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Les raisons de la survie de Primo Levi.

     

© Sabrina Bourny et Céline Trouillet, TL 2


Introduction

Le lager est une réalité cauchemardesque hors du monde. Le but des détenus est de survivre. Même s'il ne le dit pas explicitement, l'auteur nous suggère, à travers le portrait de quelques individus, qu'il existe une " troisième voie". Une voie qui permet de ne sombrer ni dans la déchéance du " musulman ", ni dans l'inhumanité du " privilégié".
Dans cet univers où personne n'a envie de parler aux autres ni de les écouter, se manifestent parfois une lueur d'humanité et un peu de solidarité. Pourquoi Primo Levi a-t-il survécu ?

I- Les raisons.

1- La chance :

Tous les survivants l'ont dit, dans un tel univers, la chance joue un rôle essentiel. Tout le monde peut mourir à n'importe quel moment et ne peut être sauvé que par un coup de chance.

· La maladie

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, Primo Levi a eu la chance d'être blessé. Sa blessure au pied lui a permis de profiter d'un petit séjour au K.B. (ch. 4). Cela dit, " pour être soigné au K.B, en effet, il faut être enclin à guérir. Dans le cas contraire, direction la chambre à gaz".
Heureusement pour Levi, la chance tourne. Il a une bonne blessure qui lui garantit une bonne période de repos.
Le K.B est une vie plus " agréable " que celle du lager. " Le K.B, c'est le lager moins l'épuisement physique. Au K.B, on est à l'abri des coups et des mauvaises conditions de travail". C'est un moyen de vivre plus longtemps car tout le monde sait qu'ils finiront par mourir. " Il nous est possible de rentrer en nous-même et de mériter, et alors tout nous dit que nous ne reviendrons pas. "

· L'examen de chimie

Dans le chapitre 10, l'examen de chimie que Primo Levi subit comme angoissant et humiliant, fait qu'il se sent tout à coup autre qu'un simple détenu : " Alex repasse. Mais moi, je suis chimiste : qu'est ce que j'ai à voir avec cet Alex ? " (P112. Lorsqu'on l'interroge, il constate que son savoir est toujours là et tout se passe comme s'il se retrouvait lui-même : " Et pourtant, c'est bien moi, le diplôme de Turin […] je suis bien la même personne " " c'est la fièvre des examens, ma fièvre, celle de mes examens " (p114. L'examen de chimie se passe en allemand, cette épreuve est grotesque et absurde. Pour Primo Levi devenir chimiste serait une solution pour éviter le travail : " et maintenant je sais que je pourrais me sauver si je deviens spécialiste, et que je deviendrai spécialiste si je suis reçu à un examen de chimie " (p110). Après avoir réussit l'examen, il aura trouvé une chance supplémentaire de survivre au travail.

2- le souci de l'autre

Il n'existe pas de " recettes " pour préserver son humanité, mais seulement des exemples, car nul ne peut prévoir ce que deviendra un être humain placé dans de telles conditions, pas même lui.

· La disparition de la solidarité.

Des survivants, Primo Levi dit dans " les naufragés et rescapés ", que " presque tous se sentent coupables d'avoir manqué au devoir de solidarité. C'est là la faute la plus grave que tous les rescapés se reprochent après coup, lorsqu'ils se retrouvent dans la vie normale. Lors de la grande sélection d'octobre 1944, Levi pense qu'un autre a été pris par erreur à sa place et il note avec franchise " je ne sais pas ce que j'en penserais demain et plus tard : aujourd'hui, cela n'éveille en moi aucune émotion particulière. La maladie ou la mort de l'autre est plutôt une aubaine qui permet de se procurer des vêtements ou des chaussures, voire une ration de pain supplémentaire qu'on vole au mourant. C'est comme si on vivait sur le dos des morts.

3- Le refus de l'indifférence.
Pour survivre, Primo Levi ne veut pas adhérer au système. Il ne comprend pas que les prisonniers aient un regard indifférent envers les autres. Pour lui, pour survivre il faut regarder les choses, croiser les regards.

· L'amitié

Primo Levi est un homme d'exception mais trois autres personnages apparaissent eux aussi comme des êtres à part, qui échappent miraculeusement à la corruption ambiante.

Alberto :

C'est le meilleur ami du narrateur, et c'est surtout l'un de ces hommes rares, capables de s'adapter au Lager sans se perdre lui-même. Il est fort parce que, pour lui, la vie en général est un combat.
Pour survivre, il utilise à la fois son intelligence et son instinct. Il est doux car au lieu d'écraser les autres, il reste l'ami de tous. Malgré cette impitoyable lutte pour la survie, il n'envie pas les privilégiés des autres. Par exemple, lorsque Primo Levi est admis au laboratoire Alberto se réjouit pour son ami. Il est mort par malchance car contrairement à Levi, il n'a pas fait partie des malades qui sont restés dans les camps et ont survécu.

Jean dit le Pikolo :

Le personnage de Jean apparaît dans le chapitre 11, " le chant d'Ulysse. Le terme de " pikolo " est une germanisation de l'Italien Piccolo, le petit. Jean a eu la chance d'être quelqu'un de privilégié ( son poste est réservé aux jeunes et pourtant il a 24 ans. Il était surtout chargé des petites tâches comme l'entretien de la baraque ou le lavage des gamelles. Il pouvait grâce à cela manger à sa faim et passer des journées au chaud. Comme Alberto, il était à la fois fort et rusé, mais n'abusait jamais de son pouvoir. Il a su gagner la confiance du Kapo Alex, ce qui lui permet de défendre les autres. Le chapitre 11 est consacré au partage exceptionnel dans l'univers du Lager. C'est le seul épisode où les détenus évoquent avec plaisir leur passé et où la barrière des langues semble pouvoir être franchie : Jean veut apprendre l'Italien, Levi lui donne donc un cours.

Lorenzo :

Pour survivre, Lorenzo est reste simple et mystérieux comme un héros de légende. Pour les détenus, Lorenzo est surnaturel. Il était taciturne et solitaire, au caractère difficile dont la seule passion était son métier de maçon. Il s'est laissé mourir après sa déportation. Il a su survivre dans les camps mais il a baissé les bras après le plus dur.

Conclusion :

Pour survivre à cet enfer, il fallait mettre en place une stratégie. Les tactiques pouvaient être diverses et contradictoires mais suivant la situation, il fallait s'adapter aussi bien que possible. Primo Levi l'avait bien compris et c'est pour cela qu'il a su s'adapter et gérer cette situation, tout en ayant conscience que sans la chance, il n'aurait pas pu s'en sortir.