13 : Dernier argument : les Dieux ont voulu ce procès (§ 137-139)

§ 138

  • αἰκία : mauvais traitements.

Ultime argument de ses adversaires : Andocide a couru mille dangers sur mer ; s’il en est sorti, c’est que les Dieux voulaient sa condamnation. Ironie d’Andocide : les Dieux auraient sans doute, s’il les avait offensés, préféré se venger eux-mêmes…  C’est la seconde fois que ses adversaires prétendent interpréter la pensée des Dieux.

En même temps, tableau assez terrifiant de la mer durant la guerre : outre les périls naturels, présence de bateaux militaires et de pirates ; sort tragique de bien des gens, réduits en esclavage, ou torturés et tués.

La piraterie : une plaie dont seuls les Romains parviendront, un temps, à se débarrasser, grâce à Pompée.

Texte 14 : Péroraison (§ 140-150)

§  142

  • ἀνηκέστος, ος, ον : incurable, irrémédiable

§ 143

  • δημοσίᾳ : au nom de l’Etat

1er argument, par analogie : les Spartiates vainqueurs n’ont pas voulu raser Athènes, en considération des ancêtres des Athéniens (notamment à Marathon…) ; de la même façon, Andocide doit être sauvé, en considération de ses propres ancêtres, qui d’ailleurs font partie de ces héros.

§ 146

  • πρόρριζον : jusqu’à la racine

2ème argument : il sera lui-même un citoyen utile, par son argent et ses relations.

3ème argument : retour au premier. En faisant périr Andocide, ils font disparaître le dernier rejeton d’une illustre famille.

4ème argument, appel pathétique : Andocide n’a pour toute famille que les Athéniens eux-mêmes.

Et le discours s’achève par un dernier appel à témoins.

A compléter par l’histoire de la rhétorique, et une récapitulation de l’essentiel de l’art oratoire.

Andocide est le contemporain de Gorgias (485-374) et de Protagoras (486-410), les inventeurs de la rhétorique.

Voir notamment Phèdre, de Platon, 266d.

Un ouvrage à consulter : Michel PATILLON, Éléments de rhétorique classique, Armand Colin, 2005, 160 p.