Les magistrats athéniens

Les magistrats, délégués du peuple, sont à ses ordres (contrairement aux magistrats Romains). Les citoyens sont égaux, en principe sans distinction de naissance ou de fortune. Ils détiennent pour 1 an, le plus souvent non renouvelable, une parcelle d’autorité déléguée par le dèmos, et reçoivent une indemnité.

Les citoyens sont interchangeables : tout homme libre, majeur, citoyen, sain peut exercer une magistrature : tout le monde peut accéder au pouvoir, par élection ou tirage au sort, parfois combinés. Les magistratures sont collégiales, les membres sont égaux et indépendants.

Au début du Vème siècle, seuls les pentacosiomédimnes (1ère classe de citoyens, qui a un revenu de 500 médimnes de céréales ; 1 médimne = 51,84 litres) peuvent être archontes ; en 487, la charge est accessible aux chevaliers, et en 456 aux zeugites et aux métèques. 500 noms sont tirés, dont 10 archontes seront désignés. Lourdes responsabilités + docimasie devant l’Héliée, sauf pour les Archontes (devant la Boulè) + collégialité + spécialistes par fonction technique (stratèges et hellanotames sont élus).

Durant la première prytanie, après présages favorables sur la Pnyx, on vote à main levée :

  • Taxiarques (chefs du règlement), et phylarques (cavalerie) dans chaque tribu
  • Catalogistes (chargés de dresser les registres militaires)

Pour être magistrat, il faut être athénien et de père athénien, sain de corps et d’esprit, participer au culte d’Apollon Pathos et de Zeus Leukeios, faire preuve de respect filial (NB : Andocide, accusé d’avoir dénoncé son père, eût été de fait exclu de toute magistrature), avoir un tombeau de famille en Attique. L’archonte-roi doit en outre être marié à une Athénienne dont c’est le 1er mariage ; les stratèges doivent être fils légitimes d’Athénien et posséder des terres en Attique ; le trésorier doit avoir une fortune personnelle de 500 médimnes, gage d’honnêteté.

Les archontes

Ils entrent en charge le 1er jour de l’année, en prêtant serment d’obéir aux lois, de ne pas se laisser corrompre. L’archonte promet de donner à la ville, en cas de forfaiture, une statue en or massif à sa taille.

L’archonte éponyme : donne son nom à l’année en cours ; nomme les chorèges. Juge les « antidosis » ou échange de fortune : lorsqu’un citoyen astreint à l’obligation de la triérarchie prétendait s’en décharger sur un autre plus riche, et le forçait, en cas de refus, à échanger leurs biens.

L’archonte roi : il préside l’Aréopage et le tribunal des Ephètes, juge les homicides par objets ou animaux au prytanéon, surveille les mystères, règle les conflits concernant la prêtrise, surveille les domaines sacrés.

L’archonte polémarque : il n’a plus de pouvoir militaire, mais préside aux cérémonies pour les soldats morts dans l’année, à l’épitaphia (éloge funèbre), aux sacrifices en l’honneur des tyrannochtones, aux sacrifices à Artémis. Il octroie les allocations de guerre. Il est juge suprême pour toutes les questions où sont impliqués des étrangers, forains ou métèques.

Les thesmotètes :au nombre de 6, ils sont les gardiens de la législation, si les lois proposées sont imparfaites. Ils président généralement aux tirages au sort, fixent les jours où siègent les tribunaux, jugent la corruption, les détournements de fonds et l’usurpation de titres, la calomnie, le vol, l’adultère, l’outrage, le vol d’objets sacrés, les faux témoignages, les insultes d’esclaves, les litiges miniers et commerciaux.

Les autres magistrats tirés au sort : (κληρωτοι)

Magistratures judiciaires :

  • Les Onze, chargés des exécutions capitales
  • Les juges des dèmes

Magistratures financières :

  • Les 10 trésoriers d’Athènes
  • Les colacrètes, remplacés en 411 par les apodectes : receveurs généraux
  • Les Polètes : fonctionnaires chargés des ventes et adjudications pour le compte de l’Etat
  • Les logistes (comptes des magistrats) et practores (percepteurs des ventes)

Les édiles :

  • Astynomes (police des rues : 5 à Athènes, 5 au Pirée)
  • Hodopoioi : voirie
  • Commerce, rôle essentiel pour Athènes :
    • 10 agoranomes (surveillance du marché)
    • 10 métronomes (surveillance des poids et mesure)
    • 35 sitophylakes (commerce du blé. Noter leur nombre important : le ravitaillement en céréales est essentiel)
    • 10 épimélètes d’emporion (préposés aux magasins)

Chacun, dans sa juridiction, peut infliger des amendes de 50 drachmes.

Magistratures cultuelles :

Il n’y a pas de caste religieuse à Athènes ; fonctionnaires tirés au sort.

  • Hiéropoioi : pour des cérémonies déterminées (grandes Panathénées, fêtes d’Apollon Délien, d’Héraklès, d’Artémis Brauronia), sacrifices expiatoires, entretien des temples.

Les magistrats élus (charges essentiellement financières ou militaires) :

Magistratures financières :

  • Les hellanotames, créés avec la ligue de Délos : ils gèrent le trésor, assistés de parèdres (receveurs payeurs généraux) ; ils sont préposés au théorique (argent donné aux pauvres pour payer leur place de théâtre) et trésoriers des fonds militaires créés en 340 ; ce sont les trésoriers d’administration générale, en charge pour 4 ans. Au IVème siècle, ces fonctions deviennent plus importantes : un certain Euboulos a été quasiment un ministre des finances.
  • Fonctions techniques :
    • Epimélètes d’administration ou des arsenaux maritimes (gèrent le fonctionnement du Pirée)
    • Epimélètes des eaux et fontaines
    • 10 sophronistes (3 / tribus) choisis parmi les hommes de 40 ans comme guides des éphèbes.

Magistratures religieuses :

  • Epimélètes des processions (pour les Grandes Dionysies) : ils organisent la liturgie, or celle-ci est coûteuse : bientôt, faute de candidats, le tirage au sort remplace l’élection.
  • Epimélètes des mystères : 2 choisis dans deux familles, (Kérikes et Eumolpides) + 2 tirés au sort.
  • Exégètes : conservent et interprètent les textes sacrés. Ils sont Pythochrestoi (= confirmés par la Pythie), choisis sur une liste de 10.

Fonctions extraordinaires : attributions définies, mais durée non fixée.

  • Epistates pour des travaux particuliers
  • Commissaires pour la défense nationale
  • syllogeis pour l’inspection des comptes…

La stratégie

Au départ une fonction militaire, mais en réalité dirige la cité. Collège de 10 membres (sont aussi élus : 10 taxiarques (infanterie) et 10 phylarques (cavalerie). Ils sont immédiatement et indéfiniment rééligibles : ainsi, Cimon fut en plusieurs fois 15 fois stratège, et Périclès 15 fois de suite.

Evolution de la stratégie : propre à Clisthènes (on reconnaît le système décimal spécifique aux Ioniens) ; au début du Vème siècle (Marathon,490) les stratèges sont seulement chefs des hoplites, chacun commandant les hoplites de sa tribu,soit environ 1000 hommes. Le commandant en chef tournait toutes les 24 h. Mais Miltiade connaissait bien les Perses : il resta commandant en chef.

Le pouvoir, d’abord militaire, s’étendit à tout, même sur la ligue de Délos. Thémistocle, vainqueur de Salamine, Aristide, organisateur de la Ligue de Délos, Xantippe, père de Périclès, ont été stratèges.

Pour être stratège, il faut de l’argent. Les stratèges, à l’exception de Thémistocle, appartiennent aux plus hautes classes de la société. Ils sont soumis à la reddition de compte, soit après chaque élection, soit après la dernière. Périclès sera jugé après sa 15ème stratégie, et condamné à payer 15 talents (1500 kg d’argent).

Il faut être bon orateur : campagnes électorales, discours devant l’armée ; le stratège est dépositaire de la souveraineté nationale. Aristide, Alcibiade, Nicias, Cléon, Conon, Cléophon… Timothéos, Phocion, Iphicrate ont été de bons orateurs. Parfois, pour une opération précise, ils s’associent. Ainsi Nicias, Lamachos et Alcibiade pour l’expédition de Sicile.

  • Les prérogatives sont modestes : immunité temporaire, protection, honneurs formels, accès au Prytanée.
  • Les responsabilités sont très lourdes :
    1. obligation de rendre compte très souvent à la Boulè ou à l’Ecclésia
    2. les stratèges peuvent être mis en accusation n’importe quand, par n’importe qui ;
    3. Sur le plan financier, la reddition de compte est collective : tout le collège paye pour un seul stratège. En cas de dérobade, risque l’eisangélie ou la graphè logiou, l’interdiction de quitter le pays avant d’avoir rendu compte, de disposer de ses biens, d’entrer dans une autre famille par adoption.
  • Le magistrat sortant de charge doit remettre au logiste l’ensemble des comptes ; chaque logiste se retire au logistérion pour les vérifier. Il rend son rapport après 30 jours. S’il constate une fraude, le dossier est remis aux Euthynes (bouleutes) qui convoquent le tribunal. Les Euthynes eux-mêmes sont soumis à reddition de compte.

Très large prépondérance du législatif (Boulè, Ecclésia) sur l’exécutif. Et les barrières contre la sycophantie sont fragiles.

Au IVème siècle, alors qu’auparavant le caractère politique tendait à l’emporter sur le caractère militaire, l’évolution inverse se produit. A cette époque, l’armée n’est plus seulement composée de citoyens et de métèques ; les mercenaires deviennent de plus en plus nombreux. Dociles, doués d’une étonnante conscience professionnelle, ce sont des spécialistes de la guerre.

Les stratèges se répartissent alors en deux groupes :

  • 5 stratèges « généralistes » pour les fonctions dans la cité
  • 5 spécialistes
    • stratèges des hoplites (pour l’armée en campagne)
    • stratèges des territoires (défense de l’attique contre les territoires : hoplites âgés et métèques)
    • stratèges du Pirée

Ils font des rapports fréquents à la Boulè, peuvent lui faire des propositions avec l’accord des Prytanes. Ils peuvent donc encore peser sur la vie politique, mais la « dictature de l’éloquence » de Cimon et Périclès est remplacée par d’autres procédés :

  • alliance entre un stratège et un orateur bien écouté à l’Ecclésia : Iphicrate ami de Callistratos ;
  • « Condottiere », généraux efficaces, très populaires, qui orientent la politique d’Athènes au delà de ce que la ville avait souhaité: Thimothée est ami de Jasion, tyran de Phères ; Iphicrate épouse la fille du roi Thrace Cottys.

Evolution de la société : de Thémistocle à Démosthène, diminution du nombre de citoyens. La guerre du Péloponnèse a rompu l’équilibre entre ville et campagne ; la population urbaine domine. L’Aristocratie, qui au 5ème siècle a souvent opté pour l’oligarchie, est éliminée de la vie politique.