Le roman français au XXème siècle

Le Nouveau Roman

Le Nouveau Roman désigne un groupe de romanciers français, publiés aux Éditions de Minuit par Jérôme Lindon dans les années 1950, et qui rejettent les principales caractéristiques du "roman classique" hérité du réalisme balzacien ou stendhalien.

Originellement, l'expression, employée par un journaliste, était péjorative ; mais, reprise par Alain Robbe-Grillet (Pour un nouveau roman, 1963) et Jean Ricardou (Problèmes du Nouveau Roman, 1967, Pour une théorie du Nouveau Roman, 1971), elle est devenue une appellation officielle dans laquelle se reconnaissent, avec plus ou moins de nuances, des écrivains comme Claude Simon, Michel Butor, Alain Robbe-Grillet, Samuel Beckett, Nathalie Sarraute, Robert Pinget, Jean Ricardou, Claude Ollier.

Les principes du Nouveau Roman

Le Nouveau Roman se définit par une série de rejets :

Rejet du personnage

La notion de "personnage" est l'une de celles qui entrent en premier dans "l'ère du soupçon", pour reprendre le titre d'un célèbre essai de Nathalie Sarraute.

Que le roman puisse prétendre créer et faire connaître un "personnage" cohérent, dans toutes ses dimensions, de sa naissance à sa mort, paraît aberrant aux "Nouveaux Romanciers.

Influencés par l'Ulysse de Joyce ou les oeuvres de Faulkner, ils préfèrent la notion de "flux de conscience" de narrateurs multiples et parfois indiscernables.

Rejet du point de vue omniscient

Le point de vue "surplombant" d'un narrateur tout-puissant et omniscient est énergiquement rejeté; le narrateur, souvent multiple, parfois indécidable, ne peut donner qu'un point de vue partiel, et partial. Comme aux Surréalistes, la phrase "La Marquise sortit à cinq heures" est pour eux une imposture.

Rejet de la notion d'intrigue

S'il y a encore récit, celui-ci est diffracté entre plusieurs narrateurs, plusieurs points de vue, sans que le lecteur puisse atteindre une certitude quelconque quant à la vérité de ce qu'il croit comprendre ; la linéarité d'une intrigue menée de bout en bout par un auteur omniscient est inenvisageable.

Rejet de toute forme de réalisme, et de la notion de référent

Le Nouveau Roman ne donne pas à connaître un monde, un état de la société ; il ne saurait "faire concurrence à l'État-civil" ! Il n'a aucunement la prétention de reproduire le réel, ni même de l'évoquer.

Il remet en question la nécessité du vraisemblable, d’où le rejet de la description et le refus de ce que Barthes appelle l’« effet de réel ».

Pour les plus dogmatiques d'entre eux (Robbe-Grillet et Ricardou notamment), toute référence au réel, tout aspect auto-biographique a quelque chose d'obscène ; ce qui éloignera progressivement des auteur comme Claude Simon, pour qui la mémoire est un matériau essentiel, ou encore Beckett et Nathalie Sarraute.

L'aventure d'une écriture

La conséquence de cette série de rejet, c'est l'attention quasi exclusive accordée non à ce qui est écrit, mais à l'écriture elle-même en train de se faire ; l'œuvre acquiert une sorte d'autonomie par rapport à son auteur ; elle se construit par sa propre logique, indépendamment d'un projet pré-établi.

Conclusion

Le Nouveau Roman s'est donc construit contre le roman traditionnel, à la suite de la Révolution surréaliste d'une part, et des recherches de Joyce et de Faulkner d'autre part ; il aboutit à un point limite, où il ne reste rien de ce qui constitue le roman ; le risque étant, évidemment, celui de l'épuisement, et finalement de l'illisibilité.

Bibliographie

Théorie du Nouveau Roman

Alain Robbe-Grillet

Jean Ricardou

Nathalie Sarraute

Nouveaux Romans

Samuel Beckett

Michel Butor

Jean Ricardou

Alain Robbe-Grillet

Nathalie Sarraute

Claude Simon

De même, certains ouvrages de Marguerite Duras comme Moderato cantabile (1958) ou le Ravissement de Lol V. Stein (1964), ou les premiers récits de Philippe Sollers (le Parc, 1961), peuvent être rattachés au Nouveau Roman.