Diderot, « Supplément au voyage de Bougainville » (1772)

Diderot par Van Loo

Denis Diderot par Van Loo (1767 )

Textes étudiés Synthèses

Structure du Supplément

Chapitre I (p. 141-147 éditions GF)

  • Dialogue entre A et B :
    • Petite introduction : variation sur le temps qu’il fait (1/2 page)
    • Jugement sur Bougainville : les raisons de son expédition (1/2 page)
    • Réflexion sur les observations qu’il rapporte
    • Réflexion sur les réactions d’un Tahitien que Bougainville ramena en France : celui-ci s’y est ennuyé, et juge fous les Européens : transition (è cf. Montaigne : Les Cannibales)
    • Présentation du Supplément : on annonce la lecture de ce livre, et en particulier les adieux du vieillard.

Chapitre II (p. 147-153)

  • Présentation du vieillard, et son discours (environ 5 pages =>Texte 1)
  • Dialogue de A et B sur ce discours :
    • Accueil des Tahitiens aux Européens (incident de la jeune femme déguisée)
    • Annonce du dialogue entre Orou et l’aumônier.

Chapitre III (p. 153-167)

  • B lit à A le dialogue entre Orou et l’aumônier.
    • L’aumônier refuse l’offre d’Orou, puis cède malgré lui ;
    • 2ème discussion entre Orou et l’aumônier : ce dernier tente de faire comprendre au Tahitien ce que sont la religion, la prêtrise, les lois de son pays. Orou à son tour explique les lois et coutumes de Tahiti : (è Texte 2)
      • p. 155-157 : l’aumônier tente d’expliquer ce qu’est Dieu (dialogue)
      • p. 157-159 : discours d’Orou, les objections de la raison
      • p. 159-160 : l’aumônier répond aux objections et aux questions d’Orou (dialogue)
      • p. 161-164 : Orou à son tour explique ses lois : discours + dialogue.
  • Interruption de A ; après une explication de B, intermède (B précise les lois de Tahiti)
  • B raconte l’histoire de Polly Baker, par antithèse avec le dialogue précédent entre Orou et l’aumônier (è texte 3) ; réflexions de B et de A. (p. 165-167)

Chapitre IV (p. 167-177)

Nouveau dialogue entre Orou et l’aumônier :

  • Orou voit ses valeurs contestées par celles de l’aumônier, et surtout vice-versa (p. 175 : deux systèmes de valeurs s’opposent) ;
  • Condamnation de la religion et de la vie monacale par Orou (cf. Diderot, La Religieuse).
  • Fin du chapitre : l’aumônier, agité de remords, cède comiquement (cf. la veine libertine du 18ème siècle, de Laclos à Crébillon et aux Bijoux indiscrets… sans parler de Sade).

Chapitre V (p. 177-186)

Dialogue entre A et B.

  • B raconte les conclusions de l’aumônier : conséquences de ces coutumes et de ces valeurs morales ;
  • La seule loi raisonnable est la loi de nature ;
  • Ce qu’il y a de naturel et de frelaté dans l’amour à l’Européenne ;
  • Avantages et inconvénients de la vie civilisée et de la vie « sauvage » : faut-il choisir ? faut-il une révolution ? L’attitude du sage (è texte 4)

On passe donc d’une critique du colonialisme, injustifié − illusion de croire en une supériorité européenne − à une critique de la religion, de la société, des distorsions entre loi naturelle, loi sociale, loi religieuse, qui mènent à des absurdités et à des déchirements moraux, et enfin à une critique des valeurs morales non fondées sur la raison et la nature, donc injustifiables.

Mais cette condamnation ne doit pas conduire à une révolution violente, qui ne ferait que changer une dictature en une autre.

Le livre lui-même, par la critique qu’il apporte, est action, la seule valable.

Chapitre I, p. 141-142 jusqu’à « langue des marins »

Cette 1ère partie est un jugement littéraire : pour l’essentiel, un article que Diderot avait écrit à la demande de Grimm sur le Voyage de Bougainville, et qui n’a pas été publié.

Deux parties :

  1. jusqu’à « toujours »
  2. jusqu’à « la langue des marins »

Cf. Mme de la Carlière, dialogue où deux interlocuteurs parlaient du temps dans les mêmes termes, qui était une réflexion sur la liberté sexuelle, dans un décor identique.

Cette discussion physique et météorologique rappelle Fontenelle (« Irons-nous sur la lune ? », Entretien sur la pluralité des mondes)

Le dialogue est placé sous le signe de la déception (« ne nous a pas tenu parole », l. 3), liée au brouillard qui gêne la vue : paysage symbolique. Le dialogue est placé sous le signe de la lucidité.

La réflexion prolonge celle de Montaigne : le Tahitien rappelle le Cannibale des Essais. Réflexion sur la diversité des mœurs. Les mœurs françaises paraissent plus étranges que les mœurs  étrangères.

« traverse l’éponge » (l. 10) : air saturé d’eau que le brouillard peut ou non traverser.

Que représentent les interlocuteurs ? A est-il l’opinion commune ? A diffère de B par son caractère : A est impatient et pessimiste, B patient et optimiste. Diderot oppose des gens d’humeur différente, mais plus par leur expressivité que par leur intériorité. La pensée de Diderot se cherche en s’exprimant ; le paradoxe est un instrument de la recherche intellectuelle.

A : « bizarrerie apparente » (l. 29), c’est-à-dire seulement apparente ; B répond « comme vous et moi » (l. 27) : B se moque de sa propre activité. Le livre est sous le signe de la curiosité, de la réflexion ; planche // parquet (l. 27-28) : l’activité du voyageur est semblable à celle du philosophe ; « lesté, d’un bord… » (l. 35-37) : à travers Bougainville, on nous présente une image du philosophe, contraire du philosophe misanthrope de Rousseau. L’aventure de l’esprit vaut celle de la mer.

  Lecture non dogmatique de ce livre : la civilisation est à la fois la pire et la meilleure des choses… et de même la vie primitive.

La philosophie = réflexion critique sur les activités humaines. Nihil humanum a me alienum puto, disait Térence. Lire l’article « Philosophe » de l’Encyclopédie ; Diderot n’instruit pas, il inquiète et pose les problèmes. Ironie de Diderot sur « le lest du vrai Français » : les maths et un voyage autour du Monde !

« A : Que pensez-vous de son Voyage ? » (l. 40)

« Notre vieux domicile » : relativité.

Double avantage : pour les navigateurs (cartes et sûreté dans les Océans), et pour les curieux et les philosophes. Il ne développe que le premier.

« Les lumières nécessaires » : siècle des Lumières, connaissance et ouverture d’esprit. Ne peut voir que celui qui est préparé à voir. Repris par « philosophie ». Il faut aussi avoir le courage de dire des choses qui seront mal acceptées. Vérité = sincérité ; il faut à la fois de la promptitude et son contraire, la patience.

« Désir de voir, de s’éclairer / et d’instruire » (et non « de s’instruire », Pléiade).

« Style sans apprêt » (l. 55-56) : celui qu’il veut donner au Supplément.

Chapitre I, p. 145-147 : « avez-vous vu le Tahitien »… « vous le saurez »

  Le lecteur, par la 1ère phrase, s’attend au « procédé de l’œil neuf » : Lettres persanes, L’Ingénu… « transporté » (l. 2) avec un complément de personne = le plus grand dépaysement. « soit que… soit que… » = deux fois l’idée d’erreur, imposée volontairement (« on lui en eût imposé ») ou naturelle. Aotourou n’a quitté Tahiti que parce qu’on l’a trompé ou qu’il s’est trompé. Idée selon laquelle chacun se trouve bien chez soi (cf. l. 18-22).

« L’usage commun des femmes » : qui n’a jamais voyagé n’imagine pas des mœurs autres que les siennes. Mythe d’un communisme primitif, déjà présent chez Platon. En réalité, plus les civilisations sont primitives, plus les mœurs sont complexes et contraignantes (cf. Levi-Strauss et l’ethnologie moderne).

« s’ennuyait » : sens très fort = profonde mélancolie.

« L’alphabet tahitien… » (l. 14) : préoccupation du siècle : l’origine des langues. Ce sont les tous premiers balbutiements de la linguistique (cf. Genette). Rousseau écrit un Essai sur l’origine des langues.

Diderot a raison sur un point : le système phonétique d’une langue est une structure, un système clos ; il est donc très difficile de prononcer des phonèmes qui n’existent pas dans sa propre langue ; mais il confond graphèmes et phonèmes !

Diderot, l. 18-25, indique quelle lecture on fait des récits de voyage : par goût de l’exotisme, ou pour se conforter dans la bonne opinion que l’on a de son pays. Au moment des Grandes découvertes, on ne lisait pas de tels récits.

Ici (l. 26-28), A s’amuse (pour une fois, il est le plus intelligent). Assonance et allitération « quoi, croyez, croisse ». Presque une paronomase !

Réponse de B : Diderot ne veut rien démontrer, son opinion n’est pas faite. Ce qui l’intéresse, c’est la quête. Voir le Neveu de Rameau. Malgré les coq-à-l’âne, un seul problème : l’œil neuf.

« Concevoir » (l. 37) : parce que son langage ne s’y prête pas. Lien étroit de la pensée et du langage.

Lignes 45 et suiv. : 3 idées fausses.

  1. simplicité des sauvages ~ complexité des sociétés modernes. Or l’on sait l’extrême complexité des liens sociaux, fondée sur des millénaires de culture, par exemple des Aborigènes ;
  2. comparaison entre l’histoire des sociétés et l’histoire biologique d’un individu, datant du 16ème siècle, et très à la mode. Grandeur et décadence (cf. Montesquieu)… Or une société ne meurt pas de vieillesse, mais par élimination ou accident (invasions…)…
    Diderot mélange une comparaison mécanique (or aujourd’hui on sait que les machines complexes marchent mieux) et une comparaison biologique : deux idées débattues par Rousseau et Diderot lors de l’emprisonnement de celui-ci à Vincennes. Rousseau en fait un usage philosophique (Discours sur l’origine de l’inégalité) ; Diderot les essaie, en fait un usage poétique et moral.
  3. À propos de la liberté et de l’aliénation : Pour Diderot, comme pour Rousseau, la liberté est un sentiment inné (cf. Discours sur l’origine de l’inégalité) ; or c’est discutable. La liberté est une conquête humaine ; elle est difficile, au point que beaucoup ne souhaitent pas être libres. Sentiment : un instinct dont on prend conscience.

Mélange d’idéologie et de conquêtes scientifiques ; le transformisme est dans l’air, avec des aspects dangereux.

Ce qui est positif dans l’œuvre de Diderot, c’est la critique.

« On se rend ridicule, mais on n’est ni ignorant, ni sot, encore moins méchant pour ne voir jamais que la pointe de son clocher ». Diderot ne se fait aucune illusion sur l’idylle de la vie sauvage : prosopopée de l’Indienne de l’Orénoque.

Aucune pensée n’est chez Diderot privée de son antithèse = aspect ludique. Il essaie toutes les idées (cf. le Neveu de Rameau), jeu qui mène à une critique de la réalité.

  Ici, les rapports sociaux entre les Parisiens du 18ème siècle sont des « entraves » (l. 51) ; mais on arrive à vivre … Il en fait voir les défauts et les qualités (cf. p. 186).

Retour de la métaphore du brouillard : Diderot veut remuer assez d’idées pour que le brouillard intellectuel dans lequel nous vivons se dissipe.

A a-t-il tort ? il ne se laisse pas prendre aux fables : il est le philosophe, l’esprit le plus fort ; les rôles sont interchangeables. Ce qui différencie A et B, ce sont les traits d’humeur. A est le souffre douleur de B (humour : « j’ai toujours tort avec vous ! » (l. 66-67).

De « tenez, tenez » à « vous le saurez » (l. 69-75) : ménage une transition avec la suite.

Mise en abyme : le Supplément est pour nous l’œuvre complète, or il est dans l’œuvre (« là, sur cette table »). Jeu pictural baroque (les Ménines de Vélasquez), puis théâtral (l’Illusion comique, les Acteurs de bonne foi de Marivaux), enfin littéraire, qui détruit la réalité en même temps qu’on la crée. Diderot s’amuse : la sincérité de Bougainville… prouvée par un Supplément apocryphe ! (l. 57).

« Vous le saurez » souligne la gratuité de l’échange d’idées : le discours du vieillard est présenté comme faux, invraisemblable. (repris plus tard, p. 151 : « abrupt et sauvage », définition de la poésie pour Diderot)

Conclusion : optimisme de Diderot. Toute société est mauvaise, mais toutes les sociétés sont bonnes d’un certain point de vue. Elles sont vivables. Jeu des idées. Le Supplément se présente comme une méditation après une lecture (titre excellent : quand un livre a du succès, des quantités de suppléments). Diderot surpasse Rousseau et sa « Prosopopée de Fabricius ».

Rêverie très libre après la lecture. Distanciation à la Brecht : pour critiquer quelque chose, il faut être dehors et dedans, acteur et témoin.

Déchirement de s’arracher à son pays : fiction littéraire pour cela, pour libérer l’esprit. Cf. l’Ingénu de Voltaire !

Au 18ème siècle, on déteste les livres ennuyeux.

Discours du vieillard tahitien (chapitre II p. 148-151)

Les Européens vus par le vieillard :

« chef des brigands » ; opposition des personnes : « nous » ~ « tu » ; fureur / féroce.

  • Fureur et violence :
    • vocabulaire de la violence :cf. ci-dessus, + « haïr, égorger, sang »…
  • Propriété et vol :
    • mettre des hommes en esclavage (l. 15-16) ; « t’emparer comme de la brute »
    • propriété du sol ~ vol de toute une contrée
  • Facticité, superficialité, superflu, mensonge :
    • « prêché », l. 6-7 ; « inutiles lumières »
  • Le problème du travail.

Autoportrait du Sauvage : opposition d’un système de valeurs à un autre.

  • Absence de propriété privée :
    • « tout est à tous », y compris filles et femmes. Pas d’agressivité : ce sont les Européens qui « enseignent la violence ».
  • Egalité des hommes :
    • « Ton frère », « deux enfants de la Nature »
  • Sentiment de la justice, dignité
    • Réciprocité, l. 18-22, 23-26, 27-30.
  • Sagesse des moeurs :
    • cf. le dernier § : « êtres sensés » l. 46
  • Hospitalité : « tu as partagé », « tu es entré dans nos cabanes »…

Une image de l’Etat de Nature.

Il s’agit ici d’une fiction : discours à l’occidentale (ce qui sera souligné par A et B) ; aucun détail concret : ce n’est pas la civilisation tahitienne qui intéresse Diderot, mais un IDEAL, qui appartient au mythe du Bon Sauvage.

Propriété collective ou absence de propriété : cf. Rousseau ; il s’agit d’un état antérieur à la propriété. Cependant, on ne trouve pas ici les mêmes conséquences que dans le Discours sur l’inégalité de Rousseau ; chez celui-ci, l’homme d’avant la société vivait isolé ; pour Diderot, il y a une forme de société collectiviste primitive.

Le problème du travail : satisfaction des besoins vitaux ~ luxe, besoins superflus (idée importante de « création des besoins »). L’opposition entre repos et travail est une opposition de valeur :

  • repos = être = jouir
  • travail = s’agiter, se tourmenter pour posséder des biens.

On est ici très proche de Montaigne et de Rousseau, mais très loin de Voltaire, qui préfigure la valeur bourgeoise accordée au travail, à l’industrie.

Dialogue de l’Aumônier et d’Orou (ch. III, p. 157-160), de « ces préceptes singuliers » à « … ne réclame pas ses droits » (texte 3)

Plan du premier discours d’Orou :

  1. les préceptes de l’aumônier (chasteté, fidélité, mariage…) sont à la fois contraires à la nature et à la raison.
    1. Contraires à la nature : un être humain ne saurait appartenir à un autre
    2. contraires à la “loi générale des êtres” : dans un univers soumis au changement, aucune loi ne peut imposer une constance éternelle.
  2. Magistrats et prêtres ne peuvent définir le bien et le mal, édicter des lois contraires à la nature :
    1. des hommes ne peuvent décider du bien et du mal :
    2. si c’était le cas, ces notions seraient arbitraires et changeantes (allusions aux lois et interdits religieux)
    3. … Et que faire en cas de désaccord entre ces différents législateurs ?

==> seule la nature peut décider du bien et du mal, en fonction de critères absolus.

Le deuxième discours dresse un réquisitoire contre la société

Orou devine ce que Diderot dénonce : les nécessaires dysfonctionnements liés à des lois contraires à la nature.

Dans ce passage, étudier :

  • les marques de jugement
  • les procédés oratoires (symétries, antithèses, accumulations, rythmes…)
  • l’usage des temps verbaux

Apologue de Polly Baker

Qui parle ? Retrouvez dans cette histoire les marques d’énonciation (marques personnelles, marques de jugement, modalisateurs, déictiques…) ; indiquez les différents niveaux d’énonciation :

  • le narrateur de l’histoire
  • le discours de Polly

Le discours de Polly : indiquez sa composition. Montrez, en relevant plusieurs indices, qu’il s’agit d’un plaidoyer. Pour quelle cause plaide Polly ?

En quoi l’histoire de Polly Baker constitue-t-elle un apologue ? Quelle en serait la moralité ?

Quel rôle occupe cet apologue dans l’argumentation de Diderot à propos des lois naturelles ?

Excipit : « ainsi vous préféreriez… => fin du chapitre V.

La 1ère phrase fait la liaison avec ce qui précède. « préféreriez » : interrogation implicite. A doute des idées de B (conditionnel). Il ne s’agit pas ici d’un choix, mais d’une préférence, comme si le choix était indifférent, affaire de goût. Conclusion du dialogue : vocabulaire du choix moral (préférer, prononcer, conclure, incliner, trouver, indiquer => unité de la page.

Les tabous les plus forts de notre société sont ceux concernant la sexualité : Diderot s’y attaque ; cf. la 3ème partie du Rêve de d’Alembert.

L’état de nature brute : cf. Discours sur l’origine de l’inégalité de Rousseau (1755). Cette question marque l’étonnement. Cf. au début « est-ce que vous donneriez dans la fable de Tahiti ? » p. 146. « Ma foi » précède et atténue l’énonciation de vérités scandaleuses. Expression ironique de la pensée : « se dépouiller », puis « se vêtir » (l. 3-6).

Arguments de faits, même s’ils sont totalement contradictoires.

  1. Equation toujours égale : en augmentant les plaisirs d’une société, on en augmente dans la même proportion les maux : beaucoup de peine pour rien (« efforts » l. 11). Derrière l’opposition homme naturel / homme social se cache l’opposition individu / société. Diderot renouvelle cette opposition par celle individu / espèce. Avantage à l’état de nature.
  2. Mais argument contraire (« cependant », l. 15) : la vie civilisée allonge la durée moyenne d’existence. Il reprend souvent cet argument, mais n’hésite pourtant pas, ici, à le contester : est-ce une norme ? (comparaison avec une machine)
  3. Lieu où l’on est le plus libre, sans tabous : Tahiti (vision utopique de la vie primitive)…
  4. … mais aussi Venise !

Diderot retrouve Voltaire et présente les deux aspects antagonistes du progrès. Prudence : « il m’est souvent venu dans la pensée… », « peut-être »…

La conception d’une durée moyenne de vie est toute nouvelle à l’époque : argument au départ d’un débat qui dure aujourd’hui encore (cf. Lévy-Strauss). Diderot présente des arguments pour et contre, et se garde de choisir. Ligne 21 : retour du conditionnel. « Je vois » signifie « dois-je voir ? »

« Parcourrai » = par l’esprit.

Diderot pose le problème de bonheur, et le fait comme le ferait Rousseau, pour qui tout va bien si l’homme est heureux. Il n’en est pas de même pour Voltaire (l’essentiel est que la condition de l’homme soit supportable ; cf. Candide) ; Rousseau est plus exigeant, mais aussi plus optimiste que Voltaire !

« Venise » : représente à l’époque le gouvernement d’oppression aristocratique.

Ces arguments sont fragiles, mais Diderot ne résiste pas au plaisir de les essayer.

« Je ne m’attendais pas à l’éloge de ce gouvernement » = litote. Diderot présente un paradoxe énorme : dire que le meilleur gouvernement d’un pays civilisé serait comparable à celui de Venise. Diderot, ~ Rousseau, ignore la pensée dialectique. Pourtant, ici, il en est tout proche.

« Les Grecs proscrivirent… » Diderot reprend ici Montaigne (I, ch. 23). Partout où il y a des lyres, il y a des cordes = métaphore : partout où il y a une société, il y a des lois arbitraires.

Diderot cite ensuite des personnages (connivence avec les lecteurs de son époque) :

  • Reymer, Gardeil : figures atroces, équilibre entre les sexes : un homme, une femme.
  • Tanié, Mlle de la Chaux : ce qu’il y a de sublime dans le dévouement amoureux ;
  • Le Chevalier Desroches : homme admirable, mais incapable de s’attacher sérieusement à une femme ;
  • Mme de la Carlière : femme admirable, mais qui a trop lu la Princesse de Clèves.

La morale artificielle produit chez l’homme le meilleur et le pire. « dépravation » (négatif) et malheur (connoté plus positivement). Diderot a pris des personnages fictifs, pour renvoyer à sa propre œuvre.

« Nous parlerons… » l. 61 : style et pensée de Montaigne. « Réformer » = changer complètement. « Celui qui… » (l. 63) = pensée de Socrate (Criton) qui meurt pour garantir les lois. Il faut obéir aux lois, non parce qu’elles sont justes, mais parce qu’elles sont les lois.

« Etres fragiles » : les Tahitiens. Leur société est fragile, il ne faut pas y toucher.

Le philosophe est présenté comme un être sociable, non révolutionnaire.

Retour (l. 79) du brouillard métaphorique : il tombe, il n’y a eu qu’une éclaircie.

Le dialogue se termine par une pointe.

Pour comprendre le Supplément, il faut lire Sur les femmes, qui prolonge la réflexion de Montaigne sur le même sujet. Lire aussi le passage sur le sublime dans le Neveu de Rameau.


Le Supplément au Voyage de Bougainville a-t-il une dimension ethnographique ?

Dialogue entre A et B à propos de Bougainville, p. 142-144 (27-30)

Pour être un bon explorateur, il faut d’abord de solides connaissances scientifiques, et en particulier mathématiques : « un véritable Français, lesté […] d’un traité de calcul différentiel et intégral… » ; il faut en outre « de la philosophie, du courage, de la véracité », des qualités d’observation, de la curiosité, et des connaissances scientifiques : mécanique, géométrie, astronomie, histoire naturelle. Rien n’est dit de la connaissance des hommes : l’ethnographie est encore en train de naître.

Les premières observations rapportées portent sur les animaux sauvages (p. 143), puis sur  ce que nous appellerions aujourd’hui la dérive des continents. Elles concernent donc la zoologie et la géographie.

À propos de l’Île des Lanciers, Diderot mentionne le cannibalisme et l’infibulation des femmes, pures hypothèses ici, et qu’il attribue à la nécessité vitale de réduire la population dans un espace trop petit. Il s’agit ici de spéculations, et non d’observations.

À propos des Patagons : Où se trouve la Patagonie ? Quelle observation de Bougainville est ici rapportée ? Avec quelles réserves ? Montez que l’on trouve ici une première occurrence du « mythe du bon Sauvage ».

La Patagonie se trouve à l’extrême sud du Chili ; Diderot rapporte l’observation de Bougainville sur le physique étonnant de ces hommes, mais il met en doute la véracité de ce rapport, exagéré selon lui (cf. p. 145/34). Le mythe du « bon Sauvage » apparaît dans ce même passage :

« C’est, à ce qu’il paraît, de la défense journalière contre les bêtes féroces qu’il tient le caractère cruel qu’on lui remarque quelquefois. Il est innocent et doux, partout où rien ne trouble son repos et sa sécurité« .

A propos d’Aotourou : qu’est-ce que « la fable de Tahiti » ? Quelle est la part de l’observation ethnographique ici ? La « fable de Tahiti » consiste à croire que la société Tahitienne, « qui représente l’enfance de l’humanité », soit simple et innocente. L’ethnographie contemporaine a au contraire montré la complexité extrême des sociétés dites primitives – et leur ancienneté. Lire à ce sujet Tristes Tropiques, de Claude Lévi-Strauss.

On trouve cependant dans ce passage une petite part d’observation ethnographique : sur la langue tahitienne (bien que Diderot semble confondre écriture et phonétique), sur « l’usage commun des femmes », et sur la difficulté à concevoir une réalité que l’on ne peut nommer (Umberto Eco a fait la même remarque à propos de Moctezuma dans Kant et l’Ornithorynque, Grasset, Paris, 1997, p. 131 et suiv.).

Discours du vieillard tahitien, p. 147-151 (39-47)

Relevez dans ce discours tout ce qui peut donner une idée des mœurs, coutumes, objets usuels… de la société tahitienne. Diderot donne-t-il une image précise de ces usages ? (habitat, économie, fêtes, religion, arts…)

  • L’on retrouve ici l’usage commun des femmes, quelques mots sur l’habitat (« nos cabanes »), les armes (arcs et flèches), le mode de vie : goût du repos, absence de maladies, et une allusion à une cérémonie de passage à l’âge nubile pour les jeunes filles : la mère « relève le voile » de la jeune fille.
  • Aucun de ces points n’est développé ; repos et santé semblent se référer au mythe du « paradis terreste » ou de l’âge d’or, et les autres mentions sont si générales qu’elles pourraient s’appliquer à n’importe quelle société non européenne.

Diderot reste dans le flou pour plusieurs raisons :

  • Pour donner un caractère d’universalité au discours du vieillard, dont A souligne peu après qu’il semble bien peu réaliste dans la bouche d’un vieillard tahitien, en principe non formé à l’éloquence romaine ;
  • parce que le but est la dénonciation de la société européenne, et non la peinture de la société tahitienne ; il ne faut donc pas disperser l’attention du lecteur ;
  • enfin, parce qu’il faut donner de cette société tahitienne une image idéale, en gommant des réalités qui pourraient lui être moins favorables.

Dialogue entre Orou et l’aumônier, 1ère partie, p. 153-160 (53-62) :

Qu’apprenons-nous sur les mœurs tahitiennes ? Dans quel domaine se situent les observations rapportées par Diderot ? Nous apprenons les règles d’hospitalité : l’hôte se voit offrir l’épouse et les filles de celui qui le reçoit ; l’on apprend également qu’avoir un enfant hors de tout lien de mariage, loin d’être un déshonneur, est ici une chance, et que ces enfants constituent une partie de la dot ; que le mariage en Tahiti n’est pas conclu pour une vie entière, mais se rompt dès que les époux le souhaitent ; en somme que les Tahitiens jouissent de la plus grande liberté sexuelle. L’intérêt de Diderot porte donc essentiellement sur les relations interpersonnelles et familiales.

Que pouvons-nous déduire des questions et des remarques d’Orou sur la société européenne ? – notamment en matière de religion et d’institutions. On peut déduire des questions d’Orou que Tahiti ignore les prêtres, et les magistrats, et n’a qu’une idée très approximative de la notion de Dieu.

Diderot imagine donc une société tahitienne très proche de ce que l’on pensait être « l’état de nature » : une société sans lois, sans institutions répressives, sans prêtres ni religion autre que « naturelle »… Il s’agit bien entendu d’une utopie.

Dialogue entre Orou et l’aumônier, 2ème partie p. 161-165 (62-66) :

Qu’apprenons-nous :

  • sur l’organisation sociale, l’économie ? : il s’agit d’une société rurale, (p. 161 : « un agriculteur, un pêcheur, un chasseur… » de type matriarcal : « une femme emmène avec elle ses enfants qu’elle avait apportés en dot ».
  • sur les relations familiales : des relations assez égalitaires entre l’homme et la femme au sein du couple ; mais la femme semble avoir essentiellement pour rôle d’avoir des enfants.
  • sur la place de l’enfant dans la société tahitienne : l’enfant est au centre de la société tahitienne : toujours considéré comme un bien, il n’est jamais objet d’opprobre, ni abandonné.
  • sur les cérémonies : la plus importante semble être celle qui consacre le passage de l’enfance à l’âge nubile, pour les garçons et les filles : grande fête, au cours de laquelle les jeunes gens peuvent se choisir un partenaire (p. 163-164 / 65-66)

Tout l’intérêt de Diderot porte donc, ici encore, sur la question de la liberté sexuelle, du mariage, et des relations familiales. La description qu’il donne de la cérémonie évoque des fêtes de l’âge d’or, et une société plus mythique que réelle.

Là encore, l’ethnographie contemporaine rapporte plutôt des règles de mariage extrêmement contraignantes, et des liens de parentés très compliqués dans les sociétés dites primitives, telles que les indiens du Brésil (Tristes Tropiques)

Dialogue entre Orou et l’aumônier, 3ème partie p. 167-177 (71-80)

Quels sont les interdits dans la société tahitienne ? Comment s’expriment-ils ? Comment leur transgression est-elle châtiée ? La société tahitienne vous semble-t-elle répressive ? Les interdits touchent tout ce qui a trait à des relations sexuelles non fécondes : avec des personnes stériles, pendant la période des règles ou durant la grossesse. Ceux qui transgressent ces interdits n’encourent pas d’autre châtiment que le blâme : la société tahitienne ignore la répression !

Quels tabous sont ignorés de la société tahitienne ? Diderot vous semble-t-il approuver cette ignorance ? Les Tahitiens, selon Diderot, ignorent l’adultère (puisqu’on peut rompre un mariage à volonté) et l’inceste, « qui ne blesse en rien la nature » – on ignorait les dangers de la consanguinité ! Aux yeux de Diderot, de tels interdits, non fondés en raison, sont absurdes.

Cette description des mœurs tahitienne vous semble-t-elle relever de l’observation scientifique, ou de la « fable de Tahiti » ? Cette description semble relever davantage d’une observation superficielle, et d’une utopie, que d’une observation sérieuse de la société tahitienne ; l’absence d’institutions, de religion, de tabous ne plaide pas en faveur d’une réelle observation.

Mais la fonction de ce texte n’est pas de nature ethnographique : il s’agit seulement de construire une utopie, dont le but est de proposer un contre-modèle de la société européenne, et de dénoncer les tares de celle-ci ; dès lors, il importe peu que l’image de la société tahitienne soit conforme à la réalité ; il suffit qu’elle ne contredise pas les observations des navigateurs, et qu’elle soit cohérente.

Les philosophes ne s’intéressent pas réellement à la société qu’ils observent, moins en tous cas que Montaigne : cf. le chapitre « Des Cannibales » (I, 31) : celui-ci allait jusqu’à s’intéresser à la nourriture, aux vêtements… Rien de tel chez Diderot, ni, on le verra, chez Voltaire (L’Ingénu) : il s’agit simplement de donner un contre-modèle de la société française, positif chez Diderot, négatif chez Voltaire. D’où le peu d’intérêt pour les objets concrets, les coutumes, les institutions (chez Diderot, on pourrait croire qu’il n’y a pas de gouvernement, ni de chefs !) et l’art de ces peuples : le mot n’est même pas mentionné, ni chez Voltaire, ni chez Diderot !

Le vrai Bougainville à Tahiti

Biographie

Né à Paris en 1729, Louis Antoine de Bougainville était un navigateur. Le 12 Octobre 1754, il est nommé secrétaire d’ambassade à Londres. Premier aide de camps de Montcalm en 1756 aux côté de qui il combattit aux plaines d’Abraham en 1759, il devint capitaine de frégate en 1753 et tenta en vain de coloniser les îles malouines(1763-1765).

En 1766, il partit de Brest à bord de la frégate la Boudeuse, gagna l’Amérique du sud et le détroit de Magellan, atteignit Tahiti en 1768 où il resta 10 jours. Le 15 mai 1771, il publia le récit de son voyage autour du monde qui développa le mythe du « paradis polynésien « .

Rentré à St Malo en 1769, Bougainville, premier capitaine français à avoir effectué le tour du monde, fut promu chef d’escadre en 1779 et resta fidèle à Louis XVI lors de la révolution.

Il mourut à Paris en 1811.

Le Supplément au voyage de Bougainville de Diderot

Le Supplément au voyage de Bougainville est le troisième texte d’une série composée par Diderot en 1772 et conçue comme un ensemble :

  • Ceci n’est pas un conte
  • Madame de Carlière
  • et le Supplément au voyage de Bougainville.

Le Supplément se présente comme une méditation après une lecture. Le texte de Diderot apparaît comme un débat d’idées. C’est  une réflexion philosophique sur les questions que Diderot se posait en ce qui concerne les lois naturelles.

En mettant en scène un débat entre un sauvage et un européen, Diderot, grâce à la double énonciation, exprime ses idées philosophiques sur la société dite  » civilisée « .

Bougainville à Tahiti

Tahiti, un paradis terrestre

  • Bougainville découvre Tahiti et ses habitants.
  • Lorsqu’il arrive sur l’île, il la voit comme le paradis sur Terre. Cf. p235  » Je me croyais transporté dans le jardin d’Eden « 
  • Il garde le souvenir d’un endroit magnifique où les gens sont gentils, accueillants. Pour lui, c’est une nouvelle définition du bonheur.

La population tahitienne

  1. Un accueil animé qui surprend (dans le bon sens) les Européens : Bougainville insiste sur la gentillesse des tahitiens.
    Cf. p 229 « nous fûmes reçus par une foule immense d’hommes et de femmes  »

    1. Il insiste beaucoup sur le fait qu’ils venaient en grand nombre pour les accueillir en utilisant les mots qui généralisent.
      Cf. p 231  » Le chef et tout le monde  » ;  » tous les hommes, toutes les femmes  » ;  » tous ceux « 
    2. Personne n’est laissé au hasard : pour Bougainville, c’est une gentillesse générale. Les Tahitiens sont heureux de recevoir les Européens et ça se sent par leur hospitalité. Ils les invitent dans leur maison. Cf.p 229  » Le chef de ce canton nous conduisit dans sa maison et nous y introduisit  » Ils leur donnent à manger. Cf.  » Le chef nous proposa ensuite de nous asseoir sur l’herbe,…où il fit apporter des fruits, du poisson grillé et de l’eau « .
    3. Et surtout, ils leur offrent des jeunes filles. Cf. p 226  » ils nous pressaient de choisir une femme, de la suivre…  »
      On peut dire que le mot clef, ici, c’est l’hospitalité.  Les Européens ont été très étonnés par la beauté et la simplicité des habitants.
  2. Le naturel des habitants.
    1. Ils n’y a aucune pudeur, ils ne cachent rien. Ils ont la réputation d’être curieux. Ils ne se lassent pas de les considérer.
      Cf. p 227  » Ce peuple qui examinait en tumulte toutes les parties de son corps  » ;  » Après l’avoir bien considéré ils lui rendirent ses habits « 
    2. Ils ne se cachent pas de cette curiosité. Certains n’hésitaient pas à venir les toucher, écarter leur vêtements. Ils tenaient à savoir si ils étaient tous identiques à eux.
    3. Ils ne sont pas embarrassés et n’hésitent pas à s’exhiber.
      Cf. p 225  » La plupart de ces nymphes étaient nues, car les hommes et les vieilles, qui les accompagnaient, leur avaient ôté la pagne dont ils étaient ordinairement elles s’enveloppent « .
    4. Les femmes se donnent naturellement aux hommes.
    5. Ils n’expriment aucune crainte, aucune méfiance. En effet, ils ne portent pas d’armes, sont pacifiques et n’hésitent pas à se promener seuls ou en petits groupes.
      Cf.p231  » Quatre insulaires vinrent avec confiance souper et coucher à bord  »
       » Aucun ne portaient d’armes ni même de bâton  »
      Ils vivent simplement et dans la nature toute la journée. Ils ne travaillent pas, tout est à leur leur portée. On a vraiment une idée du paradis. Bougainville parle du caractère doux de la nation.
  3. Impression d’être dans le jardin d’Eden.
    1. Absence de méfiance et de haine. Ils vivent en groupe au quotidien, sont très unis. Ils partagent tout, ils n’y a pas de jalousie. Les hommes et les femmes sont égaux, on ne fait pas de distinctions sauf pour le vieillard.  Il représente la voix de la sagesse donc il est plus considéré que les autres habitants. Ils vivent en harmonie entre eux. Bougainville a tendance, peut-être, à idéaliser toute cette réalité. cela semble trop beau pour être vrai.
      *Il ne semble pas régner de guerre civile par contre ils sont toujours en guerre avec les îles voisines(Cf.p225)
    2. Une nature parfaite. 
      1. Les tahitiens jouissent de ce que la nature leur donne. Cf. « La terre se jonchait de feuillages et de fleurs  » ;  » La nature berce à pleine mains  » La nature offre tout donc l’homme n’a plus rien à faire. C’est la perfection absolue, Bougainville ne voit aucun inconvénient. Une fois de plus, peut-être a-t-il tendance à idéaliser cette vie.
      2. Un lieu sain. On y vit très longtemps, on ne travaille pas ou très peu et on a tout ce que l’on veut. C’est comme si la vieillesse n’existait pas. Par exemple, le vieillard n’a de signe de vieillesse que sa couleur de cheveux et pas d’autres marques de décrépitude. Contrairement à ce qui se passe en Europe, la vieillesse ne laisse pas de trace à Tahiti.

Les personnages communs à Diderot et Bougainville.

  • Aotourou est le tahitien qui est allé en Europe avec Bougainville. Chez Diderot, B dit à A que Aotourou s’ennuyait avec les Européens. Cf. p 36  » Il s’ennuyait parmi nous  » Alors que Bougainville, lui, dit expressément le contraire.
    Cf. p 263  » Il y est resté onze mois, pendant lesquels il n’a témoigné aucun ennui  »
    Cf. p 264-265  » Le seul de nos spectacles qui lui plût était l’opéra ;car il aimait passionnément la danse « .
    Donc le personnage est le même chez les deux auteurs mais Bougainville et Diderot diffèrent sur Aotourou et sur son séjour en Europe.
  • Le vieillard est le père du chef Ereti (celui qui accueille Bougainville). Les deux auteurs sont d’accord sur le physique et le comportement du vieillard face aux étrangers. Mais chez Bougainville, le vieillard n’apparaît qu’à l’arrivée des Européens. Jamais il ne fait ses adieux comme chez Diderot.
  • Diderot fait dialoguer et débattre un sauvage, Orou, et le représentant de la pensée européenne : l’aumônier. Cependant, à la différence du texte original, le débat ne porte que sur un thème : la morale sexuelle.

Bibliographie

  • Montaigne : Des Cannibales (Essais I, 31)
  • Louis-Antoine de Bougainville : Voyage autour du monde (éditions Pockett) : lire en particulier la seconde partie, chapitres II et II (séjour à Tahiti)
  • Jean-Claude Carrière : La Controverse de Valladolid
  • Vivant Denon : Point de lendemain (édition Librio)
  • Diderot : La Religieuse
  • Diderot : Les Bijoux indiscrets
  • Laclos : Les Liaisons dangereuses
  • Claude Lévi-Strauss : Tristes Tropiques : lire en particulier les parties six, sept et huit, consacrées aux Indiens Bororo, Nambikwara et Tupi-Kawahib.
  • Rousseau : Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les Hommes
  • Jean-Christophe Ruffin : Rouge Brésil, Gallimard, 2001.
  • Voltaire : L’Ingénu