Histoire de la République romaine

Naissance de la société romaine au IIIème siècle

En 509, départ des Tarquins, rois étrusques, et – selon la tradition – , établissement de la république romaine. En réalité, les Étrusques n’auraient quitté Rome qu’en 470.

Patriciens et plébéiens

Jusqu’en 509 (ou 470), les Étrusques qui dominent Rome soutiennent la Plèbe contre l’Aristocratie patricienne qui leur dispute le pouvoir. Leur départ est donc à l’origine d’une réaction patricienne.

Les Patriciens : ceux qui appartiennent à une gens (unité élémentaire issue d’un ancêtre commun et portant le même nom : gens Claudia, gens Aurelia…) ; ils ont aussi des cultes communs. Les Familiae (Cornelii Scipiones, Cornelii Lentuli…) sont des subdivisions de la gens.

La Plèbe : tout le reste de la population.

Les privilèges des patriciens :

Les Plébéiens, à la suite du départ des Étrusques, se trouvent exclus de la plupart des institutions.

1ère crise : 494. Pour payer l’impôt, les plébéiens empruntent aux patriciens et doivent même engager leur liberté . D’où la secession sur l’Aventin, ou le Mont Sacré. Ils obtiennent alors l’abolition des dettes, la création des édiles et des tribuns de la plèbe.

493-445 : La plèbe n’a toujours pas de conubium (droit de mariage), ni de droit écrit, que seuls connaissent les Patriciens. En 451 est rédigée la loi des XII Tables, première loi écrite : c’est une victoire de la Plèbe.

445-280 :

  • En 445, la Lex Canuleia reconnaît le conubium aux plébéiens.
  • Puis les guerres des 5ème et 4ème siècles épuisent la noblesse, tandis que la plèbe s’accroît.
  • En 366 : la Lex Licinia impose la réduction des dettes, et ouvre le Consulat aux plébéiens : l’un des deux consuls devait être issu de la Plèbe.
  • En 318 : ouverture du Sénat à la plèbe ;
  • Vers 300 : Lex Olgunia, qui ouvre la prêtrise aux plébéiens ;
  • Vers 280 : Lex Hortensia par laquelle les plébiscites (= lois votées par la Plèbe) valent pour l’ensemble du Populus.

La conquête de l’Italie (5ème-3ème siècle)

Tout au long du 5ème siècle, le latium est envahi à plusieurs reprises par des populations italiques : les Èques, les Volsques, les Sabins.

Guerre contre Véiès

Véiès est une ville Étrusque ; rivale de Rome  pour la domination de la rive droite du Tibre, et les salines de l’embouchure.

  • 485-474 : les 306 Fabii vont défendre leur fief
  • 406-396 : nouvelle guerre, prise de Fidènes et de Véiès.

Les invasions gauloises

En 390, Rome est prise par un groupe de Gaulois qui franchit l’Apennin, et inflige aux Romains une défaite à Clusium (Chiusi).

Rome et Caere (Cerveteri)

Caere accueille les Vestales et les objets sacrés de Rome durant l’invasion gauloise : alliance étroite.

Les guerres samnites (343-290)

  • 1ère guerre samnite (343-338) : Rome intervient en faveur des Campaniens contre les Samnites, ce qui provoque la « guerre latine » (les Samnites contre Rome, les Latins et les Campaniens)
  • 2ème guerre samnite (326-304) : Étrusques, Gaulois et Samnites se liguent contre Rome, qui subit en 321 la défaite des Fourches Caudines.
  • 3ème guerre samnite (298-290) : en 296, le Samnium subit une première défaite : Rome se tourne alors vers le Nord. En 295, bataille de Sentinum : écrasement des Samnites et des Gaulois. Enfin, en 290, les Samnites demandent la paix.

Les guerres contre les Etrusques

  • En 311, en pleine guerre Samnite, Rome parvient à s’emparer de toute l’Étrurie intérieure : Véiès, Caere, Tarquinia étaient déjà soumises. Mais Volsinies reste imprenable.
  • 293-273 : Conquête de toute l’Étrurie.

Rome est alors maîtresse de presque toute l’Italie, à l’exception de la Grande Grèce (Tarente).

L’organisation de la conquête

Le Latium est définitivement conquis. Le sol est propriété de l’État Romain : le territoire de la Cité passe de 6 000 à 27 000 km² (conception antique de la cité-état). L’Ager publicus est peuplé par un réseau de colonies : c’est un acte du peuple, sanctionné par un senatus-consulte, qui décidait de l’emplacement choisi et du nombre de colons – entre 2 000 et 6 000 habitants. Ce sont des soldats-laboureurs, qui ont pour mission la protection de l’Ager publicus et sa mise en valeur. Les citoyens ont un droit d’usage (possessio), mais l’État reste propriétaire.

Les Latins obtiennent le ius conubii et le ius commercii avec Rome, mais pas entre eux. Certaines villes deviennent des municipes : autonomie intérieure, mais politique extérieure soumise à Rome.

Les crises de la République : les Gracques

Les causes politiques

Au second siècle avant J-C, c’est une oligarchie très stricte qui se met en place à Rome, malgré quelques apparences démocratiques :

  • Tous les votes se font par unité interne, tribu ou centurie, et non par tête ; or l’on vote de manière hiérarchique. Quand le quorum est atteint, le vote s’arrête – les plus pauvres des centuries ou des tribus n’ont ainsi jamais l’occasion de voter.
  • L’initiative des lois revient au Sénat ou aux magistrats curules.
  • Au moindre signe néfaste, les Comices, y compris les Comices tributes, peuvent être dissous.
  • La multiplication des tribunaux sénatoriaux, les quaestiones, privent le peuple de tout pouvoir judiciaire.
  • Les pouvoirs des consuls sont limités par le Sénat : l’iteratio est interdite, et la prorogatio, indispensable en temps de guerre, est décidée par le Sénat seul.

La classe dirigeante Romaine s’est ainsi montrée incapable de toute réforme, de toute ouverture, et de se dégager de ses intérêts de caste.

Des hommes remarquables vont tenter, en vain, de faire bouger les choses :

  • Scipion l’Africain (235-183) tenta de mener une politique libérale en Espagne ; philhellène, il se montrait volontiers anti-conformiste. Mais il ne fit aucune réforme efficace, et, attaqué par l’ultra-conservateur Caton, il se contenta d’un exil dédaigneux.
  • Scipion Emilien (185-129), fils de Paul Émile, et adopté par Publius Scipion, fils de l’Africain, fut, lui, un brillant intellectuel, qui réunit autour de lui un véritable cercle : l’historien grec Polybe (qui avait été son précepteur), le dramaturge Térence, le philosophe stoïcien Panétius, et son ami Laelius (cf. Cicéron, De Amicitia). Il semble avoir compris la nécessité d’une réforme profonde, mais recula lorsqu’il s’agit de la mettre en oeuvre. Le projet de loi agraire de Laelius fut retiré en 140 sur les instances du Sénat ; et dans le conflit qui opposa celui-ci aux Gracques, Scipion Émilien prit le parti des conservateurs. Il mourut mystérieusement en 129.

     Les causes économiques

  • Les guerres puniques ont brutalement fait chuter la population, notamment agricole, en Italie ; en outre elles ont provoqué un exode rural contre lequel Rome aura peine à lutter.
  • Surtout en Italie du Centre et du Sud, se forment des Latifundia, immenses propriétés souvent achetées à bas prix, notamment par des paysans ruinés et endettés.

133 : première loi agraire de Tibérius Gracchus, ou Lex Sempronia.

Elle visait à une redistribution des terres, et notamment de l’Ager publicus : elle stipulait qu’aucun citoyen ne pouvait s’adjuger plus de 500 jugères (250 hectares) de terres publiques ; le nombre de têtes de bétail était limité dans les mêmes proportions. La terre reprise aux grands propriétaires, qui seraient indemnisés, serait redistribuée en lots de 30 jugères inaliénables (15 hectares) aux citoyens pauvres, qui paieraient à l’État une redevance fixe (uectigal). Une commission de triumvirs se chargerait de la distribution.

Tibérius voulait ainsi, semble-t-il, reconstituer une classe moyenne paysanne dans l’ager publicus, notamment près de Rome, en luttant contre la dépopulation du Latium, peut-être aussi pour éviter l’arrivée massive de colons étrangers.

La lex Sempronia était modérée ; mais elle déchaîna contre elle l’ire de grands propriétaires habitués à considérer l’ager publicus comme leur domaine réservé. Le Sénat s’opposèrent à la rogatio du tribun et à l’intercessio de son collègue Octauius ; Tibérius essaya alors de faire destituer Octauius par le peuple qui l’avait élu, ce qui relève davantage d’une pensée grecque (à Athènes, les magistrats sont responsables devant le peuple) que romaine. La loi fut donc votée ; mais lorsque Tibérius voulut, contre la tradition, briguer un second tribunat consécutif, il fut assassiné par des Sénateurs, conduits par son propre cousin Scipion Nasica, qui dirigea une sanglante répression contre les Populares, sur l’ordre ou avec la complicité de Scipion Émilien.

123-121 : les réformes de Caius Gracchus.

Scipion Émilien n’ayant pas réussi à s’imposer comme un homme providentiel, et étant mort en 129, peut-être assassiné par Cornélia, sa belle-sœur et mère des Gracques, l’initiative revient à Caius Sempronius Gracchus, frère cadet de Tibérius. Celui-ci est élu tribun en 124.

Il propose un vaste plan de réformes, plus ambitieux que celui de son frère : il voulait semble-t-il mettre la République romaine au niveau de l’Empire qu’elle s’était donné, en la faisant reposer sur une base sociale plus large que celle de l’oligarchie.

  • il reprend la réforme agraire de son frère, en l’élargissant à l’Italie du Sud et même à l’outremer : ainsi voulut-il créer une colonie à Carthage.
  • Il fait voter une loi frumentaire, qui permettait des distributions de blé à bas prix – et affaiblissait le pouvoir des riches sur leur clientèle.
  • Il demande que l’on confère le droit latin aux alliés
  • Il s’attire la bienveillance des Chevaliers, en leur accordant la dîme de la nouvelle province d’Asie, et en leur transférant les quaestiones repetundarum (tribunaux d’extorsion).

Après avoir tenté d’employer contre lui les judicieuses surenchères de son collègue Livius Drusus, la Nobilitas inaugure contre lui la procédure pseudo-légale du Senatus consultum ultimum (on sait l’usage qu’en fera Cicéron contre Catilina, p. ex.) et le fait assassiner au cours d’une émeute en 121.

La Nobilitas fait ainsi la démonstration qu’aucune réforme ne peut avoir lieu par les voies légales et pacifiques. La route est donc ouverte pour des aventuriers autrement redoutables tels que Marius, puis Catilina, et surtout, par la suite, César et Antoine…

Marius et Sylla (104-79)

Marius (104-86)

Marius

Né en 157 à Arpinum (comme Cicéron !), chevalier municipal, client des Metelli, il est en 107 élu consul malgré l’opposition de Metellus.

Il se voit attribuer la Numidie : en 105, il est vainqueur de Jugurtha.

Il impose alors une réforme militaire :

  • suppression du cens, et entrée des proletarii dans l’armée
  • réorganisation de la légion, qui passe à 6000 hommes (10 cohortes de 3 manipules chacune)

C’est désormais une armée de métier, efficace et redoutable politiquement.

De 104 à 100, Marius détient le consulat illégalement durant 5 ans. Il vainc les Cimbres et les Teutons (102-101) ; mais à Rome, il s’oppose aux tribuns Saturninus et Glaucia qui veulent reprendre l’œuvre des Gracques : répression sanglante qui le coupe de son principal appui politique, les Populares.

Sylla (91-79) 

Sylla

Patricien sans argent, mais lié aux Metelli, il passe au premier plan lors de la guerre sociale : révolte des alliés (socii) contre Rome. Ceux-ci sont soutenus à Rome même par le tribun Drusus, qui propose une loi agraire, une loi frumentaire, et l’octroi de la ciuitas à tous les Italiens.

En 91, l’assassinat de Drusus provoque des soulèvements.

91-88 : guerre sociale : une confédération marsico-samnite tente de créer un État, mais l’Étrurie reste loyaliste, et Rome l’emporte.

En 89, la ciuitas sera en effet accordée à tous les Italiens. ==> Sylla monte en puissance.

88-79 :

  • En 88, les populares font attribuer à Marius le commandement contre Mithridate ; Sylla entre dans Rome avec son armée. Sacrilège, et massacre. Puis il part en Orient.
  • 87-83 : Tandis que Sylla est en Orient, les marianistes tiennent Rome : nouveaux massacres. Marius meurt en 86 ; Cinna prend sa suite.
  • Printemps 83 : Sylla revient à Rome avec 40 000 hommes : première guerre civile.

Du côté des populares : Sertorius

Du côté de Sylla : Pompée, Crassus, Metellus.

Fin 82, la victoire de Sylla est acquise.

Une dictature constituante

  • proscriptions : plusieurs milliers de victimes, dont 1600 chevaliers. Terreur systématique. Formation d’une police politique avec les esclaves des proscrits.
  • Réforme du Sénat : on y adjoint l’élite des chevaliers, ce qui le mène à 600 membres. Recrutement par promotion automatique des anciens magistrats.
  • Réforme des magistratures, dont le nombre augmente ; cursus honorum réglementé.
  • Les magistrats à imperium n’ont plus de compétence qu’en Italie (préteurs et consuls) ; ils ont l’imperium militiae l’année suivante et seulement en province.
  •  Affaiblissement des tribuns et de l’ordre équestre.
  • Romanisation de l’Italie par l’installation des vétérans. Uniformisation des municipes, dirigés par des quatuorvirs.
  • Lois morales (contre l’adultère etc.)

Départ (volontaire ?) de Sylla en 79.