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Un regard objectif sur l'univers concentrationnaire
(exposé)

     

© Elodie Castelain & Pierre Petel (TL 2)



Introduction : - Qu'est-ce qu'un regard objectif ? Que Cherche t-on à définir par ce terme ?

Un regard objectif est un regard qui n'est pas influencé par les préjugés, qui n'a pas de parti pris. C'est une analyse objective de la situation comme peut le faire un historien.


1. L'objectivité de Primo Levi dans Si c'est un homme.

· Appendice

Primo Levi a écrit Si c'est un homme comme une sorte de témoignage suite à ce qu'il a vécu dans le Lager. Il avoue avoir écrit ce livre plus par désir de justice que par haine.
Lorsque Primo Levi a écrit Si c'est un homme, il a délibérément recouru au langage sobre et posé du témoin plutôt qu'au pathétique de la victime ou à la véhémence du vengeur. En écrivant de cette manière, il pensait que ses paroles seraient plus crédibles et qu'elles apparaîtraient par ce fait plus objectives et dépassionnées.

Levi se distingue donc par le regard qu'il porte sur le Lager qui se veut descriptif et objectif.
Levi dit p.191 : " Je ne suis pas un fasciste, je crois dans la raison et dans la discussion comme instruments suprêmes de progrès, et le désir de justice l'emporte en moi sur la haine[…] et les juges c'est vous "


· Chapitre 9 " Les élus et les damnés "

Levi a une formation scientifique et il voit le Lager comme une grande expérience scientifique sur la nature humaine.
p.93 : " Nous voudrions vous faire observer à quel point le Lager a été, aussi et à bien des égards, une gigantesque expérience biologique et sociale. " 

p.93 : " Vous aurez là ce qu'il peut y avoir de plus rigoureux comme champ d'expérimentation. "
Si c'est un homme est une sorte de compte-rendu scientifique de l'expérience. Ce qui permet à P.Levi de garder un regard objectif sur ce qu'il nous décrit et sur son expérience scientifique. Il utilise le " nous " de l'exposé scientifique. 
De plus, Primo Levi parle peu de sa vie privée, son but est de témoigner de ce qu'il voit et non pas de ses sentiments et de sa vie.

Il utilise le pronom personnel " on ", ce qui marque une certaine forme de neutralité, il ne se met pas en avant mais s'inclut dans le groupe.
p.16 : " Nous n'étions que des spécimens d'humanité bien ordinaires. "
Il utilise encore le " nous " de l'exposé scientifique.

Il ne s'attarde pas sur les personnes qu'il connaissait avant son entrée au camp.
p.17 : " Nous nous connaissions de longue date… "
Il nous parle seulement pendant 2 lignes d'une personne qu'il connaît depuis longtemps.

P.99 à 108, on a des études de cas suivant l'étude générale. On a donc une structure du texte scientifique. Primo Levi va donc présenter quatre personnages propre à une catégorie précise : Schepschel, Alfred.L, Elias et Henri.
A aucun moment P.Levi ne se situe parmi les 4 qu'il décrit. On ne sait pas qui il était réellement. Il reste neutre sur la situation et sur lui-même, on ne sait rien de lui réellement.


· Une étude de l'âme humaine

Pour Primo Levi, la volonté de témoigner ne se sépare pas d'une autre intention : celle de donner à penser et à réfléchir sur l'univers concentrationnaire.
Dans sa Préface, il dit avoir voulu " fournir des documents à une étude dépassionnée de certains aspects de l'âme humaine ".
Primo Levi est un scientifique, il a le goût de la connaissance. Il compare le Lager à "une gigantesque expérience biologique et sociale " p.93.
Or cette expérience, il en est convaincu, peut nous apprendre beaucoup sur les hommes en général.
Chap. 9 p.93 " aussi pourra -t-on se demander si l'on doit prendre en considération un épisode aussi exceptionnel de la condition humaine, et s'il est bon d'en conserver le souvenir […] Nous avons l'intime conviction que la réponse est oui. Nous sommes persuadés en effet qu'aucune expérience humaine n'est dénuée de sens ni indigne d'analyse, et que bien au contraire l'univers 
particulier que nous décrivons ici peut servir à mettre en évidence des valeurs fondamentales, sinon toujours positives. "

L'auteur nous fournit là les éléments de la réflexion, et c'est à nous lecteurs, de la mener. Cette étude doit-être objective, dépassionnée, n'être influencée par aucun préjugé, ni aucun parti pris. Non pas sens où elle serait neutre, mais au sens où le sentiment de l'horreur ne doit pas paralyser la pensée et le jugement. Et c'est ce que fait Primo Levi , car il ne donne pas ses opinions, il ne montre pas ses sentiments et se contente de décrire cet univers concentrationnaire.



2. Le problème de l'objectivité.

· Une neutralité presque impossible

Même si le livre correspond à une intention de vérité, et a une volonté d'objectivité, le témoignage ne peut pas être totalement objectif car on a le point de vue d'un seul sujet, qui n'a qu'une perception limitée sur l'univers concentrationnaire.
Primo Levi nous fait quand même part de son expérience, par exemple dans le chapitre 11 : "Le chant d'Ulysse" quand il essaie d'enseigner l'italien à Pikolo. Levi nous fait part de ses impressions, de ses sentiments.
P.121-122, on retrouve une des rares allusions à sa vie telle qu'elle était avant Auschwitz.
Il ne peut pas être un pur observateur, Levi n'a pas assez de recul pour cela car c'est avant tout une victime immergée dans un monde dont il ne voit qu'une partie : il ne sait pas ce qu'il se passe exactement à Birkenau. En plus, il n'a connu Auschwitz qu'en 1944 à une période où les conditions de vie pour les détenus s'étaient, si l'on peut dire, " améliorées ".

Cependant ce livre nous donne une vérité plus essentielle que celle des comptes-rendus objectifs car on a la vie du camp vu de l'intérieur à travers un sujet.
L'objectivité dans Si c'est un homme prend en fait la figure de l'honnêteté en s'en tenant au fait et en privilégiant l'exactitude.

On retrouve aussi le problème de la neutralité, car le témoignage ne peut pas être objectif au sens où il serait neutre. L'auteur veut dénoncer le système concentrationnaire. Le témoignage est en fait ici un acte d'accusation.
Dans la Préface, Levi dit qu'il n'a pas écrit son récit dans le but d'avancer de nouveaux chefs d'accusation. Mais il dira néanmoins dans Si c'est un homme que le thème de l'indignation devait prévaloir et qu'il pensait en faire un acte d'accusation.




3. Conclusion.

Primo Levi s'efforce tout au long de son œuvre de garder un regard objectif sur l'univers concentrationnaire où il a vécu pendant quelque temps. Il veut montrer l'expérience qu'a été le Lager mais ne surtout pas rentrer dans ses sentiments. Du moins c'est ce à quoi il s'efforce. Malgré tout il ne peut pas s'empêcher de dénoncer ce système, il n'est qu'un témoin au sens historique mais également un témoin judiciaire. Primo Levi ne restera donc pas totalement objectif, neutre.
Pour P.Levi , à l'expérience du Lager, de déporté, s'est superposée celle d'écrivain-témoin, bien plus longue et complexe, et le bilan est nettement plus positif.
P.214, il dit : " Au total ce passé m'a intérieurement enrichi et affermi ".
Grâce à cette expérience, il a beaucoup appris sur les hommes et sur le monde, en vivant, puis en écrivant et en méditant cette expérience. Auschwitz lui a permis d'écrire mais il garde malgré tout une écriture scientifique.