Démosthène, Première Philippique
Démosthène, Première Philippique, §9-12
[9] Ὁρᾶτε γάρ, ὦ ἄνδρες ᾿Αθηναῖοι, τὸ πρᾶγμα, οἷ προελήλυθ'
ἀσελγείας ἅνθρωπος, ὃς οὐδ' αἵρεσιν
ὑμῖν δίδωσι τοῦ
πράττειν
ἢ ἄγειν ἡσυχίαν, ἀλλ' ἀπειλεῖ καὶ λόγους ὑπερηφάνους, ὥς φασι,
λέγει,
καὶ
οὐχ
οἷός
ἐστιν ἔχων ἃ κατέστραπται μένειν
ἐπὶ τούτων, ἀλλ' ἀεί τι
προσπεριβάλλεται
καὶ
κύκλῳ πανταχῇ μέλλοντας ἡμᾶς καὶ καθημένους περιστοιχίζεται.
[10]
Πότ'
οὖν,
ὦ ἄνδρες ᾿Αθηναῖοι, πόθ' ἃ χρὴ πράξετε ; Ἐπειδὰν τί γένηται ; Ἐπειδὰν νὴ Δί' ἀνάγκη τις
ᾖ. Νῦν
δὲ
τί
χρὴ
τὰ
γιγνόμεν'
ἡγεῖσθαι ; Ἐγὼ μὲν γὰρ οἴομαι τοῖς
ἐλευθέροις μεγίστην ἀνάγκην τὴν ὑπὲρ τῶν πραγμάτων αἰσχύνην εἶναι.
Ἢ βούλεσθ', εἰπέ μοι,
περιιόντες
αὑτῶν πυνθάνεσθαι, « Λέγεταί τι
καινόν
; » Γένοιτο
γὰρ
ἄν τι
καινότερον
ἢ Μακεδὼν
ἀνὴρ ᾿Αθηναίους καταπολεμῶν καὶ τὰ τῶν ῾Ελλήνων διοικῶν ; « Τέθνηκε
Φίλιππος ; »
« – Οὐ
μὰ
Δί',
ἀλλ' ἀσθενεῖ. » // [11]
Τί
δ' ὑμῖν διαφέρει ; Καὶ
γὰρ
ἂν οὗτός τι πάθῃ, ταχέως ὑμεῖς ἕτερον Φίλιππον ποιήσετε,
ἄνπερ οὕτω προσέχητε
τοῖς
πράγμασι
τὸν
νοῦν·
οὐδὲ γὰρ οὗτος παρὰ
τὴν
αὑτοῦ ῥώμην τοσοῦτον ἐπηύξηται ὅσον παρὰ τὴν ἡμετέραν ἀμέλειαν. [12]
Καίτοι
καὶ
τοῦτο·
εἴ
τι πάθοι καὶ τὰ τῆς τύχης ἡμῖν, ἥπερ ἀεὶ βέλτιον ἢ ἡμεῖς ἡμῶν αὐτῶν ἐπιμελούμεθα, καὶ τοῦτ' ἐξεργάσαιτο, ἴσθ' ὅτι πλησίον μὲν
ὄντες, ἅπασιν ἂν τοῖς πράγμασιν τεταραγμένοις
ἐπιστάντες ὅπως βούλεσθε διοικήσαισθε,
ὡς δὲ νῦν ἔχετε, οὐδὲ διδόντων τῶν καιρῶν ᾿Αμφίπολιν δέξασθαι δύναισθ'
ἄν, ἀπηρτημένοι καὶ ταῖς παρασκευαῖς καὶ ταῖς γνώμαις. |
[9]
·
οἷ : là où (relatif adverbial, lieu
où l’on va)
·
ἀπειλέω-ῶ : menacer
·
ὑπερήφανος, ος,
ον :
méprisant, plein d’orgueil
·
κατέστραπται :
parfait moyen-passif de καταστρέφω
(καταστροφή,
ῆς) :
bouleverser, abattre, saccager, soumettre
·
προσπεριβάλλομαι : étendre son territoire tout autour
·
περιστοιχίζω
: tendre des filets tout autour, encercler [insistance sur περί, κύκλῳ, πανταχῇ... Démosthène
témoigne d’un véritable complexe obsidional !]
Voyez en effet, Athéniens, la situation, à quel degré d’impudence en est arrivé cet homme, qui ne vous donne même pas le choix d’agir ou de rester tranquille, mais vous menace, et tient, dit-on, des propos pleins d’orgueil, et n’est pas capable, tenant ce qu’il a soumis, d’en rester là, mais étend toujours son territoire autour de nous et nous enserre dans ses filets de toutes parts, nous qui temporisons et restons les bras croisés.
[10]
·
νή : oui certes !
·
περιιόντες
< περί-ειμι : aller çà et
là en flânant
Quand donc, Athéniens, quand ferez-vous ce qu’il faut ? Après quel malheur ? – quand, par Zeus, la nécessité s’imposera. Mais comment faut-il considérer ce qui arrive ? Pour ma part, en effet, je pense que pour des hommes libres, la honte devant ces événements constitue la plus grande nécessité. Ou bien voulez-vous, dites-moi, vous promenant de-ci de-là, vous informer les uns les autres : « que dit-on de neuf ? » Que pourrait-il arriver de plus neuf que de voir un Macédonien écraser les Athéniens et diriger la Grèce ? « Philippe est mort ? » « – Non par Zeus, mais il est malade ».
[11] Que vous importe ? En effet, s’il lui arrivait malheur, bien vite vous vous fabriqueriez un autre Philippe, si du moins c’est comme cela que vous êtes attentifs aux événements ; celui-ci n’a pas tant tiré sa puissance de sa propre force que de notre négligence.
[12]
·
ἐξεργάζομαι :
réaliser, accomplir
·
ἐπιστάντες :
se tenir au-dessus de, être prêt pour
·
ἀπηρτημένος < ἀπαρτάω-ῶ : séparer de
Or [supposons] ceci : s’il lui arrivait malheur, et si notre sort, qui s’occupe toujours mieux de nos affaires que nous-mêmes, nous rendait encore ce service, sachez que, étant sur les lieux et pouvant intervenir dans toutes les situations troublées, vous gouverneriez comme vous l’entendez ; mais dans la situation où vous êtes maintenant, même si les événements vous rendaient Amphipolis vous ne pourriez la récupérer, car vous n’êtes prêts ni par l’armement, ni par l’état d’esprit.