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On estime que l'Europe, au XIIèmesiècle, compte environ 48 millions d'habitants. Une vigoureuse reprise de l'expansion démographique a commencé vers l'an Mil ; pour la France, les estimations sont très variables : environ 17 millions d'habitants, presque tous ruraux.
La nouveauté vient des défrichements
Après une longue stagnation sont apparus des progrès techniques, qui ont amélioré les rendements et ont permis cette expansion démographique :
C'est à cette période, entre le XIème et le XIIèmesiècle, que le paysage français prend sa forme actuelle.
Dans le
L'isolement des villlages est rompu : c'est à ce moment qu'on accole aux noms des villages homonymes celui de leur seigneur pour les distinguer. Ainsi, dans le Maine, Sillé-le-Guillaume et Sillé-le-Philippe, Yvré-le-Pôlin et Yvré-l'Évêque...
Dans le même temps, les revenus des seigneurs s'accroissent, au moment même où leurs besoins d'argent vont aussi croissant ; les corvées tendent à disparaître au profit de taxes ; les paysans améliorent leur condition, dans la mesure où l'existence de villes et de villages francs permet de négocier : si le seigneur se montre trop exigeant, ils n'hésitent pas à "déguerpir"... mais souvent aussi ils s'endettent pour racheter leur liberté. Leur situation dépend aussi de leur environnement : le servage a disparu à la fin du XIIIème siècle en Île de France, mais subsiste dans les terres plus pauvres.
Enfin, depuis le siècle précédent, les marchés ruraux se développent, et l'économie monétaire repart.
Les villes romaines y étaient plus rares ; les villes se construisent et se développent au pied d'un château ; les activités se regroupent par rue, et au centre on trouve une place du marché, centre stratégique à l'origine de la ville. A mesure qu'elles s'accroissent, les villes obtiennent le droit de s'entourer d'une palissade, puis d'un rempart.
La densité de population est assez mince : les villes de plus de 30 000 habitants sont rares, à l'exception de Paris qui en compte environ 100 000.
Les villes Romaines y étaient plus nombreuses et plus peuplées ; elles subsistent en partie. Les enceintes, moins larges, créent une plus grande densité urbaine ; souvent le Noble y réside, dans des maisons fortifiées.
Les villes sont essentiellement peuplées d'artisans, qui vendent eux-mêmes le produit de leur travail. Les villes les plus riches sont aussi celles qui se spécialisent : Chartres pour le textile, vins pour La Rochelle ; ou celles qui ont des foires importantes : foire du Lendit à Saint-Denis, ou encore Beaucaire, ou Châlons-sur-Saône.
Une
Les villes tentent donc de gagner une certaine autonomie : les bourgeois s'organisent pour construire un
rempart (ressuscitant ainsi l'impôt public), s'unissent par un serment, et créent des
La naissance des Communes – qui se produit au Mans entre 1065 et 1070 – se fait parfois dans le sang : en 1105 et 1125 à Carcassonne, en 1112 à Laon (où l'évêque est assassiné), en 1141-43 à Montpellier, à Nîmes en 1210. Mais ailleurs, il se déroule plus pacifiquement.
Mais ce mouvement, qui n'a rien de démocratique, et aboutit à la création d'une nouvelle classe de privilégiés, ne concerne finalement qu'une partie infime de la population.
L'évolution qui mènera vers la Noblesse d'Ancien Régime est déjà amorcée.
Originellement lien exclusif entre un seigneur et son vassal,
La Noblesse féodale, d'origine carolingienne, se confond très vite dans le Sud avec la Chevalerie ; dans la France du Nord, les deux ordres demeurent séparés.
Les châteaux forts demeurent inexpugnables, d'autant qu'ils sont désormais bâtis en pierre : d'abord limitée aux donjons, la pierre gagne les enceintes.
Les châtelains disposent d'un pouvoir politique, le
La première catégorie est formée par les guerriers professionnels, qui à l'origine ne possédaient rien ; ceux-là s'enrichirent progressivement par l'attribution de fiefs ; ils rejoignent ainsi les seigneurs.
La seconde regroupe des propriétaires fonciers, dépourvus de pouvoir politique, mais qui sont amenés au métier des armes par la nécessité de se défendre.
Très vite, ces deux catégories se confondent, et se caractérisent par leur mode de vie : le combat à cheval, art difficile et coûteux, rarement meurtrier (il est plus rentable de faire prisonnier son adversaire pour en obtenir une rançon) ; les conflits durent, et lorsque le chevalier ne combat pas, il se livre à des activités similaires : le tournoi ou la chasse.
Ainsi se crée une société guerrière, très soudée par les liens vassaliques, et surtout les liens du
sang et l'appartenance à une "lignée" : c'est au XIème siècle que sont apparus les patronymes,
qui s'ajoutent au nom de baptème.
Elle est soudée également par des
©Alain Houot, Site "Monatlas", avec l'aimable autorisation de l'auteur.
Le Roi de France ne domine véritablement, au début du XIIème siècle, que son domaine propre, en orange sur la carte ci-dessus, qu'il s'efforce à la fois de protéger contre l'appétit de ses voisins, et d'agrandir.
Elle donnera aussi au Roi Louis VII deux filles,
Malheureusement, Aliénor est peu appréciée à la cour de France ; son luxe, et sa culture occitane détonnent. Après la seconde Croisade, qui a réuni pour la première fois autour du Roi l'ensemble de la Noblesse, le couple se sépare, Louis VII fait annuler son mariage... et Aliénor récupère sa dot, qu'elle donnera à Henri Plantagenêt, héritier d'Anjou et de Normandie, futur Henri II d'Angleterre ! C'est ainsi que le Roi de France perdit l'Aquitaine... et que se créa un immense domaine appartenant à l'Angleterre à l'Ouest et au Sud de la France. Certes, Henri II était le vassal du Roi de France, mais sa puissance dominait largement celle de son seigneur...
À la mort de Louis VII en 1180, lui succède
Aux mains des laïques et des féodaux, l'Église a entrepris de se réformer au XIème siècle ; au début du XIIème siècle, les liens de vassalité se distendent à l'égard du Roi et des grands seigneurs. Mais, tandis que les prélats continuent de vivre comme des seigneurs, le petit clergé, lui, souvent inculte, mène une vie misérable.
Inversement, le clergé régulier continue son expansion ; après le succès de l'ordre de Cluny, de nouveaux ordres apparaissent.
Le succès le plus foudroyant est celui de l'abbaye de
A la fin du XIIème siècle, en réaction à la fois à l'abandon des meilleurs qui se réfugient dans des cloîtres,
et à un clergé séculier ou trop inculte, ou trop absorbé par des préoccupations temporelles, certains fidèles trouvent refuge
dans des "hérésies" :
Si l'on construit des châteaux forts, des ponts etc., l'essentiel de l'architecture est de nature religieuse.
Les chefs d'œuvre de l'art roman naquirent entre 1050 et 1150 ; citons notamment la Cathédrale Saint-Front de Périgueux
©Michèle Tillard, cathédrale Saint-Front de Périgueux, 2008.
Dans le même temps, l'art gothique émerge peu à peu ; en 1130, il est adopté pour la cathédrale de Saint-Denis.
Le vitrail existait dès l'époque romane ; mais avec l'art gothique, il prend une importance considérable.
Ces écoles ne cherchent pas à innover ; elles enseignent les "arts libéraux" en deux cycles :
Elles visent seulement à former des prêtres instruits ; mais elles manquent du contact avec la réalité vivante.
Implantées dans des villes en pleine expansion, au carrefour de toutes les influences, Angers, Tours, Orléans, Chartres et surtout Paris, elles se tournent vers l'avenir et n'étudient plus seulement les classiques pour l'apprentissage du latin. De nouveaux domaines de recherche se développent : les mathématiques (à Chartres), la médecine (à Montpellier), la philosophie (à Paris).
Avant 1150 éclate la
la littérature profane était née avec les
La
La littérature profane se compose pour l'essentiel de trois "matières", d'ailleurs intimement liées entre elles :
Mais cette classification, que nous devons au poète Jean Bodel, n'est pas étanche ; ainsi le nain Obéron, fils de Jules César et de la fée Morgane, incarne à lui seul l'ensemble des trois "matières" !