Les sanctuaires panhelléniques

Le Trésor des Athéniens à Delphes

Si le « naos » désigne le temple, le « hiéron » est un sanctuaire, lieu commun et public d’un ou plusieurs culte(s). A l’origine ils étaient inclus dans les palais mycéniens : le «mégaron», grande pièce, devient un sanctuaire.

Caractères généraux

C’est d’abord un espace publiquement consacré et devenu intouchable : le « témélos » limité par une ligne discontinue de bornes ou de pieux, ou d’une rangée d’arbres. Puis l’on trouve un mur de clôture, le « péribole » que l’on franchit par des portes monumentales (propylées). De là part une voie sacrée. On y trouve également un endroit pour se purifier avec des vasques remplies d’eau, puis un autel pour les sacrifices, puis l’image de la divinité. Les grands sanctuaires deviennent de véritables villes sacerdotales, avec de nombreuses annexes : habitations des prêtres, hôtels pour les pélerins, salles de réunion…

Les différentes catégories de sanctuaires

Sanctuaires fondés par des particuliers

Très nombreux, ils appartiennent à des familles et sont le plus souvent modestes. Ainsi Xénophon, de retour de l’expédition des Dix-Mille, fit élever un sanctuaire à Artémis.

Sanctuaires des dèmes

Chacun des 100 dèmes attiques a le sien. Y sont déposés les archives, les textes officiels, les listes civiles… Ils font un peu office de mairie.

Sanctuaires des phratries

Ils sont un peu plus rares à l’époque classique : beaucoup ont disparu avec la fin des phratries, ces familles élargies de type patriarcal, analogues à des clans.

Sanctuaires des tribus

Il y a 10 tribus en Attique, organisées par Clisthène ; les sanctuaires sont dédiés aux héros éponymes désignés par la Pythie. Ils servent eux aussi de dépôts d’archives, de lieu de réunion et sont un peu les équivalents de nos sous-préfectures.

Sanctuaires nationaux

Ils sont très importants, à l’échelle de la cité toute entière : ex. : l’Acropole d’Athènes, dont la destruction durant la seconde guerre médique fut un traumatisme épouvantable, que Périclès s’efforcera de guérir par de magnifiques constructions.

Sanctuaires des fédérations ou sanctuaires panhelléniques

Au-dessus des cités, il existe des réunions d’États d’origine commune : des cités se groupent autour d’un sanctuaire, sous la protection d’une divinité choisie : c’est l’amphictyonie. Quelques uns de ces sanctuaires finissent par s’ouvrir à tout le monde, on les dit alors panhelléniques.

Dans certains, on trouve des cultes secrets dont sont exclus les non-initiés.

D’autres sont ouverts à tous ; les cultes s’accompagnent alors de fêtes et de grands jeux.

Tous ces sanctuaires sont sacrés : les armées ne peuvent fouler leur sol. Certain ont le droit d’asylie : toute personne, tout objet qui y entre devient intouchable.

Puissance économique des sanctuaires.

Les ressources

Celles qui ne rapportent pas

Les offrandes et le matériel sacré, qu’il suffit de conserver, sont enregistrés. De temps en temps, on fait l’inventaire : certaines sont transportées ailleurs (de Délos, du Parthénon). Les objets précieux sont parfois fondus pour faire de la monnaie. Les biens périssables sont vendus sur le marché, parfois dans le sanctuaire même.

Celles qui rapportent

  • Les capitaux, qu’il faut faire fructifier. La monnaie est conservée dans des amphores où sont inscrits la provenance de la somme, la date du dépôt, le nom du receveur et celui du donateur, la somme elle-même. Ces capitaux sont prêtés à des particuliers ou à des États, le plus souvent sur 5 ans, à 10 % par an, garantis par des hypothèques sur les biens de l’emprunteur.
  • Les maisons en ville et les domaines ruraux : en particulier les hôtels autour du péribole. Condition uniforme des baux et fermages : en principe pour 10 ans, avec caution obligatoire. En cas de non-paiement, une amende, puis saisie et vente de la récolte, du mobilier, du bétail, des esclaves ; enfin, inscription héréditaire sur la stèle des débiteurs du dieu.
  • Autres recettes : subventions des cités, péages sur les isthmes ou les détroits….

Les dépenses

  • Les dépenses périodiques, pour la bonne marche du temple : achat des bêtes à sacrifier, salaire du personnel (par décades, ou pour les prêtres, par prytanie, soit 1/10ème de l’année).
  • Les dépenses casuelles : entretien et travaux, décidés en principe par le clergé du sanctuaire, parfois par l’Ecclésia. Les travaux sont mis en adjudication.

Les administrateurs des sanctuaires

Ce sont des prêtres spécialisés, personnages très respectés et très qualifiés.

À Délos, 4 intendants du temples ou hiéropes, qui n’ont dans toute l’île qu’un personnage au-dessus d’eux, l’archonte. Leur charge est annuelle, soumise au contrôle de l’ecclésia : ils doivent rendre des comptes.

À Delphes : L’administration financière appartenait d’abord à la Boulè, à une commission de prytanes, jusqu’au début du IVème siècle.

Par suite de l’extension de Delphes, les étrangers voulurent être représentés : en 369 on créa un collège international composés de naopes désignés par les cités autres que Delphes, et adjoints aux prytanes.

En 339, une nouvelle commission remplace ce collège : les thamiai.

Rôle politique des sanctuaires

Il est primordial dans les sanctuaires panhelléniques. C’est d’abord la seule forme de relations internationales en Grèce. Ils ont un but d’abord uniquement religieux, puis un aspect déjà politique : on proclame une trêve sacrée durant les réunions aux sanctuaires. Les cités envoient des théories ; on organise des concours gymniques et musicaux : c’est une image de paix universelle.

Ces réunions prennent aussi très vite un aspect économique : commerce, foires… Des perspectives d’échanges ultérieurs sont ouvertes ; il faut pour cela tout un contexte politique, des ententes et même des actions communes : l’amphictyonie est au départ une réunion de cités de même origine. Mais ce ne sont pas de véritables fédérations. Périclès essaya deux fois :

  1. Autour d’Athéna (cf. synécisme) : mais Athéna était trop la déesse d’Athènes.
  2. Autour des divinités d’Éleusis, mais il était trop tard : la guerre du Péloponnèse était sur le point d’éclater.